lundi 29 avril 2019

La sécurité sanitaire des aliments en France dans la tourmente ?



Le 2 avril 2019 est publié une « Infographie - La sécurité sanitaire des aliments » :
Les exploitants du secteur alimentaire sont responsables des produits qu'ils placent sur le marché : ils mettent en œuvre les mesures adaptées pour fabriquer des produits sains et sûrs et ils doivent en rendre compte aux autorités de contrôle du ministère (DGAL), qui effectuent des inspections.
Dans un article sur ce document, j’avais indiqué qu’il y avait un étonnant tour de passe passe sur le nombre d’inspections sur la sécurité des aliments, étonnant, non ?

Dans son bilan 2018, la DGAL indiquait 57 800 inspections, dès lors pourquoi écrire ... 75 000 inspections en sécurité des aliments ... comment cela peut-il se justifier, mis à part un coup de com ?


Désormais, depuis le 28 juin 2019, le chiffre de 57 500 inspections en sécurité des aliments s'affiche sur l'infographie sur la sécurité sanitaire des aliments, le blog est donc ravi d'être lu, au moins, par la DGAL!

Le 26 avril 2019, et après moult tergiversations, voir 1 et 2, le ministère de l’agriculture se résout à annoncer le « Lancement d'une mission inter-inspections sur l'organisation du contrôle de la sécurité sanitaire des aliments », le tout étant signé par une cohorte de quatre ministres, c'est dire la soit disant importance du sujet ...
Car n’en doutez pas,
La sécurité sanitaire de notre alimentation est une mission de service public majeure, que le Gouvernement souhaite renforcer. Il s’agit à la fois d’un enjeu de santé publique, mais aussi de développement économique et de rayonnement international.
Ce serez bien si on avait des preuves de ce qui est avancé ...


Malheureusement, le site du ministère de l’agriculture se contente de fournir le laconique communiqué de presse des quatre ministres, en omettant de citer la lettre de mission, « Mission sur l’organisation des contrôles relatifs à la sécurité sanitaire des aliments », qui, elle, est bien présente sur le site de la DGCCRF, déjà une guéguerre de com avant l'heure ...

Morceaux choisis :
L'introduction est en quelque sorte « bienvenue chez les bisounours » ou on découvre l'eau chaude, 
Notre système de contrôles officiels de la sécurité sanitaire des aliments doit faire face à des risques alimentaires évolutifs dans leur nature et leur intensité :

  • en sus des risques microbiologiques, notre sécurité sanitaire des aliments doit faire face à des risques émergents (additifs, contaminants, nanoparticules, huiles minérales, etc.) ; 
  • la multiplicité des facteurs de risque et l’incertitude sur la réalité des dangers et leur hiérarchisation contribuent à nourrir l’inquiétude des consommateurs ; 
  • l’évolution de l’environnement économique, l’ouverture des marchés, l’augmentation des flux commerciaux et la segmentation complexifient l’exercice du contrôle et des mesures à prendre en cas d’alerte.
Là c’est carrément, l’hôpital qui se fout de la charité, qui a réduit le nombre de contrôles et d’inspections et qui rend la situation à peine maîtrisable ?

On semble découvrir les dangers et les risques, mais si le gouvernement avait eu une démarche basée sur la science, on n’en serez peut-être pas là, mais bien au contraire, le gouvernement adopte à chaque problème santé et ou de sécurité sanitaire des aliments rencontré une démarche politique, « on interdit », démarche qui flatte les « marchands de peurs » ...

Bref, cette introduction s’inquiète d’une situation qui est bien connue depuis très longtemps et qu’on n’a pas voulu voir !

Il est noté :

Dans certains cas, notamment dans les établissements de remise directe (métiers de bouche, restauration collective), la pression de contrôle n’est pas aussi élevée qu’au sein d’autres Etats-membres de l’Union européenne.
L'aveu est de taille, mais les établissements de restauration commerciale sont oubliés, étonnant, non ?
Vous étudierez les options envisageables pour répondre aux attentes des consommateurs et garantir la conformité aux exigences européennes, au regard des aspects suivants :
  • efficacité de l’exercice des missions ;
  • clarté de l’organisation et répartition des compétences entre les structures ;
  • lisibilité pour le consommateur ;
  • modalités de déploiement de l’option préconisée
Les trois options suggérées fortement ont été cités dans un précédent article, ici, pas de grand changement à attendre ?

Ce qui est attendu ressemble à s'y méprendre à la quadrature du cercle,


Votre analyse présentera les avantages et inconvénients de chaque option, notamment en matière de coût pour les finances publique, les voies de financement, d’impact sur les synergies dans la conduite des contrôles et le maintien de la compétence des agents, y compris dans les laboratoire. L’impact sur l’efficacité de la gestion des alertes devra être évalué. Vous établirez un comparatif avec le système de sécurité sanitaire des aliments mis en place dans les différents Etats-membres en identifiant les bonnes pratiques permettant d’améliorer l’efficacité globale de notre système.
Il faudra faire du neuf avec du vieux car attention au coût pour les finances publiques ...

