lundi 3 décembre 2018

Les produits alimentaires fabriqués en France sont en tête des notifications au réseau d’alerte européen RASFF, faut-il se réjouir de cette bonne nouvelle ?


En sécurité des aliments en France, il faut bien l’admettre, les résultats en termes d’inspections en sécurité des aliments ne sont pas au rendez-vous puisqu’ils sont en baisse depuis 5 ans, les exemples sont connus et identifiés, notamment par le Rapport de la Commission d’enquête chargée de tirer les enseignements de l’affaire Lactalis et d’étudier à cet effet les dysfonctionnements des systèmes de contrôle et d’information, de la production à la distribution, et l’effectivité des décisions publiques, et l’on ne voit pas l’once d’un début d’autocritique (voir à ce sujet ce qui se passe au Royaume-Uni), et il me semble que changer de paradigme en matière de sécurité des aliments serait tout à fait approprié !

Alors à la fièvre ambiante que vit en ce moment la France, j’ajoute modestement ma contribution … pour une meilleure sécurité des aliments !

Un constat est simple et sans appel est le suivant : la France avec ses produits d’origine nationale est devenu le premier pays de l’UE en termes de notification au réseau d’alerte européen RASFF … en 2018 !
  1. France, 203
  2. Pologne, 165
  3. Espagne, 159
  4. Pays-Bas, 148
  5. Allemagne, 141
  6. Italie, 138
  7. Royaume-Uni, 92
Pas de quoi être fier, il ne s’agit d’agri ou de France bashing, mais plutôt le résultat d’une certaine politique de sécurité des aliments voulue depuis de nombreuses années … et qui rencontre ses limites : trop de règles, environnement économique, pression de la distribution, maîtrise sanitaire insuffisante, etc.

80 notifications seulement sur 203 ont été déclarées par la France, soit 39,4%.

Ci-dessous la liste des notifications depuis 2012 jusqu’à 2018, mais l’année n’est pas encore finie :

- 2018 : 203
- 2017 : 133
- 2016 : 119
- 2015 : 121
- 2014 : 110
- 2013 : 129
- 2012 : 111

Bien entendu il y a des pays qui sont des candidats hors concours, souvent habitués au podium comme la Chine et la Turquie, avec respectivement 289 et 287 notifications. Suivent plus loin, les Etats-Unis, l’Inde, et le Brésil, avec respectivement 183, 150 et 98 notifications.

En prenant en compte les plus gros contributeurs, la France se retrouve donc à la troisième place de l‘ensemble des pays commercialisant avec l’UE et identifiés par le réseau d’alerte européen RASFF. Bien triste constat …

Parmi les causes des notifications, sans surprise arrivent largement en tête les micro-organismes pathogènes ou dangereux.

- Micro-organismes pathogènes : 131, soit plus de 68,5% du nombre de notifications, dont norovirus (38), Salmonella (29), Listeria (20), Campylobacter (18), E. coli producteurs de shigatoxines (17) ,Escherichia coli (8), Cronobacter (2), Intoxication alimentaire (4)
- Corps étrangers : 21
- Infestation parasitaire : 9
- Métaux lourds : 7
- Biocontaminants : 6, dont 3 pour cause d’histamine
- Allergènes : 5
- Micro-organismes non pathogènes : 4
- Additifs alimentaires : 3
- Résidus de pesticides : 3
- Composition : 3
- Biotoxines marines : 2
- Mycotoxines : 2
- Défaut d’emballage : 2
- Contrôle du procédé insuffisant : 2
- Contaminants industriels : 2


Parmi les produits concernés :

- Mollusques bivalves : 53 dont huîtres 41, moules 7, clams 4 et amandes de mer 1
- Lait et produits laitiers : 34
- Volaille et les produits de volaille : 29
- Poissons et produits de la mer : 19
- Viande et les produits de viande (hors volaille) : 11
- Céréales et produits de boulangerie : 9
- Fruits et végétaux : 9
- Plats préparés et snacking : 8
- Produits transformés : 5
- Confiserie : 3
- Cacao, cafés et thés : 2
- Matériaux au contact des aliments : 2


Cela étant, il y a aussi le volume des exportations. En toute logique, plus un pays exporte, comme c’est le cas de la France, plus les alertes seront nombreuses … cela étant il a des limites ...

