«L'hygiène, avant la microbiologie, n'est hygiénique que dans ses intentions. C'est la science des apparences qui repose entre des mains d'aveugles : est sain ce qui est beau, bon, et ne sent pas mauvais.»
Pierre Darmon, L'homme et les microbes, Fayard, 1999.
Investigation sur une intoxication
alimentaire à Salmonella
Montevideo liée à la contamination environnementale d'un système
de drainage de la cuisine du restaurant, Québec, Canada,
2020-2021 », source article
paru dans Journal of Food
Protection. L’article
est disponible en intégralité.
Résumé
En mai 2020, la Direction de santé publique du Québec a reçu un
signalement du Laboratoire de santé publique du Québec d'un cluster
de trois cas à Salmonella enterica enterica, sérogroupe C1,
sérotype Montevideo.
L'enquête épidémiologique a identifié un total de 67 cas entre le
1er janvier 2020 et le 13 août 2021, dont 66% étaient directement
liés à un restaurant de la zone. Les souches de Salmonella de
la plupart de ces cas se sont avérées identiques par séquençage
du génome entier.
L'inspection initiale du restaurant par les autorités compétentes
(Ministère de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation du
Québec), comprenant l'évaluation de l'hygiène et de la sécurité
des aliments, la recherche de cas de maladie parmi les employés et
les prélèvements des aliments, a été incapable d'établir
l’origine de l'éclosion.
Des prélèvements environnementaux ont montré que les siphons de
sol de la cuisine du restaurant étaient contaminés par la même
souche de Salmonella Montevideo que les cas de
l'éclosion.
Plusieurs méthodes de nettoyage et de désinfection ont été
utilisées à plusieurs reprises. Lorsque les prélèvements
environnementaux sur les lieux de restauration ont été négatifs à
plusieurs reprises et consécutivement, les cas dans la communauté
ont cessé. L'apparition préalable d'un incendie dans la cuisine
peut avoir joué un rôle dans la contamination des siphons du
restaurant.
En
conclusion, les professionnels de la santé publique devraient
considérer les systèmes de collecte des eaux usées (siphon,
collecteur des eaux usées)
et la possible aérosolisation des bactéries comme une source
potentielle d’une éclosion de salmonellose liée aux restaurants.
NB :
Merci à Joe
Whitworth de m’avoir signalé cette information.
Ce n’est pas vraiment un scoop mais cela contribue à la maîtrise
de Listeria dans l’environnement. On peut raisonnablement penser
que si les siphons, les collecteurs des eaux usées, les sols et les
plafonds sont propres, le reste est propre et exempt de Listeria
…
«La contamination par Listeria dans les installations de
production est plus probable dans les zones non en contact avec le
produit, selon une nouvelle étude», source Food
Safety News du 3 mai 2023.
Une nouvelle étude financée par le Center
for Produce Safety (CPS), «Study looks at Listeria
contamination patterns in processors» a révélé que la
contamination par Listeria monocytogenes dans les
installations de transformation des produits alimentaires est plus
susceptible de se produire dans les zones non en contact avec le
produit telles que les siphons, les collecteurs des eaux usées, les
sols et les plafonds, plutôt que dans les zones en contact direct
comme les couteaux et bandes transporteuses ou de convoyage.
Ana Allende et son équipe de l'institut de recherche CEBAS-CSIC en
Espagne ont mené un projet de deux ans pour examiner les schémas de
contamination par Listeria monocytogenes et les programmes de
nettoyage-désinfection associés dans trois installations de
transformation de produits alimentaires et identifier les principaux
points de contamination.
Les chercheurs ont divisé les zones de transformation en trois zones
en fonction de leur proximité en contact avec le produit.
- La zone 1 concernait les zones en contact direct, telles que les
couteaux et les bandes transporteuses.
- La zone 2 comprenait les surfaces qui n'entraient pas en contact
avec les aliments mais qui se trouvaient à proximité.
- La zone 3 comprenait des surfaces non en contact avec le produit,
plus éloignées, qui pourraient potentiellement conduire à la
contamination des zones 1 et 2.
