Je reproduits de larges extraits de cet excellent article d’André
Heitz car ce qui est train d’arriver ou arrivera peut-être aux
Pays-Bas, mais, Dieu nous en garde, cela peut aussi arriver en France ...
«Les pénuries alimentaires sont programmées avec maestria dans
l'Union Européenne : le cas des Pays-Bas», source article
d’André Heitz* paru sur son blog Agriculture, alimentation,santé
publique … soyons rationnels.
Avec une assiduité et une constance remarquables, faisant fi des
avertissements climatiques, géopolitiques et sociétaux, l'Union
européenne et certains de ses États membres planifient des pénuries
alimentaires pour «sauver» la planète. Voici le cas des Pays-Bas.
Des manifestations paysannes à bas bruit dans certains pays
Il y a ce que l'on peut appeler les manifestations conjoncturelles,
essentiellement liées à l'augmentation des coûts de production et
l'insuffisance des mesures compensatoires gouvernementales.
Ce fut le cas en Espagne, où les agriculteurs ont manifesté à
Albacete,
Bajadoz,
Murcie,
etc. Il y a eu des «tractorades»,
mais le mois
d'août n'a, semble-t-il, pas été aussi «chaud» qu'annoncé.
En Italie, la sécheresse et les pertes de production sont un facteur
aggravant. C'est Milan
qui a été bloqué en juillet, et les agriculteurs ont menacé
de rouler sur Rome.
Des manifestations ont également eu lieu en Allemagne, en
particulier le 31 août 2022 à l'appel de l'organisation
Landwirtschaft
verbindet Deutschland (l'agriculture crée des liens en
Allemagne).
Tout cela se déroule à bas bruit. Les grands médias ne prêtent
guère attention à ces événements, contrairement aux réseaux
alternatifs et protestataires qui tentent visiblement de monter un
mécontentement plus généralisé.
L'État stratège a frappé aux Pays-Bas
Ce sont les Pays-Bas qui présentent
la situation la plus préoccupante. La presse française ne s'y est
guère intéressée, alors même que le pays a connu des
manifestations massives et parfois violentes. Signalons tout de même
un article
du Monde,
de bonne facture, du 13 juillet 2022.
Répondant à des objectifs européens de rétablissement de la
virginité écologique, le gouvernement de M. Mark Rutte a annoncé
le 10 juin 2022 un plan de réduction des émissions d'azote de 50% à
l'horizon 2030. À sa décharge – partielle – un tribunal avait
décidé en 2019 que le pays devait faire beaucoup plus dans ce
domaine.
S'illustre ici une dérive inquiétante de nos systèmes
démocratiques : des gouvernements et parlements incapables de gérer
le présent adoptent des lois fixant des objectifs ambitieux, que
l'on sait irréalistes. C'est pour camoufler leur inaction et leur
incompétence, ou encore complaire à des franges influentes de
l'électorat et de l'opinion dite «publique». Rien de sérieux ne
se produisant, les activistes saisissent des tribunaux forcément
liés par les textes des lois, et aussi sous l'emprise du discours
apocalyptique ambiant. Et les gouvernements – souvent nouveaux –
sont sommés de prendre des mesures dévastatrices (ou trouver une
autre échappatoire).
Nous avons du reste connu le même
phénomène en France avec l'Affaire du Siècle… les activistes
trouvent intérêt à saisir la justice dans les pays démocratiques,
pas dans les États autoritaires ou à gouvernement illibéral...
Tous les secteurs économiques devront contribuer à l'effort, mais
c'est l'agriculture, à l’origine de 46% des émissions – de
protoxyde d’azote, d’ammoniac ou de nitrates issus des engrais
azotés et des effluents d’élevage – qui a été plus
particulièrement visée.
Des objectifs de réduction des émissions d'azote délirants
Le plan de la ministre de l'Environnement et de l'Azote (ça ne
s'invente pas !), Christianne van der Wal, et du ministre de
l'Agriculture, Henk Staghouwer, prévoit des réductions pouvant
aller jusqu'à 97% dans les zones Natura 2000 et 70% dans 131 zones
adjacentes, avec un minimum de 12%. Les provinces sont chargées de
mettre au point les plans détaillés d'ici au 1er juillet 2023.
Un premier effet de ce plan a été la démission du ministre Henk
Staghouwer, qui aura été en poste pendant à peine huit mois. «Je
me suis demandé si j'étais la bonne personne pour superviser les
tâches qui m'incombent», a-t-il
déclaré. «Je suis arrivé à la conclusion que je ne suis pas
cette personne.»
L'effet majeur porte évidemment sur l'agriculture, mais aussi sur
les industries d'amont et d'aval et, par voie de conséquence, sur la
production agricole et alimentaire du deuxième exportateur mondial,
mais aussi sur l'ensemble du tissu social en zones rurales.
* André Heitz est ingénieur agronome et fonctionnaire international
du système des Nations Unies à la retraite. Il a servi l’Union
internationale pour la protection des obtentions végétales (UPOV)
et l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI).
Dans son dernier poste, il a été le directeur du Bureau de
coordination de l’OMPI à Bruxelles.
Complément du 18 octobre 2022