Ce constat va de pair avec ce que témoignent les rapports d’activité de la DGCCRF concernant les alertes des produits alimentaires et qui soulignent l’importance de la parts des produits d’origine nationale dans ces alertes :


2017
- 575 alertes
- 405 alertes ayant une origine nationale dont 10 % ont concerné d’autres États membres de l’Union européenne.
2016
- 543 alertes
- 369 alertes ayant une origine nationale dont 9 % ont concerné d’autres États membres de l’Union européenne.
2015
- 536 alertes
- 394 ayant une origine nationale dont 5 % ont concerné d’autres États membres de l’Union européenne
2014
- 389 alertes dont 276 ayant une origine nationale
- 50 notifications sur le réseau d’alertes européen RASFF
2013
- 264 alertes nationales dont 145 ont fait l’objet d’une notification sur le réseau d’alertes européen RASFF


Je ne sais pas comment sont obtenus les chiffres de la DGCCRF. Mais, on voit bien ce qui se passe depuis des années, avec une lente mais constante augmentation depuis 2015, les alertes étant dues très majoritairement aux produits alimentaires d’origine nationale.

Même constat avec ce qui se passe sur le territoire national au niveau des avis de rappel des produits alimentaires avec 303 avis de rappel, selon le site Oulah!, au 1er décembre 2018 versus 192 pour toute l’année 2017 !


Les résultats indiquent que la morbi-mortalité attribuable aux maladies infectieuses d’origine alimentaire reste élevée en France, avec 1,28 à 2,23 millions de cas annuels, dont 15 800 à 21 200 hospitalisations et entre 232 et 358 décès. En France, les infections à norovirus, Campylobacter spp. et Salmonella spp. représentent la majorité des cas et des hospitalisations d’origine alimentaire. Les infections à Salmonella spp. et Listeria monocytogenes représentent la moitié des décès d’origine alimentaire.

Ces éléments sont bien loin des données annuelles, rituelles et relativement ‘rassurantes’ des toxi-infections alimentaires collectives, dont « on estime ainsi que moins d’une TIAC sur cinq, voire sur dix, serait effectivement déclarée. »

Bien entendu, ces notifications au RASFF de l’UE et les alertes liés aux avis de rappel en France sont une bonne chose, on détecte et surtout les professionnels font le job, mais derrière ce constat se cache l’absence de la transparence en matière de communication et d’information …, ce qui suscite bien des questions de confiance, mais aussi des cas sporadiques d’intoxications alimentaires, ce qui me fait dire que les maladies infectieuses d’origine alimentaire en France constituent un fardeau élevé.

dimanche 2 décembre 2018

Comment nait un pseudo-buzz ? À propos des écrans de commande chez McDonald’s au Royaume-Uni

Pour créer le buzz, il vous fut quelques ingrédients,

Prenez une information incompréhensible sur Gorafi du 30 novembre 2018,

Polémique – Des traces de McDonald’s retrouvées dans de la matière fécale.
Une enquête qui va sans doute créer une polémique. En effet, une étude révèle que de nombreuses traces de McDonald’s ont été retrouvées dans plusieurs examens de matières fécales.

Si l’on met les choses à l’endroit, ce sera des traces de matières fécales retrouvées dans des restaurants McDonald’s, mais l’on verra que cela ne se retrouve pas là où l’on pense …

Puis une étude détecte des matières fécales sur des écrans tactiles dans huit restaurants McDonald's au Royaume-Uni :
Une investigation a dit, selon Newsweek, que des écrans tactiles installés dans les succursales McDonald’s en Grande-Bretagne avaient été testés positifs pour de la matière fécale.


Des échantillons ont été prélevés par des experts dans huit restaurants, dont six à Londres et deux à Birmingham (la liste des restaurants Mc Donald’s est indiquée ici).
Les clients utilisent les écrans tactiles pour choisir et payer leur nourriture, puis ils récupèrent leur commande au comptoir.


Metro.co.uk a mené cette étude avec Paul Matawele, conférencier en microbiologie à la London Metropolitan University, qui s'est dit surpris de la quantité de bactéries intestinales et fécales présentes sur les machines, concluant que de nombreuses personnes ne se lavaient pas. leurs mains avant de les utiliser.


Parmi les bactéries découvertes, il y avait des Staphylococcus ainsi que Enterococcus faecalis, qui « est notoire dans les hôpitaux pour avoir causé des infections nosocomiales ».


