vendredi 7 décembre 2018

Les tortues et les reptiles sont une Salmonella factory


J’en ai déjà parlé à plusieurs reprises sur un précédent blog ici, mais cela ne fait pas de mal de rappeler certains faits ...

Le Centers for Disease Control rapporte une étude publiée le 7 décembre 2018 sur une épidémie d'infections à Salmonella Agbeni liée à une exposition aux tortues aux Etats-Unis en 2017.

En juin 2017, PulseNet, le réseau national de sous-typage moléculaire pour la surveillance des maladies d'origine alimentaire, a identifié 17 isolats cliniques de Salmonella Agbeni présentant un motif enzymatique Xba I indiscernable (souche épidémique) par électrophorèse sur gel en champ pulsé. Le même profil de Salmonella Agbeni Xba I a été isolé chez une tortue en 2015 ; dans une investigation menée en 2016 sur la même souche épidémique, 63% des patients ont signalé un contact avec des tortues. Malgré l'interdiction à la vente de petites tortues (longueur de la carapace inférieure à 4 pouces soit 10,16 cm,) aux États-Unis depuis 1975, des épidémies liées au contact avec des tortues continuent de se produire. Des personnes atteintes dans des éclosions précédentes à Salmonella Poona et à Salmonella Pomona liées à des tortues étaient concentrées géographiquement dans la région du sud-ouest des États-Unis. On sait que la production de tortues est supérieure dans le sud-est du pays. Une investigation sur les épidémies menée par le CDC et les services de santé a été ouverte pour identifier la source de l'épidémie de 2017.

Un cas a été défini comme un isolement de Salmonella Agbeni avec la souche épidémique d'un patient malade entre avril et décembre 2017. Les responsables de la santé des États et des autorités locales ont interrogé des patients pour vérifier les informations sur l'exposition aux tortues, notamment des informations sur les espèces de tortues et des informations sur les lieux d'achat. Les lieux d'achat rapportés par les patients ont été contactés pour obtenir des informations de traçabilité. Le séquençage du génome entier (WGS), utilisant l'analyse de haute qualité du polymorphisme d'un seul nucléotide (hqSNP) de haute qualité, a été effectué par le CDC sur les isolats cliniques de l'éclosion de 2017, le groupe de maladies de 2016 et l'isolat de tortue de 2015 pour caractériser le lien génétique.

76 cas ont été identifiés dans 19 États en 2017; les deux tiers (67%) des patients résidaient dans des États de la côte est (Connecticut, Delaware, Maryland, Massachusetts, New Jersey, New York, Pennsylvanie, Rhode Island et Virginie). L'âge des patients était compris entre moins de 1 an à 100 ans (moyenne = 21 ans). Parmi les 63 (83%) patients avec des informations sur l'hospitalisation, 30 (48%) ont été hospitalisés ; aucun décès n'a été signalé. Cinquante-neuf (78%) patients ont fourni des informations sur l'exposition, dont 23 (39%) qui ont signalé un contact avec des tortues ; parmi eux, 14 (61%) spécifiaient les petites tortues. Parmi les 12 patients qui ont expliqué comment les tortues ont été obtenues, six les ont achetées à un marchand ambulant ou en bordure de route, trois dans un magasin de vente au détail, deux les ont achetées à des festivals et un a déclaré les avoir reçues en cadeau. L'enquête de traçabilité n'a pas permis d'identifier une ferme de tortues commune fournissant les lieux d'achat.  L'analyse WGS par hqSNP a indiqué que les isolats cliniques de 2017 et 2016 et ceux de la tortue de 2015 étaient étroitement liés, différant de 0 à 18 SNPs.

Cette éclosion de salmonellose était liée à un contact avec de petites tortues et était associée à une fréquence d'hospitalisation plus élevée (48%) que les épidémies dans plusieurs Etats liées à des pathogènes d'origine alimentaire (27%), ainsi qu'à des éclosions récentes à Salmonella liées à des tortues (28% à 33%). La répartition géographique des patients était différente de celle des précédentes épidémies, ce qui suggère la nécessité de mieux comprendre la reproduction des tortues et la répartition des ventes de tortues aux États-Unis. L'analyse du WGS par hqSNP a été utilisée pour relier des maladies historiques et des isolats de tortues à des isolements provenant de patients de 2017, étayant l'hypothèse selon laquelle les tortues seraient la source probable de cette éclosion. Cette épidémie indique qu'il est en outre nécessaire d'éduquer les consommateurs et les membres du personnel des magasins de vente au détail concernant l'interdiction de la vente de petites tortues et d'éduquer les consommateurs afin d'éviter la transmission de Salmonella à l’homme par des animaux domestiques.

