Le blog vous avait présenté le 16 mai la création de la nouvelle
police sanitaire en ces termes, France
: Une police sanitaire unique verra bien le jour en 2024 ou comment
après avoir cassé le dispositif, on tente de reconstruire !
Voici
que le 7 juin le ministère de l’Agriculture nous propose
5 questions/réponses
sur la réforme de la police en charge de la sécurité sanitaire des
aliments.
Bien
entendu, il ne s’agit pas d’une conférence de presse car ce
ministère ne semble pas du tout doué dans l’art de la
communication. Ainsi, Olivier
Masbou rapporte l’arrivée d’un nouveau conseiller com dans
ce ministère, le troisième en moins d’un an !
Bref
venons-en aux questions et aux réponses …
Encore
un petit préalable pour indiquer que le syndicat CFDT a publié le
11 mai une lettre à propos de la réforme de la sécurité sanitaire des aliments (SSA), «des
questions (encore) sans réponses aux organisations syndicales et une
lettre ouverte au ministre de l’Agriculture.»
Le
syndicat
FO quant à lui dénonce la délégation
de service public des
contrôles en remise directe et des plans
de surveillance et de contrôles.
Voici
le détail de ces 5 questions/réponses avec les commentaire du blog.
1/
Pourquoi une réforme maintenant ?
La
réforme vise à rendre l’organisation de la police de la sécurité
sanitaire des aliments (SSA) plus lisible et plus efficiente.
Dans la plupart des pays européens la sécurité sanitaire des
aliments est pilotée par un seul organisme. Jusqu’ici, le schéma
d’organisation français faisait exception avec l’intervention de
plusieurs acteurs pour le contrôle des activités professionnelles
du secteur alimentaire : la DGAL, rattachée au ministère en charge
de l’agriculture, la DGCCRF, rattachée au ministère en charge de
l’économie, et la Direction générale de la Santé (DGS),
rattachée au ministère de la santé et de la prévention.
Commentaire
Le
ministre
de l’économie indiquait le 14 mai 2018, «La DGCCRF n’a plus
les moyens d’assurer ses missions.» Dans ces conditions, on
déshabille Pierre pour rhabiller Paul …
Il
est rapporté, «Les
principaux constats font état d’une organisation complexe dans la
répartition des tâches entre la DGAL et la DGCCRF avec des
chevauchements partiels dans certains champs d’intervention, sujets
à la critique lors de crises sanitaires alimentaires.»
Effectivement,
un article du blog, Sécurité
des aliments, voici venir l’incroyable guerre des chapelles !,
indiquait que tous
les noms auront été utilisés, guerre
des polices, «armée mexicaine», «police unifiée», «police
privée» et «guerre des chapelles» …
Cela
étant, il y avait avant trois administrations, DGAL, DGS et DGCCRF,
il y aura toujours trois administrations et le blog vous détaille
les missions des uns et des autres ici.
2/
Quel est le bénéfice attendu ?
La
réforme permettra de rendre plus lisible et plus efficiente l’action
de l’État avec, d’une part, une chaîne de commandement unique
entre le ministre en charge de la SSA et les préfets, et d’autre
part, le regroupement des agents exerçant les contrôles sanitaires
des aliments sous une même tutelle ministérielle. Cette nouvelle
organisation doit faciliter la gestion de crises sanitaires et doit
également permettre le renforcement, quantitatif et qualitatif, des
contrôles au travers d’un dispositif de programmation, d’une
méthodologie de contrôle et d’un processus de gestion des suites
des contrôles uniformisés.
La
réforme s’inscrit dans une approche intégrée «une seule santé»
prenant en compte les divers facteurs de risques (pratiques
agricoles, technologies de la transformation agroalimentaires,
contaminants du milieu naturel) susceptibles d’avoir un impact sur
la qualité sanitaire des aliments.