« Voir des Staphylococcus sur ces machines est inquiétant parce que c'est tellement contagieux », a-t-il déclaré.


« Tout commence autour du nez des gens. Si ceux-ci se touchent le nez, puis le transfèrent sur l'écran tactile, une autre personne l'aura, et s'il a une coupure ouverte dans laquelle elle pénètre, cela peut être dangereux. »


Listeria a été retrouvé dans deux succursales londoniennes qui, selon Matewele, est « une autre bactérie rare, nous avons été choqués de la retrouver sur des écrans tactiles » et cette bactérie est contagieuse et peut causer des problèmes aux personnes dont le système immunitaire est affaibli.



« La technologie des écrans tactiles est de plus en plus utilisée dans nos vies quotidiennes, mais ces résultats montrent que les personnes ne doivent pas manger de la nourriture juste après les avoir touchées, elles ne sont pas hygiéniques et peuvent propager des maladies », a-t-il déclaré à Metro.


Dans un communiqué à Newsweek, la chaîne a déclaré que « nos écrans de commande sont nettoyés fréquemment tout au long de la journée. Tous nos restaurants offrent également aux clients la possibilité de se laver les mains avant de manger. », mais peut-être que le nettoyage n’est pas fait assez correctement, quant aux toilettes en France, il vaut mieux éviter d’y aller …


Les restaurants testés à Londres étaient situés à Oxford Circus, à Holloway Road, à Oxford Street, à Kensington High Street, à Seven Sisters Road et à Bethnal Green à Londres. À Birmingham, ils se trouvaient à Ramp and Pigeon Park.


Au Royaume-Uni, seuls 8 restaurants McDonald's sur 1 300 ont été testés. Les résultats ne représentent donc pas nécessairement toutes les succursales.
Cela étant un peu de bon sens, fort heureusement, cela existe encore, montre que tout cela n’est pas très dangereux du tout !
« Du caca retrouvé sur chaque écran de commande analyse chez McDonald’s », tel est le titre de Metro.co.uk … « C'est ce que dit le titre de ce tabloïd qui évoque des fèces tachant les écrans tactiles de chez McDonald's, vous savez, ces écrans géants que les gens touchent juste avant d’aller consommer leur cheeseburgers », selon cet autre article.
Mais la réalité est bien plus banale, ce n’est pas le pandémonium de la santé publique suggéré par ce titre.

Non, il n'y a pas de caca sur les écrans tactiles de chez McDonald's. Il existe cependant des bactéries, beaucoup d’entre elles. Ce sont les mêmes bactéries qui vivent dans l’intestin, le nez, la peau, la bouche, la gorge et, bien sûr, les selles. Certains vivent dans le sol et dans l'eau.

L'article avec un titre susmentionné énumère les bactéries dangereuses retrouvées sur les écrans tactiles de plusieurs restaurants McDonald's de la région de Londres. Il note les infections et les maladies que les gens pourraient contracter.

Ce qu'il ne mentionne pas, c'est que :
  1. L’homme, avec les milliards de cellules bactériennes que nous portons à l'intérieur et à l'extérieur de notre corps, a des bactéries qui vont et viennent partout, sur les poignées de porte, les boutons d'ascenseur, les caddies, les trains, n'importe où dans une station de métro et, bien sûr, sur les écrans tactiles de commande automatique de chez McDonald's.
  2. Il est très peu probable que ces bactéries nuisent à une personne en bonne santé.
  3. Il n'y a eu aucun rapport de santé publique sur les infections causées par des écrans tactiles sales dans ces restaurants McDonald’s ou ailleurs.
« Ce genre d'histoires est irritante », a dit David Coil, microbiologiste à l'Université de Californie à Davis.

« Il y a toujours quelque chose : un jouet pour enfant, une poignées de porte, un écran tactile. Ce sont tous les mêmes objets touchés par des personnes. Bien sûr, il y aura des bactéries associées à l'homme sur eux. Se laver les mains plus ou moins fera l’affaire. »

samedi 1 décembre 2018

La maîtrise de la sécurité des aliments, c’est toujours la même chanson ? Un exemple aux Etats-Unis

« Etats-Unis : Les épidémies à répétition poussent l'industrie à renforcer la sécurité sanitaire des aliments », source article de Candice Choi, AP, du 30 novembre 2018.