Ils ont procédé à un échantillonnage systématique des
installations en fin de journée avant le nettoyage et la
désinfection, ainsi qu'après les activités de nettoyage et de
désinfection.
Les chercheurs ont collecté plus de 600 échantillons dans les trois
zones et 45 échantillons d'ingrédients crus et de produits finis.
L'équipe a ensuite utilisé le séquençage du génome entier (WGS)
sur 100 échantillons pour comprendre si Listeria était
transitoire ou persistant. Ils ont constaté que les deux mêmes
sérotypes de Listeria monocytogenes étaient présents sur
les trois lignes de transformation après les deux prélèvements,
avant et après le nettoyage, suggérant que ces sérotypes étaient
inhérents et se déplaçaient de la zone 3 vers la zone 1.
«Nous avons commencé à nous intéresser au rôle de la
contamination environnementale après des années de participation au
symposium de la CPS où certains chercheurs, tels que le Dr Martin
Wiedmann et la Dr Laura Strawn, se sont concentrés sur la maîtrise
de Listeria dans les usines de conditionnement et de
installations de transformation», a dit Allende. «Nous essayons
d'apporter nos expériences d'un autre point de vue. Les
installations que nous pouvons échantillonner ici pourraient
également nous aider à comprendre l'importance de ce problème.»
De plus, les chercheurs ont évalué l'efficacité des biocides
contre les isolats de Listeria monocytogenes résidents
et ont découvert que tous les isolats obtenus de l'environnement
après nettoyage étaient sensibles aux biocides, dissipant les
craintes que les agents pathogènes deviennent résistants aux
désinfectants.
Allende a dit que l’étude visait à fournir des résultats
pertinents pour les trois transformateurs de produits coopérants,
mais qu'elle avait également des implications plus larges pour
l'industrie des produits agricoles sur la manière dont elle devrait
effectuer la surveillance environnementale, y compris
l'échantillonnage après la transformation juste avant le nettoyage.
Les résultats devraient aider les transformateurs à mieux
comprendre les principaux points de contamination dans la zone 1 et
leur relation avec Listeria monocytogenes de séquence type
identiques ou similaires dans les zones 2 et 3.
«L'une des hypothèses que nous avions était que la matière
première introduisait une grande partie de Listeria»,
a dit Allende. «C'était avant que nous procédions à
l'échantillonnage et au séquençage complet du génome pour
comprendre les isolats et qu'ils ne provenaient pas tous de la
matière première. Une partie de la contamination provenait
probablement de la zone 3 dans les différentes installations de
transformation.»
Alors que plusieurs études ont examiné la prévalence de Listeria
monocytogenes dans les installations de transformation des
produits laitiers et de la viande, peu ont examiné les schémas de
contamination par Listeria monocytogenes et les programmes de
nettoyage-désinfection connexes dans les installations de
transformation des produits alimentaires. Le projet de recherche mené
par Allende et son équipe est conçu pour fournir des données
pratiques sur les plans de surveillance environnementale des
installations de production, ainsi que sur l'efficacité des
programmes de nettoyage et de désinfection.
La Food and Drug Administration des États-Unis a une politique de
tolérance zéro pour Listeria monocytogenes dans les
échantillons de produits transformés, tandis que la Commission
européenne a fixé un seuil allant jusqu'à 100 unités formant
colonie par gramme.
Commentaire
Le passage de Listeria
de la zone 3 à la zone 1 est probablement dû à une mauvaise
méthode de nettoyage.
Le contrôle de
l’environnement après nettoyage-désinfection peut s’avérer
utile, mais il semble encore plus utile juste avant le démarrage de
la production.
Enfin, l’article ne
mentionne pas la validation du nettoyage-désinfection avec le
recours avec des lames porte-germes.
En France, le critère
microbiologique pour Listeria
monocytogenes
dans les échantillons de produits transformés est proche de celui
de la FDA aux États-Unis, malgré ce critère énoncé de la
réglementation européenne. En fait, tout ceci est évolution
notamment en ce qui concerne les aliments prêts à être consommés
réfrigérés.