Sur un certains nombres de site en France, liste non exhaustive, il n’y a pas de recommandations vis-à-vis des salmonelles, 1, 2, 3 et 4. Sans doute qu’une action de nos autorités auprès de ces sites serait utile …

Un site d’information, Comment prendre soin d'une tortue d'eau ? traite du sujet des salmonelles, « Pensez au risque de salmonelle en manipulant la tortue ».

Cette investigation confirme qu’en France les reptiles domestiques peuvent être à l’origine de salmonelloses parfois graves chez les jeunes enfants, même en l’absence de contact direct, et souligne l’importance d’une information sur ce risque. 
Le réservoir de Salmonella est principalement animal, domestique et sauvage : volailles, porcs, bovins, rongeurs, mais aussi chiens, chats et nouveaux animaux de compagnie (principalement les reptiles : iguanes, tortues terrestres ou marines).
NB : Merci à Doug Powell du barfblog de m’avoir signalé cette étude.

Les pathogènes alimentaires font parler d'eux en Europe


Chacun a ses problèmes de sécurité des aliments, en France, on investigue sur des cas de salmonellose (83 personnes), l’Angleterre et le Pays de Galles constatent une augmentation des cas de maladies infectieuses d’origine alimentaire et voici qu’il y a une augmentation du nombre de cas à Campylobacter en Suède, l’Allemagne entreprend une investigation sur près de 60 cas de listériose … et le Danemark enquête sur une épidémie de salmonellose ...

Un article de Joe Whitworth du 6 décembre 2018 paru Food Safety News rapporte que « L'Allemagne enquête sur près de 60 cas de listériose ».
Les autorités allemandes enquêtent sur près de 60 cas de Listeria dans le sud et l'ouest du pays.

L'Institut Robert Koch (IRK) a dit que 57 isolats pourraient être attribués à des cas de listériose notifiés en Allemagne et qu'il existe un lien épidémiologique probable entre les infections.


L'IRK et l’Agence autrichienne pour la santé et la sécurité des aliments (AGES) ont identifié à plusieurs reprises des souches de Listeria monocytogenes de sérotype moléculaire IVb provenant d’infections humaines avec le même typage ou étroitement apparenté en utilisant une approche de type cgMLST (core genome multilocus sequence typing, une technique de séquençage du génome permettant de faire la distinction entre des souches dans des cas où l’électrophorèse ne le peut pas.) depuis août de cette année.

Parmi les isolats étudiés, un type de cas groupés identiques (CT pour cluster type) 4465 et le CT7353 étroitement apparenté ont été déterminés, selon l'IRK. Les analyses du polymorphisme d'un seul nucléotide (SNP pour Single nucleotide polymorphism) ont confirmé la relation phylogénétique étroite des isolats.

L'année dernière, l'Allemagne a signalé 770 cas de listériose, contre 704 en 2016. Depuis 2011, le nombre d'infections est en augmentation constante dans le pays.

Un cas a été signalé en France mais la personne avait été exposée en Allemagne.

Des enquêteurs interrogent des patients dans le cadre de leurs tentatives de trouver la source de l’aliment lié à l'épidémie. Jusqu'à présent, aucun isolat n'a été retrouvé avec les mêmes types de cluster dans les aliments.

Une porte-parole de l'IRK a déclaré à Food Safety News que l'épidémie était concentrée dans le Bade-Wurtemberg et la Rhénanie du Nord-Westphalie.

« Certains patients ont été analysés en Autriche mais ont été rapportés aux autorités allemandes. (L'épidémie) a été détectée en appliquant le séquençage du génome entier aux isolats envoyés aux laboratoires de référence », a-t-elle déclaré.

« La premier cas de maladie est apparu en mai 2018, l'épidémie est probablement en cours. Des interviews de patients générant des hypothèses sont en cours. »
« Autant que nous le sachions, sur la base du type moléculaire et les preuves épidémiologiques, cette épidémie n'est pas liée à d'autres épidémies. »

L'Allemagne a été touchée par d'autres foyers de Listeria cette année, dont un lié à des produits de prêts à être consommés de saumon, tels que le saumon fumé et mariné, qui a été responsable de 12 cas et quatre décès.

Le pays a signalé le plus récent cas dans cette éclosion en mai 2018 et dénombre cinq infections au total. Des cas de maladies dues au type de séquence (ST) 8 de Listeria monocytogenes ont également été enregistrées au Danemark et en France depuis 2015.

L'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) travaille également sur un rapport de deux groupes d'infections à Listeria monocytogenes dans plusieurs pays de l’UE liées à la consommation de saumon qui devrait être publié ce mois-ci.

Un autre article de Joe Whitworth du 7 décembre 2018 paru dans Food Safety News rapporte une « Augmentation de cas à Campylobacter en Suède liée au poulet ».

Les autorités suédoises étudient une augmentation des infections à Campylobacter liées au poulet réfrigéré.