Après des épidémies d'intoxication alimentaire répétées liées à de la laitue romaine, l'industrie des produits végétaux est confrontée à l'échec de ses propres mesures de sécurité sanitaire pour prévenir les contaminations.

L'épidémie à E. coli annoncée juste avant Thanksgiving a été suivie d’une au printemps qui a rendu malade plus de 200 personnes et cinq personnes sont décédées, et une autre épidémie, l'an dernier qui en a rendu malades 25 personnes et il y a eu un décès. Aucun cas de décès n'a été signalé lors de la dernière épidémie, mais des dizaines de cas de maladies soulignent le défi à éliminer les risques que présentent les légumes cultivés en plein champ et consommés crus, le rôle des élevages de bovins à proximité produisant d'énormes quantités de fumier et le retard pris dans l’applications des règlements fédéraux plus stricts sur les denrées alimentaires.

Un aspect contesté du règlement, par exemple, consisterait à tester l'eau d'irrigation pour détecter E. coli. La FDA a suspendu la mesure lorsque le secteur des fruits et légumes a déclaré que de telles analyses ne contribueraient pas nécessairement à prévenir les épidémies. Des réglementations supplémentaires sur l'hygiène des salariés et des équipements, qui sont d’autres sources potentielles de contamination, n'ont été mises en œuvre que récemment.

Le commissaire de la FDA, Scott Gottlieb, a déclaré qu'il pensait que la combinaison de ces règles, une fois pleinement en place, rendrait les légumes plus sûrs pour la consommation.

« Je ne pense pas que l'un des éléments de ce projet soit la solution miracle », a déclaré Gottlieb.

Les responsables de la santé estiment qu'une détection améliorée peut donner l'impression que les épidémies sont plus fréquentes. Pourtant, cela intensifie la pression sur les producteurs et les services réglementaires pour prévenir, détecter et contenir la contamination.

Doug Powell du barfblog indique « Nous disons la même chose depuis plus de 20 ans. »

vendredi 30 novembre 2018

Une étude révèle que les niveaux de résistance aux antibiotiques dans la viande hachée bovine issue d'animaux élevés sans antibiotique ne sont pas plus faibles



Voici une autre étude qui rapporte des niveaux similaires de résistance aux antibiotiques dans la viande hachée bovine, avec et sans l’allégation « élevé sans antibiotique » utilisée dans la restauration commerciale aux Etats-Unis.

« Une étude révèle que les niveaux de résistance dans la viande de burger sans antibiotique ne sont pas inférieurs », source article de Chris Dall paru le 28 novembre 2018 dans CIDRAP News.

Une nouvelle étude réalisée par des chercheurs du ministère de l'agriculture des États-Unis a révélé des niveaux similaires de résistance aux antibiotiques dans la viande hachée bovine d’animaux élevés avec et sans antibiotique. Les résultats ont été publiés dans le Journal of Food Protection.


Les auteurs de l'étude affirment que les données, ainsi que les recherches antérieures qu'ils ont effectuées sur les animaux élevés de manière conventionnelle et « élevés sans antibiotique », suggèrent que l'utilisation d'antibiotiques dans la production de bétail américaine n'a « qu'un impact minime, voire nul, sur la résistance aux antibiotiques chez les bactéries résidentes ».
Cette découverte intervient à un moment où de vives inquiétudes sont souvevées quant à l'utilisation des antibiotiques chez les animaux producteurs d'aliments, qui consomment entre 70% et 80% des antibiotiques importants sur le plan médical vendus dans le monde, et les effets de cette utilisation sur la santé humaine.

L’Organisation mondiale de la santé et d’autres groupes de santé publique ont appelé à des limites quant à leur utilisation chez les animaux d’élevage et la volaille, affirmant que l’utilisation généralisée de ces médicaments comme promoteur de croissance et la prévention des maladies chez des animaux en bonne santé contribuait à l’émergence d’agents pathogènes transmis à l'homme par la viande.

Cette inquiétude a entraîné une demande croissante des consommateurs pour de la viande sans avoir recours à des antibiotiques médicalement importants. L’impact le plus important a été observé dans l’industrie de la volaille, plusieurs grandes chaînes de restaurants et des producteurs de volailles se sont engagés à enlever les antibiotiques d’importance médicale de la chaîne de production. Les défenseurs de la viande sans antibiotique poussent maintenant l’industrie du bœuf et du porc à opérer des changements similaires.

