jeudi 9 mai 2019

La perception par des consommateurs des risques liés à la sécurité sanitaire des aliments en Ecosse



La perception des risques en sécurité des aliments en Ecosse ou « Consumer forums: Perceptions of food safety risks » est un document paru le 16 avril 2019 sur le site de Food Standards Scotland.

Résumé.
La Food Standards Scotland (FSS) a l'obligation de veiller à aider les consommateurs écossais à comprendre les risques d'origine alimentaire et à les maîtriser. Toutefois, pour que la FSS puisse remplir cette fonction, il est nécessaire de comprendre et de mesurer le niveau de connaissance, d’intérêt et de sensibilisation des consommateurs aux risques.



Ce projet avait pour objectif de mener une analyse qualitative afin de déterminer les connaissances, la perception du risque et le niveau de préoccupation suscité par des problèmes liés à la sécurité sanitaire des aliments (tels que les produits laitiers non pasteurisés et les hamburgers saignants). Cela aide la FSS à déterminer si les risques connus et les points de vue des consommateurs sur les risques liés aux aliments sont identiques ou diffèrent.


Les résultats du sondage de suivi, Food in Scotland, auprès des consommateurs indiquent qu'environ les trois quarts des consommateurs sont préoccupés par l'intoxication alimentaire.


Cependant, une proportion significative d'entre eux rapporte ne pas suivre de bonnes pratiques d'hygiène (moyenne sur 11/20).
Comme la FSS ont pour rôle de veiller à ce que les consommateurs reçoivent des conseils et des directives pour éclairer les choix alimentaires et adopter de bonnes pratiques d'hygiène alimentaire à la maison, ces travaux les aideront à déterminer les domaines dans lesquels des travaux supplémentaires doivent être entrepris, éventuellement par l'élaboration de nouvelles directives ou l'amélioration du conseils existants. 
L’étude complète est ici. C’est à lire pour les réponses des personnes interrogées …

Voici  ci-dessous des extraits d’un article de Food Safety News sur ce sujet.

Selon un sondage réalisé par la Food Standards Scotland (FSS), le public a peu d’inquiétudes sur le poulet et les fromages non pasteurisés.

Risques liés à la sécurité des aliments et les participants
L’étude menée par Kantar TNS comprenait 18 entretiens en novembre 2017 avec des personnes âgées de moins de 30 ans sans enfants, de 25 à 50 ans ayant des enfants à la maison et de plus de 50 ans sans enfants à la maison.

Chaque personne a documenté ses comportements en matière de sécurité des aliments dans un journal une semaine avant le début de l’étude. Les participants ont été invités à assister à une séance de groupe pour discuter de l’étude.

Quatre risques en matière de sécurité des aliments leur ont été posés: la viande ou burger insuffisamment cuit, le poulet insuffisamment cuit, le fromage non pasteurisé et les contaminants chimiques.

«  Les risques liés au poulet et aux fromages non pasteurisés peuvent être graves, mais ils sont perçus comme peu préoccupants, car les gens se considèrent eux-mêmes comme maîtrisant le poulet insuffisamment cuit ou ne se sentent pas concernés par les fromages non pasteurisés », selon le rapport du sondage.

Le poulet insuffisamment cuit était l’une des préoccupations majeures des consommateurs concernant les comportements ayant un risque alimentaire et les comportements liés à la sécurité des aliments. La plupart des poulets étaient considérés comme présentant peu de risque ou d’inquiétude car ils sentaient qu’ils maîtrisaient le sujet. Il est apparu que les consommateurs adoptaient plusieurs comportements pour atténuer les risques et étaient conscients de la nécessité de le faire.

Bien que l’on comprenne bien comment manipuler le poulet de façon sûre, il y avait une compréhension limitée de pourquoi cela devait être fait. Par exemple, il y avait très peu de personnes conscientes de Campylobacter dans l'échantillon, la plupart associaient le poulet à une intoxication par Salmonella et E. coli.