Et pourtant comme je l’ai expliqué dans l’article du 25 décembre 2018, « La sécurité des aliments est-elle une variable d’ajustement de la politique économique de la France ? »

Les exemples de dysfonctionnements évoqués dans cet article sont nombreux, c’est à méditer, et malheureusement la situation en 2019, en particulier, au sujet des rappels, qui sont la façon la plus concrète pour le consommateur de voir ce qui se passe en matière de sécurité des aliments, s’est considérablement dégradée … nous en reparlerons bientôt avec le bilan catastrophique d’avril des avis de rappels des produits alimentaires …

A suivre ...

dimanche 28 avril 2019

Cas de SHU en France avec un lien possible avec la consommation de fromages Saint Félicien et Saint Marcellin


Un communique de presse du ministère de l’agriculture et du ministère de la santé du 27 avril 2019 rapporte le « Retrait et rappel de fromages Saint-Félicien et Saint Marcellin de la Société Fromagerie Alpine à Romans-sur-Isère ».
Retrait et rappel de fromages Saint-Félicien et Saint Marcellin, fabriqués par la Société Fromagerie Alpine à Romans-sur-Isère (Drôme), en lien possible avec des cas d’infection sévère à Escherichia coli

Treize cas de syndrome hémolytique et urémique (SHU) (âgés de six mois à quatre ans) dus à une infection à Escherichia coli de type O26 sont survenus chez des jeunes enfants, depuis le 21 Mars 2019, dans plusieurs régions. Les autorités sanitaires ont entrepris les investigations nécessaires afin d’identifier la source de contamination alimentaire à l’origine de ces cas et protéger les consommateurs.

D’après les premiers résultats des investigations, plusieurs de ces enfants ont consommé des fromages Saint-Félicien et Saint Marcellin  avant le début de leurs symptômes. Parmi ces enfants, 3 auraient un lien possible avec la consommation de fromages Saint Félicien et Saint Marcellin fabriqués par la Société Fromagerie Alpine à Romans-sur-Isère dans la Drôme. Par mesure de précaution, les autorités sanitaires ont décidé de procéder ce jour au retrait du marché des produits concernés et d’effectuer un rappel auprès des consommateurs. 
Pour information, le Saint-Félicien est un fromage au lait cru de chèvre et le Saint-Marcellin est un fromage au cru ou thermisé de vache.

Toutes les informations sur les fromages concernés sont dans le communiqué précité.

Cela étant, deux points méritent attention  dans ce communiqué :
  • Les fromages considérés dans le communiqué de rappel sont-ils ou non contaminés par Escherichia coli producteurs de shigatoxines (STEC) O26 ? Pas d’information, à ma connaissance, en ce sens, mais, il peut y avoir des données épidémiologiques sans lien avec des analyses microbiologiques.
  • Treize cas de SHU sont survenus chez des jeunes enfants depuis le 21 mars 2019, le délai entre cette survenue de cas et le communiqué de retrait et rappel a été de 36 jours, n’est-il pas un peu long ? 
Par ailleurs, le mois d’avril a eu son lot d’informations diverses sur les fromages au lait cru, dans un contexte, où il y a déjà eu plusieurs rappels de fromages au lait cru :
  • Le 26 avril, la France a notifié au RASFF de l'UE, référence 2019.1586, la présence de Listeria monocytogenes (< 10 UFC/g) dans du fromage Neufchâtel de France. Pour l'instant pas d'information en France mais distribution dans plusieurs pays européens.
Entre les mois de février et mai 2018, plusieurs enfants atteints de syndrome hémolytique et urémique (SHU), infectés par une bactérie Escherichia coli (E. coli) O26 ayant les mêmes caractéristiques, ont été identifiés par le Centre national de référence E. coli et son laboratoire associé (Institut Pasteur, Paris, et Laboratoire de microbiologie de l’hôpital Robert Debré, Paris). Les investigations menées par Santé publique France ont confirmé un lien épidémiologique entre ces cas et la consommation de reblochons au lait cru produits sur le site de Cruseilles (Haute-Savoie) de l’entreprise Chabert. 
Enfin, on lira Syndrome hémolytique et urémique pédiatrique lié à Escherichia coli producteur de toxines Shiga, bilan de 10 années de surveillance en France, 2007-2016, suite à la parution d’un article dans Eurosurveillance, il a été noté que « le système de surveillance français du SHU pédiatrique a constaté une diminution du nombre de SHU liés au STEC O157 et l'émergence de STEC O26 et STEC O80 en France. »

Complément du 29 avril 2019. Contrairement à ce qu'annoncent les ministères de la santé et de l'agriculture dans leur communiqué commun, cité en début d'article, il y a d'autres fromages  et références concernés par ce rappel. Ainsi, Auchan (sept références) et Carrefour (14 références) informent le 28 avril 2019 du rappel d'autres fromages, voir les liens Internet pour le détail ...

Autre complément, l'absence de communiqué sur les 13 cas de SHU sur le site de Santé publique de France, heureusement qu'en début d'année, on nous avait souhaité :
Complément du 30 avril 2019. Après le rappel massif de fromages de la société fromagère de la Brie le 12 avril 2019 en Belgique, voici que l'AFSCA informe le 29 avril 2019 du rappel de fromages Saint-Félicien et Saint-Marcellin fabriqués en France (Société Fromagerie Alpine).
Nature du problème : Présence possible de la bactérie E. coli de type O 26.

Un avis de rappel a été aussi publié en Allemagne et la France a notifié une alerte au RASFF de l'UE, référence 2019.1615.