Mais, les auteurs de l’étude affirment qu’il existe peu de recherches examinées par des pairs à l’appui des allégations selon lesquelles les produits de viande issus d’animaux « élevés sans antibiotique » contiennent moins de bactéries résistantes aux antibiotiques, et la plupart d’entre elles concernent la volaille. Ils disent que leurs conclusions suggèrent que ces allégations pourraient ne pas être justifiées pour la viande hachée bovine.

« Nous avons constaté que les viandes conventionnelles et les viandes issues d’animaux « élevés sans antibiotique » présentaient des niveaux similaires de résistance aux antibiotiques », a déclaré au CIDRAP News, l'auteur principal, John Schmidt, microbiologiste à l’Agricultural Research Service de l'USDA. « Donc, vous ne pouvez pas soutenir avec des données la notion qu'il y a plus de résistance aux antibiotiques dans le viande hachée bovine conventionnelle … du moins aux États-Unis. »

Résistance dans la viande des deux systèmes de production

Pour comparer les niveaux de résistance aux antibiotiques dans la viande hachée bovine issue d’animaux élevés de façon conventionnelle et élevés sans antibiotique, Schmidt et ses collègues ont recueilli des échantillons de viande hachée bovine sur une période de 13 mois auprès de trois sociétés de restauration commerciale ayant reçu de la viande conventionnelle et de la viande issus d’animaux élevés sans antibiotique provenant de plusieurs abattoirs. Sur les 370 échantillons recueillis, 191 provenaient de bovins élevés de façon conventionnelle et 179 portaient un étiquetage : viande issue d’animaux élevés sans antibiotique.

Pour déterminer les niveaux de résistance aux antibiotiques, les chercheurs ont cultivé plusieurs types de bactéries à partir des échantillons, en se concentrant principalement sur les principales bactéries d’origine alimentaire (Escherichia coli, Salmonella enterica et Enterococcus spp.) qui sont courantes dans la viande et dans lesquelles la résistance aux antibiotiques pourrait avoir un impact sur la santé humaine. Ils ont également cultivé Staphylococcus aureus, car il est à craindre que l'utilisation d'antibiotiques chez les bovins puisse contribuer à la propagation de S. aureus résistant à la méthicilline (SARM). En outre, l'équipe a isolé l'ADN de toutes ces bactéries qui correspond au métagénome de chaque échantillon et évalué l'abondance de gènes de résistance aux antibiotiques en utilisant une PCR quantitative.

Dans l'ensemble, les résultats ont montré que les niveaux de bactéries résistantes aux antibiotiques dans tous les échantillons de viande hachée bovine ne constituaient qu'une petite partie de la flore bactérienne globale. Les micro-organismes résistants aux antibiotiques les plus remarquables étaient E. coli résistant à la tetracycline, qui était plus fréquemment détecté parmi les échantillons conventionnels que dans les échantillons de viandes issues d’animaux élevés sans antibiotique (54,2% contre 35,2%, p < 0,01), et les entérocoques résistants à la tétracycline, qui ont été retrouvés dans 94,8% des échantillons conventionnels et 91,1% des échantillons de viandes issues d’animaux élevés sans antibiotique. Dans les deux cas, la détection des bactéries résistantes était très différente selon les fournisseurs.

Salmonella résistant à la tétracycline, E. coli résistants aux céphalosporines de troisième génération, des entérocoques résistants à l'érythromycine et des SARM ont été décelés en plus petites quantités parmi les échantillons de viande bovine hachée issue d’animaux élevés de façon conventionnelle et d’animaux élevés sans antibiotique, les chercheurs ont conclu que le fournisseur avait un impact plus important que le système de production.

Lorsque les chercheurs ont évalué l'abondance des gènes de la résistance aux antibiotiques, ils ont constaté que deux des gènes de résistance à la tétracycline les plus courants, tetA et tetB, étaient significativement plus abondants dans la viande bovine hachée issue d’animaux élevés sans antibiotique.

« J'appelle ça, globalement, un match nul », a déclaré Schmidt. « En fin de compte, nous avons trouvé des niveaux de résistance similaires dans la viande provenant des deux systèmes de production. »

Alors, comment des bactéries résistantes aux antibiotiques et les gènes de résistances aux antibiotiques se sont-ils retrouvés dans de la viande hachée bovine issue d’animaux élevés sans antibiotique ?

