Une note de service de la DGAL (DGAL/SDSSA/2018-952
du 24-12-2018) nous informe sur la «Gestion du risque norovirus en
lien avec la consommation de coquillages.»
Cette instruction technique présente les modalités de
gestion du risque lié à la consommation de coquillages contaminés par
norovirus. Cette gestion comprend d'une part des mesures de prévention en zone
de production de coquillages et d'autre part des actions spécifiques en cas de
toxi-infection alimentaire collective (TIAC) en lien avec les norovirus.
Cette instruction technique apporte des modifications sur :
- la mise en œuvre des analyses dans le cadre des TIAC ;
- la mise en place d'un appui à des projets de recherche.
Les norovirus sont une cause majeure de toxi-infections
alimentaires collectives (TIAC) en France, provoquant des gastro-entérites. Les
aliments les plus fréquemment incriminés sont soit des végétaux, contaminés par
l'eau (par irrigation ou aspersion), soit des coquillages qui concentrent les
particules virales présentes dans leur milieu de vie. En effet, les malades
infectés par une souche de norovirus excrètent pendant et après la période
symptomatique un grand nombre de virus, ce qui peut conduire à la pollution des
zones de production, pêche ou élevage.
Néanmoins, en raison de l'importance que peuvent prendre les
gastro-entérites virales, notamment liées à la consommation de coquillages, la
DGAL juge que le risque lié à la présence de norovirus doit être pris en compte,
à la fois en termes de prévention, pour éviter de possibles contaminations de
zones de production de coquillages, et en termes de gestion lors de la survenue
de TIAC.
Merci beaucoup ... pour la prise en compte du risque lié à
norovirus …
Et pour cause, rappelons qu’il y a eu 37 notifications au RASFF de l’UE en 2018 pour
la présence de norovirus dans les coquillages de France, et combien d’épidémies
à norovirus ou de TIAC ? Nous ne le saurons pas … le RASFF parle 11 épidémies d'origine alimentaire ...
Au niveau des avis de rappels de coquillages, selon le site Oulah!, il y a eu
11 rappels d’huîtres et de moules pour cause de présence de norovirus.
Cela étant, c’est bien de faire une note de service de la
DGAL sur la « Gestion du risque
norovirus en lien avec la consommation de coquillages » mais c’est
encore mieux d’informer les consommateurs sur les avis de rappel.
Le ministère de l’agriculture n’a signalé aucun de ces
rappels au cours de l’année 2018 et maintenant la DGAL nous informe en ces
termes « Néanmoins, en raison de
l'importance que peuvent prendre les gastro-entérites virales, etc. ».
On se moque du monde !
De plus, la note de service persiste dans l’erreur avec sa
propre logique administrative,
la mise en œuvre du retrait et du rappel des produits relève
de la responsabilité des opérateurs concernés selon les modalités définies dans
le guide
d'aide à la gestion des alertes d'origine alimentaire (version du 2 juillet
2009 et conformément au règlement
(CE) n°178/2002). Le retrait/rappel est particulièrement important pour la
protection des consommateurs vis-à-vis d’un danger lié aux denrées sur le
marché.
Rappelons que selon une
étude
de l’InVS paru en janvier 2018 sur l’« Estimation de la morbidité et de la mortalité liées aux infections
d’origine alimentaire en France métropolitaine, 2008-2013 »,
Les norovirus apparaissent responsables du plus grand nombre
de cas (517 593 cas, soit 34% du nombre total de cas d’origine alimentaire) ;
ils sont au 3e rang
en nombre d’hospitalisations (3 447 hospitalisations, 20% du nombre total
d’hospitalisations pour infection d’origine alimentaire) et au 7e en nombre de décès (8 cas
décédés, 3% du nombre total de cas décédés d’origine alimentaire).
La note de service de la DGAL nous rappelle ce que sont les
TIAC à norovirus
Les coquillages contaminés par des norovirus peuvent être à
l'origine de TIAC. Pour être prises en compte comme un élément fiable de
caractérisation du risque, il doit s'agir de TIAC dûment déclarées, validées par
l’ARS et/ou l’agence nationale de la santé publique, dont les investigations
épidémiologiques indiquent un lien possible avec la consommation de
coquillages.
En plus des conclusions des enquêtes alimentaires qui
permettent d'établir un lien entre consommation de coquillages et survenue de
GEA chez les consommateurs, il est nécessaire d'obtenir des résultats d'analyse
virologique sur les coprologies réalisées chez les malades et sur des
prélèvements faits sur les produits suspectés (voire sur la zone d'origine) si
l’on veut établir un lien épidémiologique certain entre les TIAC et la
contamination des produits (voire du milieu). Cela permet de comparer les
séquences virales (au moins au niveau du génogroupe) entre coquillages
suspectés et consommateurs malades.
En l’absence d’analyse virologique systématique sur les
coprocultures, l’existence d’une TIAC due à la consommation de coquillages et
la présence de norovirus dans les coquillages consommés et issus de la zone
établissent un lien probable entre coquillages suspectés et consommateurs
malades mais non certain. Le lien épidémiologique est considéré ici comme avéré
lorsqu'un faisceau de preuves converge vers une même hypothèse. Il résulte de
l’association des différents éléments épidémiologiques (symptômes, incubation,
analyses) et alimentaires (enquête traçabilité sur les aliments suspectés)
disponibles.
Bien entendu le rédacteur de cette note de service doit bien
savoir que les TIAC sont sous estimées en France comme ailleurs … car les données des toxi-infections alimentaires collectives ont longtemps étét l’alpha et l’oméga en
France des maladies infectieuses d'origine jusqu'à la publication précité de l'étude l'InVS en janvier 2018.
Selon cette publication
de 2003, la déclaration des TIAC représenterait la partie émergée de
l’iceberg :
C’est un fait, les toxi-infections alimentaires collectives
(TIAC) souffrent d’une importante sous-déclaration, en France comme dans
d’autres pays : on estime ainsi que moins d’une TIAC sur cinq, voire sur dix,
serait effectivement déclarée.
L’Anses,
en 2018, indique « Il convient donc de
ne pas considérer les chiffres de déclaration infra comme une approche fiable
de l’incidence des TIAC et de nuancer les éléments chiffrés à la lueur de cette
sous-déclaration, … »
Il est temps de changer de logiciel de pensée …
Maintenant voyons ce cas de figure fourni par un ami,
Imaginez Madame P. infectée par des coquillages contaminés
par norovirus. Elle contamine tous les membres de sa famille en les touchant, car
ne lavant pas les mains en faisant mal la vaisselle, etc. Si Madame P. a bien
été victime d'une infection par voie alimentaire, ce n'est pas le cas des
membres de sa famille, ils ont été infectés par Mme P., pas par l'aliment
causal.
A mes yeux, cela ne correspond donc pas à la définition d'une TIAC
(contractée à la suite de l'ingestion d'un même aliment). Mais c'est quand même
une épidémie d’origine alimentaire ! C'est pourquoi je combats l'utilisation de
ce fichu franco-français concept de TIAC, mais sans succès ...
Enfin, notons qu'à ce jour, nous n'avons toujours pas les données relatives aux toxi-infections alimentaires collectives déclarées en France en 2017 !
Complément du 12 janvier 2019. En
2018, pour les coquillages d'origine France, il y a eu 52
notifications au RASFF de l'UE, dont 39 pour des huîtres, sept pour
des moules, quatre pour des clams et deux pour des coques. Norovirus
était à l'origine dans 35 notifications.