jeudi 8 juin 2023

Sécurité des aliments : Une conférence de presse pour tenter d'expliquer la nouvelle police sanitaire unique en France

Le blog vous avait présenté le 16 mai la création de la nouvelle police sanitaire en ces termes, France : Une police sanitaire unique verra bien le jour en 2024 ou comment après avoir cassé le dispositif, on tente de reconstruire !

Voici que le 7 juin le ministère de l’Agriculture nous propose 5 questions/réponses sur la réforme de la police en charge de la sécurité sanitaire des aliments.

Bien entendu, il ne s’agit pas d’une conférence de presse car ce ministère ne semble pas du tout doué dans l’art de la communication. Ainsi, Olivier Masbou rapporte l’arrivée d’un nouveau conseiller com dans ce ministère, le troisième en moins d’un an !

Bref venons-en aux questions et aux réponses …

Encore un petit préalable pour indiquer que le syndicat CFDT a publié le 11 mai une lettre à propos de la réforme de la sécurité sanitaire des aliments (SSA), «des questions (encore) sans réponses aux organisations syndicales et une lettre ouverte au ministre de l’Agriculture

Le syndicat FO quant à lui dénonce la délégation de service public des contrôles en remise directe et des plans de surveillance et de contrôles.

Voici le détail de ces 5 questions/réponses avec les commentaire du blog.

1/ Pourquoi une réforme maintenant ?

La réforme vise à rendre l’organisation de la police de la sécurité sanitaire des aliments (SSA) plus lisible et plus efficiente.
Dans la plupart des pays européens la sécurité sanitaire des aliments est pilotée par un seul organisme. Jusqu’ici, le schéma d’organisation français faisait exception avec l’intervention de plusieurs acteurs pour le contrôle des activités professionnelles du secteur alimentaire : la DGAL, rattachée au ministère en charge de l’agriculture, la DGCCRF, rattachée au ministère en charge de l’économie, et la Direction générale de la Santé (DGS), rattachée au ministère de la santé et de la prévention.

Commentaire

Le ministre de l’économie indiquait le 14 mai 2018, «La DGCCRF n’a plus les moyens d’assurer ses missions.» Dans ces conditions, on déshabille Pierre pour rhabiller Paul …

Il est rapporté, «Les principaux constats font état d’une organisation complexe dans la répartition des tâches entre la DGAL et la DGCCRF avec des chevauchements partiels dans certains champs d’intervention, sujets à la critique lors de crises sanitaires alimentaires.»

Effectivement, un article du blog, Sécurité des aliments, voici venir l’incroyable guerre des chapelles !, indiquait que tous les noms auront été utilisésguerre des polices, «armée mexicaine», «police unifiée», «police privée» et «guerre des chapelles» …

Cela étant, il y avait avant trois administrations, DGAL, DGS et DGCCRF, il y aura toujours trois administrations et le blog vous détaille les missions des uns et des autres ici.

2/ Quel est le bénéfice attendu ?

La réforme permettra de rendre plus lisible et plus efficiente l’action de l’État avec, d’une part, une chaîne de commandement unique entre le ministre en charge de la SSA et les préfets, et d’autre part, le regroupement des agents exerçant les contrôles sanitaires des aliments sous une même tutelle ministérielle. Cette nouvelle organisation doit faciliter la gestion de crises sanitaires et doit également permettre le renforcement, quantitatif et qualitatif, des contrôles au travers d’un dispositif de programmation, d’une méthodologie de contrôle et d’un processus de gestion des suites des contrôles uniformisés.
La réforme s’inscrit dans une approche intégrée «une seule santé» prenant en compte les divers facteurs de risques (pratiques agricoles, technologies de la transformation agroalimentaires, contaminants du milieu naturel) susceptibles d’avoir un impact sur la qualité sanitaire des aliments.
Il en résultera une action de l’État plus lisible pour le citoyen et les opérateurs professionnels, mais également pour les partenaires européens et internationaux pour qui la confiance dans l’organisation du dispositif de contrôles officiels est essentielle pour le développement et le maintien des marchés de produits agricoles et agroalimentaires.

Commentaire

D’accord avec la lisibilité, pour l’efficience, on jugera sur pièces ; idem pour la gestion des crise sanitaires. Cette réforme sera-t-elle «susceptible d’avoir un impact sur la qualité sanitaire des aliments.» Là aussi nous jugerons sur pièces.

Il faut espérer «une action de l’État plus lisible pour le citoyen et les opérateurs professionnels», quant aux partenaires européens et internationaux, nous étions un pays à plusieurs guichets et on l’a enfin, semble-t-il, compris.

3/ Quand la réforme sera-t-elle effective ?

La création de la police sanitaire unique a été officialisée le 2 juin 2022 par le décret n°2022-840 relatif aux attributions du ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Sa mise en œuvre effective s’effectuera par étapes pendant l’année 2023 selon des modalités de transfert des domaines de compétences qui sont en cours de définition entre les deux ministères. Elle s’achèvera au début de l’année 2024.
Les objectifs attendus sont :
- Augmenter de 80% le nombre d’inspections en remise directe dès 2024, soit un total de 100 000 contrôles par an ;
- Augmenter de 10% des contrôles des établissements de fabrication de produits alimentaires.

Commentaire

Les objectifs semblent ambitieux mais il faut dire et le répéter que l’on a pris un malin plaisir à casser le nombre d’inspections en SSA, qui était, je le rappelle, de 86 239 en 2012, il y a donc 11 ans. Aujourd'hui, d’après les données 2022 de la DGAL, on en est à 48 960. La trajectoire va être donc un grand bon en avant …

4/ Quel sera le nouveau périmètre d’action de la DGAL ?

Les actions de ces trois administrations, DGAL,DGS et DGCCRF ont été détaillées dans un article du blog le 28 janvier 2023, avant il y avait trois administrations, après la réforme, il y aura toujours trois administrations ...

5/ Concrètement pour le consommateur et les professionnels… cela change quoi ?

Pour le consommateur, ce transfert de compétences ne change rien sur le fond : l’État continue d’assurer la permanence de sa mission de contrôle et d’inspection sanitaire. Mieux, la réforme doit permettre de renforcer les contrôles et d’améliorer les modalités de mise en œuvre de la politique de sécurité sanitaire au bénéfice du consommateur en simplifiant la gouvernance de la police sanitaire, au service d’une plus grande efficacité grâce notamment aux économies d’échelle réalisées. Pour les opérateurs professionnels, cette réforme facilitera l'identification du bon interlocuteur et l'harmonisation des procédures.

Commentaire

Ici, on semble se moquer des consommateurs. On va passer de moins de 50 000 inspections par an à 100 000, et cela «ne change rien sur le fond» ! Très étonnante cette réponse.

Ce va effectivement changer pour le consommateur lambda car «la réforme doit permettre de renforcer les contrôles.»

Le blog continuera de suivre cela de près ...

Complément

On peut penser que chiffre de 100 000 inspections est important, mais si l'on regarde du côté de nos amis belges, c'est peu ...

Ce sont près de 160 000 entreprises qui sont soumises à notre surveillance, effectuée notamment via 116 000 inspections (soit un contrôle toutes les 5 minutes, 317 par jour) et 73.000 échantillonnages par an. Source AFSCA.

Mise à jour du 2 juillet 2023
Une fois n'est pas coutume, je suis assez d'accord avec le titre de cet article du 27 juin 2023 de Que Choisir, «Sécurité sanitaire des aliments. Vers une privatisation rampante des contrôles».

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