Il
en résultera une action de l’État plus lisible pour le citoyen et
les opérateurs professionnels, mais également pour les partenaires
européens et internationaux pour qui la confiance dans
l’organisation du dispositif de contrôles officiels est
essentielle pour le développement et le maintien des marchés de
produits agricoles et agroalimentaires.
Commentaire
D’accord
avec la lisibilité, pour l’efficience, on jugera sur pièces ;
idem pour la gestion des crise sanitaires. Cette réforme sera-t-elle
«susceptible d’avoir un impact sur la qualité sanitaire des
aliments.» Là aussi nous jugerons sur pièces.
Il
faut espérer «une action de l’État plus lisible pour le citoyen
et les opérateurs professionnels», quant aux partenaires européens
et internationaux, nous étions un pays à plusieurs guichets et on
l’a enfin, semble-t-il, compris.
3/
Quand la réforme sera-t-elle effective ?
La création de la police
sanitaire unique a été officialisée le 2 juin 2022 par le décret
n°2022-840 relatif aux attributions du ministre de l’agriculture
et de la souveraineté alimentaire. Sa mise en œuvre effective
s’effectuera par
étapes pendant
l’année 2023 selon des modalités de transfert des domaines de
compétences qui sont en cours de définition entre les deux
ministères. Elle s’achèvera au début de l’année 2024.
Les
objectifs attendus sont :
-
Augmenter de 80% le nombre d’inspections en remise directe dès
2024, soit un total de 100 000 contrôles par an ;
-
Augmenter de 10% des contrôles des établissements de fabrication de
produits alimentaires.
Commentaire
Les
objectifs semblent ambitieux mais il faut dire et le répéter que
l’on a pris un malin plaisir à casser le nombre d’inspections en
SSA, qui était, je le rappelle, de 86 239 en 2012, il y a donc 11
ans. Aujourd'hui, d’après les données 2022 de la DGAL, on en est
à 48 960. La trajectoire va être donc un grand bon en avant …
4/
Quel sera le nouveau périmètre d’action de la DGAL ?
Les
actions de ces trois administrations, DGAL,DGS et DGCCRF ont été
détaillées dans un article
du blog le 28 janvier 2023, avant il y avait trois administrations, après la réforme, il y aura toujours trois administrations ...
5/
Concrètement pour le consommateur et les professionnels… cela
change quoi ?
Pour
le consommateur, ce transfert de compétences ne change rien sur le
fond : l’État continue d’assurer la permanence de sa mission de
contrôle et d’inspection sanitaire. Mieux, la réforme doit
permettre de renforcer les contrôles et d’améliorer les modalités
de mise en œuvre de la politique de sécurité sanitaire au bénéfice
du consommateur en simplifiant la gouvernance de la police sanitaire,
au service d’une plus grande efficacité grâce notamment aux
économies d’échelle réalisées. Pour les opérateurs
professionnels, cette réforme facilitera l'identification du bon
interlocuteur et l'harmonisation des procédures.
Commentaire
Ici, on semble se moquer des consommateurs. On va passer de moins de
50 000 inspections par an à 100 000, et cela «ne change rien sur le
fond» ! Très étonnante cette réponse.
Ce va effectivement changer pour le consommateur lambda car «la
réforme doit permettre de renforcer les contrôles.»
Le blog continuera de suivre cela de près ...
Complément
On peut penser que chiffre de 100 000 inspections est important, mais si l'on regarde du côté de nos amis belges, c'est peu ...
Ce sont près de 160 000 entreprises qui sont
soumises à notre surveillance, effectuée notamment via 116 000
inspections (soit un contrôle toutes les 5 minutes, 317 par jour) et
73.000 échantillonnages par an. Source AFSCA.
Mise à jour du 2 juillet 2023
Une
fois n'est pas coutume, je suis assez
d'accord avec le titre de cet article
du
27 juin 2023 de Que
Choisir, «Sécurité
sanitaire des aliments. Vers une privatisation rampante des
contrôles».