Une minorité était encore en train de laver le poulet à cause de leurs habitudes et de leurs convictions, parce que c'était un comportement appris d'un parent ou qu'ils n'étaient pas tombés malades alors ils pensaient qu'ils suivaient une méthode sûre. L’hygiène alimentaire de base semble être enracinée pour la plupart mais ne nécessite pas beaucoup de considérations.

Les comportements liés à la sécurité des aliments consistaient à utiliser différentes planches à découper pour la viande par rapport aux légumes et aux fruits, à nettoyer ces planches après avoir préparé de la viande, au nettoyage des ustensiles lors de la préparation des aliments ou à l'utilisation de couteaux spécifiques pour la préparation de la viande crue.

Les participants semblaient associer la viande de poulet crue à un risque de ne pas se sentir bien et ce comportement dominait dans la réduction des risques. Certains consommateurs se sont fiés à l'apparence et à la sensation. Ils ont suivi les instructions de cuisson pour vérifier si les aliments étaient cuits, mais aucun d'entre eux n'a utilisé de thermomètre à viande à la maison.

Les attitudes vis-à-vis du risque alimentaire ont été apprises dans le cercle  familial ou parental pendant plusieurs années. L'expérience a également été acquise par essais et erreurs, de sorte que la compétence vis-à-vis de la cuisson augmente l'exposition vers un risque qui diminue.

Le fromage au lait non pasteurisé et le risque de hamburger rosé à l’intérieur
Les répondants au sondage ne souhaitaient pas particulièrement consommer de fromages non pasteurisés à l'avenir, mais ils avaient également le sentiment que d'autres consommateurs pourraient et devraient être autorisés à le manger s'ils le souhaitaient. En raison de la méconnaissance du produit, les consommateurs ont du mal à percevoir le moindre risque pour eux-mêmes.

Étiqueter le fromage au lait non pasteurisé en tant que produit « au lait cru » était considéré comme source de confusion car cela ajoutait une autre description. Cependant, le terme « cru » étant un langage décourageant et peu attrayant associé à un risque alimentaire potentiel, la plupart d'entre eux étaient encore moins à même d'en essayer.

Il y avait une certaine conscience de la tendance à servir des hamburgers avec une couleur rose à l’intérieur, mais les expériences ont varié. Les risques de manger des hamburgers pas assez cuits n'étaient pas bien connus et il y avait un risque de confusion avec le steak saignant.

Ceux qui mangeaient des hamburgers avec une couleur rose à l’intérieur, pas assez cuits, avaient tendance à être des clients plus jeunes et ils le faisaient pour un goût meilleur, une préférence pour les steaks rosés, donc choisir le même pour les hamburgers et c’est ainsi que les hamburgers sont servis dans les « bons » restaurants. D'autres, qui avaient tendance à être des personnes plus âgées, ne mangeraient jamais un hamburger avec une couleur rose à l’intérieur en disant qu'ils savaient que la viande hachée ne devrait jamais être rosée, ou n'aimaient pas la viande rose en général.

Des informations ont été fournies aux participants sur les risques de consommer des hamburgers saignants. Ceux qui mangeaient des hamburgers roses à l’intérieur ont affirmé qu’ils seraient moins susceptibles à l’avenir d’en consommer car ils étaient inquiets du risque. Le groupe de personnes sondées n’a pas compris le message ‘Il est possible de produire des hamburgers roses en toute sécurité’ et cela a entrainé une certaine confusion parmi eux.

La contamination chimique a eu une grande importance. Cependant, les consommateurs n’avaient aucune idée de ce qu’ils pourraient faire pour prendre en compte ou atténuer ce problème, car la connaissance ou la compréhension du risque était insuffisante. Les principales associations avec des contaminants chimiques étaient les pesticides, les emballages et la viande brûlée. C’était davantage perçu comme un domaine d’experts que des consommateurs.