Dans une rare document sur
le sujet du nettoyage et de la désinfection des siphons de sol dans
les entreprises alimentaires, voici une vidéo
de Campden BRI de janvier 2020 à ce sujet.
Cette courte vidéo illustre les points clés à considérer lors du
nettoyage d'un siphon de sol dans un environnement de fabrication
d'aliments et de boissons. Elle explique comment sélectionner
l'équipement de nettoyage approprié, utiliser des techniques de
nettoyage et des désinfectants efficaces et comment inspecter un
siphon de sol après nettoyage. La vidéo se concentre sur les
méthodes de nettoyage pour deux conceptions de collecteurs d'eaux
usées, les caniveaux et le siphon cloche.
Voici
une étude parue dans International
Journal of Food Microbiology
à propos de l’analyse temporelle de la structure de la population
de Listeria
monocytogenes
dans les siphons de sol pendant la reconstruction et l'agrandissement
d'une usine de transformation de viande
Résumé
En
raison d'une probabilité plus élevée de
non-conformité
aux mesures d'hygiène, les travaux de reconstruction constituent un
défi majeur pour la sécurité des
aliments
des opérateurs
du
secteur alimentaire.
Ici,
nous avons surveillé un scénario de contamination par Listeria
monocytogenes au
cours de
la durée d'une
période de reconstruction visant à agrandir le bâtiment principal
d'une importante installation de transformation
de viande.
La
reconstruction a eu lieu alors que la production alimentaire était
en cours. Nous avons utilisé un schéma d'échantillonnage
longitudinal ciblant 40 siphons
de sol
répartis dans
l'environnement de transformation des aliments sur une période de
cinq ans.
La
structure de la population de L.
monocytogenes
a été déterminée par sérogroupage
par
PCR, électrophorèse sur gel en champ pulsé (PFGE) et par
typage
selon
MLST.
Alors que le premier échantillon a permis de déchiffrer une
contamination de
base
(45%), l’intensification des mesures de
nettoyage-désinfection a
permis de réduire la prévalence de L.
monocytogenes
avant le début des travaux (5%). Les activités de reconstruction
ont augmenté la prévalence de L.
monocytogenes
dans l’environnement
de transformation des aliments
(20,5%) et modifié la structure de la population en une proportion
plus élevée de génotypes associés à une maladie (61%).
Lors
du premier échantillonnage, ST121 était répandu dans tout
l’environnement
de transformation des aliments,
même dans la zone de conditionnement. Après les deuxième et
troisième prélèvements, à la suite d'une application accrue
d'hypochlorite au cours de le
la désinfection,
ST121 n'était présent que dans la zone de préparation des
matières
premières.
Une
flore résiliente a été détectée au cours de trois
échantillonnages (ST8, ST9 et ST37) qui n’auraient peut-être pas
été exposés au nettoyage quotidien des
siphons de sol.
Après
l’achèvement des travaux de reconstruction, la structure de la
population de L. monocytogenes a retrouvé sa condition
initiale (45% et 20,5% au cours de la première et sixième phases de
prélèvements).
Cet
article indique que les phases de reconstruction sont des épisodes à
haut risque pour la sécurité des aliments dans l’environnement de
transformation des aliments. Des précautions spéciales doivent être
prises pour éviter la contamination croisée des produits car la
reconstruction a généralement lieu pendant de longues périodes.
Faits
saillants
La
reconstruction de bâtiments est un défi majeur en matière de
sécurité des aliments.
La
contamination par L. monocytogenes était de 45% dans les
siphons de sol.
Au
début, ST121 était répandu dans tout l’environnement de
transformation des aliments.
Les
activités de reconstruction ont transformé la structure de la
population en génotypes associés à une maladie (61%; ST1, ST6).
Une
flore résiliente a été détectée (ST8, ST9, ST37) qui n'aurait
peut-être pas été exposée au nettoyage quotidien.