lundi 3 décembre 2018

Les produits alimentaires fabriqués en France sont en tête des notifications au réseau d’alerte européen RASFF, faut-il se réjouir de cette bonne nouvelle ?


En sécurité des aliments en France, il faut bien l’admettre, les résultats en termes d’inspections en sécurité des aliments ne sont pas au rendez-vous puisqu’ils sont en baisse depuis 5 ans, les exemples sont connus et identifiés, notamment par le Rapport de la Commission d’enquête chargée de tirer les enseignements de l’affaire Lactalis et d’étudier à cet effet les dysfonctionnements des systèmes de contrôle et d’information, de la production à la distribution, et l’effectivité des décisions publiques, et l’on ne voit pas l’once d’un début d’autocritique (voir à ce sujet ce qui se passe au Royaume-Uni), et il me semble que changer de paradigme en matière de sécurité des aliments serait tout à fait approprié !

Alors à la fièvre ambiante que vit en ce moment la France, j’ajoute modestement ma contribution … pour une meilleure sécurité des aliments !

Un constat est simple et sans appel est le suivant : la France avec ses produits d’origine nationale est devenu le premier pays de l’UE en termes de notification au réseau d’alerte européen RASFF … en 2018 !
  1. France, 203
  2. Pologne, 165
  3. Espagne, 159
  4. Pays-Bas, 148
  5. Allemagne, 141
  6. Italie, 138
  7. Royaume-Uni, 92
Pas de quoi être fier, il ne s’agit d’agri ou de France bashing, mais plutôt le résultat d’une certaine politique de sécurité des aliments voulue depuis de nombreuses années … et qui rencontre ses limites : trop de règles, environnement économique, pression de la distribution, maîtrise sanitaire insuffisante, etc.

80 notifications seulement sur 203 ont été déclarées par la France, soit 39,4%.

Ci-dessous la liste des notifications depuis 2012 jusqu’à 2018, mais l’année n’est pas encore finie :

- 2018 : 203
- 2017 : 133
- 2016 : 119
- 2015 : 121
- 2014 : 110
- 2013 : 129
- 2012 : 111

Bien entendu il y a des pays qui sont des candidats hors concours, souvent habitués au podium comme la Chine et la Turquie, avec respectivement 289 et 287 notifications. Suivent plus loin, les Etats-Unis, l’Inde, et le Brésil, avec respectivement 183, 150 et 98 notifications.

En prenant en compte les plus gros contributeurs, la France se retrouve donc à la troisième place de l‘ensemble des pays commercialisant avec l’UE et identifiés par le réseau d’alerte européen RASFF. Bien triste constat …

Parmi les causes des notifications, sans surprise arrivent largement en tête les micro-organismes pathogènes ou dangereux.

- Micro-organismes pathogènes : 131, soit plus de 68,5% du nombre de notifications, dont norovirus (38), Salmonella (29), Listeria (20), Campylobacter (18), E. coli producteurs de shigatoxines (17) ,Escherichia coli (8), Cronobacter (2), Intoxication alimentaire (4)
- Corps étrangers : 21
- Infestation parasitaire : 9
- Métaux lourds : 7
- Biocontaminants : 6, dont 3 pour cause d’histamine
- Allergènes : 5
- Micro-organismes non pathogènes : 4
- Additifs alimentaires : 3
- Résidus de pesticides : 3
- Composition : 3
- Biotoxines marines : 2
- Mycotoxines : 2
- Défaut d’emballage : 2
- Contrôle du procédé insuffisant : 2
- Contaminants industriels : 2


Parmi les produits concernés :

- Mollusques bivalves : 53 dont huîtres 41, moules 7, clams 4 et amandes de mer 1
- Lait et produits laitiers : 34
- Volaille et les produits de volaille : 29
- Poissons et produits de la mer : 19
- Viande et les produits de viande (hors volaille) : 11
- Céréales et produits de boulangerie : 9
- Fruits et végétaux : 9
- Plats préparés et snacking : 8
- Produits transformés : 5
- Confiserie : 3
- Cacao, cafés et thés : 2
- Matériaux au contact des aliments : 2


Cela étant, il y a aussi le volume des exportations. En toute logique, plus un pays exporte, comme c’est le cas de la France, plus les alertes seront nombreuses … cela étant il a des limites ...

Ce constat va de pair avec ce que témoignent les rapports d’activité de la DGCCRF concernant les alertes des produits alimentaires et qui soulignent l’importance de la parts des produits d’origine nationale dans ces alertes :


2017
- 575 alertes
- 405 alertes ayant une origine nationale dont 10 % ont concerné d’autres États membres de l’Union européenne.
2016
- 543 alertes
- 369 alertes ayant une origine nationale dont 9 % ont concerné d’autres États membres de l’Union européenne.
2015
- 536 alertes
- 394 ayant une origine nationale dont 5 % ont concerné d’autres États membres de l’Union européenne
2014
- 389 alertes dont 276 ayant une origine nationale
- 50 notifications sur le réseau d’alertes européen RASFF
2013
- 264 alertes nationales dont 145 ont fait l’objet d’une notification sur le réseau d’alertes européen RASFF


Je ne sais pas comment sont obtenus les chiffres de la DGCCRF. Mais, on voit bien ce qui se passe depuis des années, avec une lente mais constante augmentation depuis 2015, les alertes étant dues très majoritairement aux produits alimentaires d’origine nationale.

Même constat avec ce qui se passe sur le territoire national au niveau des avis de rappel des produits alimentaires avec 303 avis de rappel, selon le site Oulah!, au 1er décembre 2018 versus 192 pour toute l’année 2017 !


Les résultats indiquent que la morbi-mortalité attribuable aux maladies infectieuses d’origine alimentaire reste élevée en France, avec 1,28 à 2,23 millions de cas annuels, dont 15 800 à 21 200 hospitalisations et entre 232 et 358 décès. En France, les infections à norovirus, Campylobacter spp. et Salmonella spp. représentent la majorité des cas et des hospitalisations d’origine alimentaire. Les infections à Salmonella spp. et Listeria monocytogenes représentent la moitié des décès d’origine alimentaire.

Ces éléments sont bien loin des données annuelles, rituelles et relativement ‘rassurantes’ des toxi-infections alimentaires collectives, dont « on estime ainsi que moins d’une TIAC sur cinq, voire sur dix, serait effectivement déclarée. »

Bien entendu, ces notifications au RASFF de l’UE et les alertes liés aux avis de rappel en France sont une bonne chose, on détecte et surtout les professionnels font le job, mais derrière ce constat se cache l’absence de la transparence en matière de communication et d’information …, ce qui suscite bien des questions de confiance, mais aussi des cas sporadiques d’intoxications alimentaires, ce qui me fait dire que les maladies infectieuses d’origine alimentaire en France constituent un fardeau élevé.

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