Sécurité des aliments et fromages au lait cru en France

Voici une liste qui comprend les fromages au lait cru qui ont fait l’objet d’un retrait/rappel en France depuis le début de l’année 2019 :
  • Escherichia coli O26
3 mai 2019 : rappel de fromages de chèvre Sainte Maure de Touraine AOP au lait cru
2 mai 2019 : rappel et extension de rappel de Saint-Félicien ou des Saint-Marcellin ainsi que d’autres fromages produits et commercialisés par La Fromagerie Alpine en liaison suspectée avec des cas de SHU
27 avril 2019 : rappel de Saint-Félicien et de Saint-Marcellin de La Fromagerie Alpine en liaison suspectée avec des cas de SHU
10 avril 2019 : retrait de la vente des fromages fermiers de chèvre AOP au lait cru Pouligny Saint-Pierre commercialisés sous la marque P. Jacquin et Fils
26 mars 2017 : rappel d’un lot suspect de fromages Crottin de Chavignol par la société LHT
  • Escherichia coli O157:H7
21 avril 2019 : rappel de fromages fermiers de chèvre au lait cru de EARL Le Moulin de la Fosse
11 mars 2019 : rappel de Camembert Normandie AOP 250G de marque MOULIN de CAREL
8 mars 2019 : rappel de Camembert Normandie AOP 250G de marque JORT
1er mars 2019 : rappel de fromages fermiers de chèvre AOP au lait cru Valençay et Petit Valençay commercialisés sous la marque Hardy Affineur
  • Salmonella
27 février 2019 : rappel de fromages Reblochon de Savoie AOP fruitier 450g de marque Pochat & Fils 
  • Listeria monocytogenes
10 avril 2019 : rappel massif de plusieurs fromages de la société fromagère de la Brie en liaison avce des cas de listériose

Il y a eu donc 11 rappels en France, mais si l’on se réfère au RASFF de l’UE au 8 mai 2019, il y a eu 19 notifications concernant des fromages au lait cru de France. 

Tous les fromages qui font l’objet d’une notification au RASFF de l’UE ne font pas l’objet d’un rappel en France pour différentes raisons ou plusieurs Etats membres de l’UE peuvent notifier  le même fromage…

Ces 19 notifications, dont 9 réalisées par la France, ont concerné des STEC pour 9 notifications, dont STEC O2 (1), STEC O157:H7 (1), STEC O26  (4), STEC sans autre information (2), STEC O136 (1), 8 ont concerné Listeria monocytogenes, 1 notification a concerné la présence de Salmonella et une notification a eu pour objet la présence de corps étranger métallique.

Parmi les 19 notifications, deux sont très récentes, 7 et 8 mai 2019, et concernent les fromages Chaource  (STEC) et Crottin de Chavignol (Listeria monocytogenes).

A noter un rappel le 8 mai 2019 de Chaource par les autorités sanitaires du Luxembourg pour cause de STEC et le 9 mai par l'AFSCA de Belgique et le 10 mai par les autorités d'Allemagne. Voir en fin d'article le complément du 11 mai 2019.

Un communiqué du ministère de l’agriculture du 30 avril 2019  informe à propos de la « Consommation de fromages à base de lait cru : rappel des précautions à prendre ». J’ai indiqué ici ce qu’il fallait penser de cette communication.

Cela étant, cette communication est reprise par les préfectures et en voici un exemple significatif, ci-dessous, émanant de la préfecture du Pas-de-Calais avec ce communiqué du 2 mai 2019 sur la prévention de la consommation de fromages au lait cru pour les enfants de moins de 5 ans :
Cliquez sur l'image pour l'agrandir
Vous aurez noté que Listeria monocytogenes est absent des germes pathogènes cités …

A noter que pour les 11 cas d'enfants atteints de SHU en mai 2018, il s'agirait d'enfants ayant consommé des reblochons contaminés par E. coli O26, dont l'un est décédé.