Le nombre de cas domestiques d’infection à Campylobacter a été plus élevé en novembre que prévu pour la saison. Cette augmentation coïncide avec une incidence inhabituellement élevée de Campylobacter dans les troupeaux de poulets et des cas liés au travail avec des poulets. Folkhälsomyndigheten (Agence suédoise de la santé publique) a dit que l'on ne sait pas encore s'il existe un lien entre ces différents événements.

L'annonce intervient un peu plus d'un an après la fin d'une flambée épidémique avec 5 000 cas estimés, il y a plus de cas à Campylobacter déclarés dans le pays entre août 2016 et mai 2017 que le taux normal.

Une porte-parole de l'agence a déclaré à Food Safety News que Campylobacter en Suède suit une variation saisonnière avec le plus grand nombre de cas en été et une baisse en automne.

« En novembre, la tendance a été différente et le nombre de cas a recommencé à augmenter. Au cours des trois premières semaines de novembre de l'année dernière, nous avons enregistré une moyenne de cas domestiques, juste en dessous des 70 cas par semaine. Au cours de la même période cette année, le nombre moyen de cas est supérieur à 90 », a-t-elle dit.

« Il a également été porté à notre attention que le nombre de troupeaux de poulets de chair positifs avait augmenté. Ces données sont collectées dans le cadre du programme de surveillance de Campylobacter chez le poulet. En outre, un groupe de six cas nous a également été signalé par un bureau médical régional du comté du sud du pays. Les cas concernaient tous des travailleurs employés dans un abattoir de poulets. »
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Nombre de cas signalés d'infection à Campylobacter par semaine, 2017 et 2018 (semaine 47).

 La suspicion que le poulet réfrigéré soit à l'origine de l'augmentation du nombre de cas humains repose sur les problèmes concomitants de la production de poulet.

« Folkhälsomyndigheten a appris qu'il y avait des problèmes d'oiseaux malades chez les éleveurs, ce qui oblige plus de personnel à entrer et à sortir des poulaillers, s'occupant des oiseaux morts/malades, c'est-à-dire que les barrières de biosécurité peuvent être plus facilement cassées, ce qui pourrait rendre les poulets avec un risque plus élevé d'être infecté par Campylobacter », a déclaré la porte-parole.

Les responsables de Livsmedelsverket (Agence nationale des aliments) ont déclaré qu'aucun échantillonnage de poulets frais n'a été prévu pour aider à retrouver la source et que des enquêtes sur les causes de l'augmentation de Campylobacter dans les troupeaux de poulets sont en cours.

Les agences conseillent aux consommateurs de s’assurer  d’une hygiène optimale en cuisine lors de la manipulation de la viande de poulet crue et de la cuire à cœur.

Des responsables des deux agences ont déclaré qu'il n'existait aucun lien avec le précédent foyer de 2016 ou 2017 lié au poulet réfrigéré produit par Kronfågel. Cela a d'abord été expliqué par un temps plus chaud que d'habitude. Cependant, en janvier 2017, une erreur a été détectée dans le cadre de l'installation d'une zone de lavage des bacs de transport des poulets des fermes à l'abattoir et elle a été corrigée.

Kronfågel est l'une des plus grandes entreprises de volaille de Suède et occupe une position de leader sur le marché.

L’épidémie avait fait l’objet d’une enquête externe afin de tirer les conclusions et de prendre les mesures qui s'imposent afin de réduire le risque que de tels événements ne se reproduisent plus. Cela a été fait par l'Institut national de la santé et du bien-être social (THL) en Finlande et par l'Autorité finlandaise de sécurité des aliments (Evira).

La porte-parole de Folkhälsomyndigheten a déclaré le public avait été informé du problème à un stade beaucoup plus précoce et avait lancé le démarrage de l'équipe de management des crises zoonotiques afin de coordonner toutes les agences.



« Le Danemark prouve un lien avec le porc dans une épidémie à Salmonella, la souche est résistante aux antibiotiques », source article de Joe Whitworth du 8 décembre 2018 paru dans Food Safety News.

Au Danemark, des responsables enquêtent sur une éclosion à Salmonella avec 32 cas et au total, 19 personnes ont été hospitalisées. Les informations initiales indiquent que du porc frais est la source.

Des infections à Salmonella variant  monophasique du sérovar Typhimurium ont été rapportées au Statens Serum Institut (SSI) depuis la mi-octobre. Salmonella variant  monophasique du sérovar Typhimurium est souvent retrouvé chez le porc.

L'épidémie a été découverte le 16 novembre et fait actuellement l'objet d'une enquête par le SSI, le DTU Food Institute et le Fødevarestyrelsen (Administration vétérinaire et alimentaire danoise).

Selon un communiqué de SSI du 7 décembre, la bactérie, Salmonella variant  monophasique du sérovar Typhimurium (O:4,5,12;H:i,-), est résistante à l’ampicilline, au sulfaméthoxazole et à la tétracycline. Les souches se trouvent étroitement apparentées et du type de séquence 5296.