samedi 5 janvier 2019

A propos de la gestion du risque norovirus en lien avec la consommation de coquillages

Une note de service de la DGAL (DGAL/SDSSA/2018-952 du 24-12-2018) nous informe sur la «Gestion du risque norovirus en lien avec la consommation de coquillages.»

Cette instruction technique présente les modalités de gestion du risque lié à la consommation de coquillages contaminés par norovirus. Cette gestion comprend d'une part des mesures de prévention en zone de production de coquillages et d'autre part des actions spécifiques en cas de toxi-infection alimentaire collective (TIAC) en lien avec les norovirus.
Cette instruction technique apporte des modifications sur :
- la mise en œuvre des analyses dans le cadre des TIAC ;
- la mise en place d'un appui à des projets de recherche. 
Les norovirus sont une cause majeure de toxi-infections alimentaires collectives (TIAC) en France, provoquant des gastro-entérites. Les aliments les plus fréquemment incriminés sont soit des végétaux, contaminés par l'eau (par irrigation ou aspersion), soit des coquillages qui concentrent les particules virales présentes dans leur milieu de vie. En effet, les malades infectés par une souche de norovirus excrètent pendant et après la période symptomatique un grand nombre de virus, ce qui peut conduire à la pollution des zones de production, pêche ou élevage. 
Néanmoins, en raison de l'importance que peuvent prendre les gastro-entérites virales, notamment liées à la consommation de coquillages, la DGAL juge que le risque lié à la présence de norovirus doit être pris en compte, à la fois en termes de prévention, pour éviter de possibles contaminations de zones de production de coquillages, et en termes de gestion lors de la survenue de TIAC.
Merci beaucoup ... pour la prise en compte du risque lié à norovirus …

Et pour cause, rappelons qu’il y a eu 37 notifications au RASFF de l’UE en 2018 pour la présence de norovirus dans les coquillages de France, et combien d’épidémies à norovirus ou de TIAC ? Nous ne le saurons pas … le RASFF parle 11 épidémies d'origine alimentaire ...

Au niveau des avis de rappels de coquillages, selon le site Oulah!, il y a eu 11 rappels d’huîtres et de moules pour cause de présence de norovirus.
Cela étant, c’est bien de faire une note de service de la DGAL sur la « Gestion du risque norovirus en lien avec la consommation de coquillages » mais c’est encore mieux d’informer les consommateurs sur les avis de rappel.

Le ministère de l’agriculture n’a signalé aucun de ces rappels au cours de l’année 2018 et maintenant la DGAL nous informe en ces termes « Néanmoins, en raison de l'importance que peuvent prendre les gastro-entérites virales, etc. ».

On se moque du monde !

De plus, la note de service persiste dans l’erreur avec sa propre logique administrative,
la mise en œuvre du retrait et du rappel des produits relève de la responsabilité des opérateurs concernés selon les modalités définies dans le guide d'aide à la gestion des alertes d'origine alimentaire (version du 2 juillet 2009 et conformément au règlement (CE) n°178/2002). Le retrait/rappel est particulièrement important pour la protection des consommateurs vis-à-vis d’un danger lié aux denrées sur le marché.

Rappelons que selon une étude de l’InVS paru en janvier 2018 sur l’« Estimation de la morbidité et de la mortalité liées aux infections d’origine alimentaire en France métropolitaine, 2008-2013 »,
Les norovirus apparaissent responsables du plus grand nombre de cas (517 593 cas, soit 34% du nombre total de cas d’origine alimentaire) ; ils sont au 3e rang en nombre d’hospitalisations (3 447 hospitalisations, 20% du nombre total d’hospitalisations pour infection d’origine alimentaire) et au 7e en nombre de décès (8 cas décédés, 3% du nombre total de cas décédés d’origine alimentaire). 
La note de service de la DGAL nous rappelle ce que sont les TIAC à norovirus
Les coquillages contaminés par des norovirus peuvent être à l'origine de TIAC. Pour être prises en compte comme un élément fiable de caractérisation du risque, il doit s'agir de TIAC dûment déclarées, validées par l’ARS et/ou l’agence nationale de la santé publique, dont les investigations épidémiologiques indiquent un lien possible avec la consommation de coquillages. 
En plus des conclusions des enquêtes alimentaires qui permettent d'établir un lien entre consommation de coquillages et survenue de GEA chez les consommateurs, il est nécessaire d'obtenir des résultats d'analyse virologique sur les coprologies réalisées chez les malades et sur des prélèvements faits sur les produits suspectés (voire sur la zone d'origine) si l’on veut établir un lien épidémiologique certain entre les TIAC et la contamination des produits (voire du milieu). Cela permet de comparer les séquences virales (au moins au niveau du génogroupe) entre coquillages suspectés et consommateurs malades.
En l’absence d’analyse virologique systématique sur les coprocultures, l’existence d’une TIAC due à la consommation de coquillages et la présence de norovirus dans les coquillages consommés et issus de la zone établissent un lien probable entre coquillages suspectés et consommateurs malades mais non certain. Le lien épidémiologique est considéré ici comme avéré lorsqu'un faisceau de preuves converge vers une même hypothèse. Il résulte de l’association des différents éléments épidémiologiques (symptômes, incubation, analyses) et alimentaires (enquête traçabilité sur les aliments suspectés) disponibles. 
Bien entendu le rédacteur de cette note de service doit bien savoir que les TIAC sont sous estimées en France comme ailleurs … car les données des toxi-infections alimentaires collectives ont longtemps étét l’alpha et l’oméga en France des maladies infectieuses d'origine jusqu'à la publication précité de l'étude l'InVS en janvier 2018.

Selon cette publication de 2003, la déclaration des TIAC représenterait la partie émergée de l’iceberg : 
C’est un fait, les toxi-infections alimentaires collectives (TIAC) souffrent d’une importante sous-déclaration, en France comme dans d’autres pays : on estime ainsi que moins d’une TIAC sur cinq, voire sur dix, serait effectivement déclarée.
L’Anses, en 2018, indique « Il convient donc de ne pas considérer les chiffres de déclaration infra comme une approche fiable de l’incidence des TIAC et de nuancer les éléments chiffrés à la lueur de cette sous-déclaration, … »

Il est temps de changer de logiciel de pensée …

Maintenant voyons ce cas de figure fourni par un ami,
Imaginez Madame P. infectée par des coquillages contaminés par norovirus. Elle contamine tous les membres de sa famille en les touchant, car ne lavant pas les mains en faisant mal la vaisselle, etc. Si Madame P. a bien été victime d'une infection par voie alimentaire, ce n'est pas le cas des membres de sa famille, ils ont été infectés par Mme P., pas par l'aliment causal
A mes yeux, cela ne correspond donc pas à la définition d'une TIAC (contractée à la suite de l'ingestion d'un même aliment). Mais c'est quand même une épidémie d’origine alimentaire ! C'est pourquoi je combats l'utilisation de ce fichu franco-français concept de TIAC, mais sans succès ...
Enfin, notons qu'à ce jour, nous n'avons toujours pas les données relatives aux toxi-infections alimentaires collectives déclarées en France en 2017 !

Complément du 12 janvier 2019. En 2018, pour les coquillages d'origine France, il y a eu 52 notifications au RASFF de l'UE, dont 39 pour des huîtres, sept pour des moules, quatre pour des clams et deux pour des coques. Norovirus était à l'origine dans 35 notifications.

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