Voici que le nouveau directeur général de l’alimentation a signé une nouvelle note de service (DGAL/SDSSA/2019-365) sur la Prévention de la consommation de fromages au lait cru par les enfants de moins de 5 ans.
a) Lait cru et fromages au lait cru
Des épidémies d’infections à EHEC en lien avec la consommation de fromages au lait cru ont été rapportées en France à plusieurs reprises, notamment en mai 2018 (11 enfants atteints de SHU dont l'un est décédé) et en avril 2019 (13 enfants atteints de SHU, dont plusieurs ont développé des complications neurologiques – bilan provisoire au 30/04/2019).
Les ministères de la santé et de l'agriculture ont convenu d'un message de prévention qui est le suivant :
  • le lait cru et les fromages au lait cru présentent un sur-risque important d'infection bactérienne chez l'enfant, surtout pour les moins de 5 ans ; ce sur-risque diminue avec l'âge jusqu'à 15 ans où il rejoint la normale, d'après les études ;
  • les enfants de moins de 5 ans ne doivent en aucun cas consommer ces produits, les cas observés ces dernières années confirment la sensibilité des enfants de cette tranche d'âge, chez lesquels les symptômes peuvent être dramatiques ;
  • ces préconisations sont également valables pour les autres populations à risque : femmes enceintes ou personnes immunodéprimées ;
  • les qualités nutritionnelles de ce type de produits, récemment soulignées par l'INRA, ne doivent en aucun cas occulter le risque sanitaire. 
Les fromages au lait cru à pâte pressée cuite tels que le Gruyère, le Comté, l'Emmental ou le Beaufort, dont le processus de production comporte un traitement thermique, ne sont pas concernés par ces recommandations.
b) Steaks hachés
La note d'information interministérielle (DGS + DGAL) annexée à l'IT DGAL/SDSSA/O2007-8001 du 13 février 2007 reste toujours d'actualité : face au risque de syndrome hémolytique et urémique, « il faut impérativement, pour les consommateurs sensibles, cuire à cœur les steaks hachés c'est-à-dire à 65°C ». 
Rappelons (une fois de plus) ce que l’Anses rapporte dans la fiche sur l’Hygiène domestique de février 2013, à propos de la cuisson des aliments et en particulier les steaks hachés,
La cuisson des aliments permet une forte réduction de la charge microbienne si la température à cœur des aliments est élevée.
 La cuisson « saignant » d’un steak haché n’est pas suffisante pour assurer une protection en cas de contamination par un pathogène. Il est fortement déconseillé aux enfants de moins de 5 ans et aux personnes immunodéprimées de consommer le steak haché non cuit à cœur (L’atteinte d’une température de 70°C à cœur, mesurée à l’aide d’un thermomètre, est usuellement recommandée aux professionnels de la restauration collective. Un savoir-faire est nécessaire pour réaliser correctement une telle prise de température.) Les femmes enceintes et les personnes immunodéprimées doivent bien cuire tout type de viande.
Ou encore ici avec cette information de l'Anses:

Les STEC sont par ailleurs sensibles à la température. La cuisson est donc susceptible de détruire partiellement ou totalement les STEC contenus dans un aliment. Différentes instances de sécurité sanitaire recommandent de maintenir une température à cœur de 70°C pendant 2 minutes pour la cuisson pour les steaks et steaks hachés de bœuf. Il est donc recommandé d'assurer une cuisson à cœur des steaks hachés, notamment ceux destinés aux jeunes enfants.
A suivre …

Complément du 11 mai 2019A noter, un rappel le 8 mai 2019 de Chaource par les autorités sanitaires du Luxembourg pour cause de STEC et le 9 mai par l'AFSCA de Belgique et le 10 mai en Allemagne. La Suisse a rapporté qu'il s'agit de E. coli O116:H28 dans une notification au RASFF de l'UE.

Quatre épidémies et rappels concernant E. coli O26 et les fromages au lait cru en France ont été rapportés sur ProMed, 29 avril 201921 décembre 2018,1er juin 2018 et 11 mai 2018.

Mise à jour du 2 juillet 2019. Victoire des experts de l'Anses sur la com de l'Anses, il n'est plus écrit sur le lien mentionné ci-dessus
Différentes instances de sécurité sanitaire recommandent de maintenir une température à cœur de 70°C pendant 2 minutes pour la cuisson pour les steaks et steaks hachés de bœuf. Il est donc recommandé d'assurer une cuisson à cœur des steaks hachés, notamment ceux destinés aux jeunes enfants.
Mais,

... un mode de cuisson des steaks hachés plus adapté aux jeunes enfants permettrait une réduction significative du risque (cuisson à cœur à une température de 70°C).