Schmidt a dit que bien qu'il soit impossible d'identifier la source exacte, il n'est pas étonnant qu'ils en aient trouvées dans de la viande hachée bovine n'ayant pas été exposé aux antibiotiques.

« Vous n'avez pas besoin d'antibiotiques pour contracter une résistance aux antibiotiques » a expliqué Schmidt, citant une étude publiée en 2011 dans Nature dans laquelle on avait découvert des gènes de résistance aux antibiotiques dans le permafrost congelé depuis plus de 30 000 ans. « Dans tout environnement où il y a des bactéries, il y aura de la résistance, et comme la viande hachée bovine issue d’animaux élevés sans antibiotique, comme toute viande, n'est pas stérile, il y aura donc des bactéries et il y aura de la résistance. »

Il est également possible que les bactéries résistantes aux antibiotiques et les gènes de résistance présents dans les échantillons de viande hachée bovine issue d’animaux élevés sans antibiotique aient été acquis au cours de la transformation. L'analyse phylogénétique a montré que les microbiomes de la viande hachée bovine issues d’animaux élevés sans antibiotique et d’animaux élevés de façon conventionnelle chez un fournisseur étaient similaires, mais variaient d'un fournisseur à l'autre. « Cela signifie que quelque chose chez ce fournisseur contribue à la flore finale que vous voyez », a déclaré Schmidt, bien qu'il ait souligné qu'aucune conclusion sur l'hygiène ne pouvait être tirée de l'étude.

Aucune conclusion ne peut non plus être tirée sur les conséquences pour la santé humaine à propos des bactéries résistantes aux antibiotiques et des gènes de résistance aux antibiotiques qu'ils ont trouvés. « L'impact réel sur la santé humaine ... n'est pas clair », a déclaré Schmidt. « Il y a tellement d'étapes entre la résistance que nous avons trouvée jusqu’à l'échec hypothétique du traitement que nous avons constaté. »

Schmidt a également ajouté que les résultats ne devraient pas être interprétés comme une autorisation d'utiliser des antibiotiques chez des animaux producteurs d'aliments sans réglementation.

Définir le 'sans antibiotique'

Gail Hansen, consultante en santé publique et en médecine vétérinaire qui n'a pas participé à la recherche, a déclaré que les résultats témoignaient de l'efficacité avec laquelle l'industrie du bœuf avait réagi à l'épidémie de E. coli O157:H7 en 1993, liée à des galettes de bœuf contaminées chez Jack in the Box, une épidémie qui a rendu malade plus de 700 personnes et entraîné la mort de quatre enfants.

« L'industrie a réagi en modifiant certaines de ses pratiques. Parmi celles-ci, il y a des procédures et des processus sanitaires visant à minimiser la contamination microbienne de la viande hachée bovine », a déclaré Hansen à CIDRAP News. « Ce que l'étude a montré, c'est que lorsque vous agissez de la sorte, vous réduisez les bactéries présentes dans la viande hachée bovine, à la fois les bactéries résistantes aux antibiotiques et les bactéries sensibles aux antibiotiques. »

Mais cela montre aussi que l’étiquetage ‘sans antibiotiques’ sur la viande hachée bovine et les autres produits de viande doivent être prises avec beaucoup de précaution. « Tous les animaux ‘élevés sans antibiotiques’ ne sont pas gardés dans des endroits qui ont toujours été exempts d'antibiotiques et, comme les bactéries résistantes aux antibiotiques et les gènes de résistance ne sont pas statiques, ils peuvent entrer dans l'approvisionnement alimentaire », a dit Hansen. « Ce n’est pas parce que les animaux sont élevés sans antibiotiques qu’ils seront complètement exempt de bactéries et que ce ne sera pas non plus des bactéries résistantes aux antibiotiques. »

Hansen note également que l'étude examine uniquement une voie par laquelle l'utilisation d'antibiotiques dans le bétail et la volaille peut affecter la santé humaine. « Les gènes de résistance aux antibiotiques peuvent pénétrer le fumier, le sol, l'eau, l'air », a-t-elle dit. « Je pense que nous devons regarder au-delà de ce qui se passe de la viande à notre bouche ; nous devons examiner la résistance aux antibiotiques dans un contexte beaucoup plus large, One Health (Une seule santé). »