mardi 7 mai 2019

France: La facture salée de la sécurité sanitaire des aliments en avril


Que dire de ce mois d’avril 2019, si ce n’est qu’il restera sans doute comme un condensé de tous les problèmes que connaît notre pays en matière de sécurité sanitaire des aliments, voir La sécurité sanitaire des aliments en France dans la tourmente ?, avec un ensemble de faits qui vont tous dans le même sens … jugez plutôt …car rien ne vaut un coup d’œil dans le rétro plutôt qu’un long discours :

La facture est bien salée
Des rappels de produits alimentaires à la hausse
C’est dossier alarmant parce que même ceux qui suivent de près les avis de rappels comme le site Oulah!, il est difficile de fournir un chiffre exact mais plutôt une fourchette.

Après janvier, février et mars avec respectivement, 20, 25 et 35 rappels, voici venir ceux d’avril 2019 avec un chiffre oscillant entre 43 rappels selon mon décompte, et 46 avis de rappel selon le site Oulah!

Soit un total sur quatre mois 123 à 126 rappels de produits alimentaires … un record en quelque sorte … mais pas un mot du côté de l’Ania, pas un mot de la part de nos autorités sanitaires, ces deux mondes semblent s’ignorer et le consommateur attend toujours un site unique des avis de rappel comme dans tous les pays civilisés …

En mai, je continuerai à vous tenir informé de ce qu’il faut appeler un fiasco, mais comme me le signalait une internaute outre atlantique,
D'après mon expérience, les entreprises alimentaires ne progressent pas tant que le gouvernement n’exerce pas une forte pression. J'ai vu cela encore et encore aux États-Unis et au Canada. Les entreprises alimentaires se comportent comme des enfants, essayant d’être systématiquement limite, en allant toujours plus loin jusqu'à ce que quelqu'un exerce une pression suffisante.
Nous verrons plus loin que l’état des contrôles en France va faire l’objet d’une mission, une de plus après plusieurs rapports … et que la pression est très loin d'être suffisante ...

Des éclosions de maladies infectieuses d’origine alimentaire
Pour ce qu’on en sait, il y a eu au moins trois sujets de préoccupations en termes de santé publique, les fromages au lait avec les STEC et Listeria ainsi qu’une TIAC dans un EHPAD.

27 avril 2019 : Selon les communiqués des ministères de la santé et de l’agriculture, rappel de fromages de la société Fromagère alpine en lien possible avec « Treize cas de syndrome hémolytique et urémique (SHU) dus à une infection à Escherichia coli de type O26 sont survenus chez des jeunes enfants, depuis le 21 Mars 2019. »
La notification au RASFF de l’UE n’a eu lieu que le 30 avril 2019, pas si rapide que ça donc, et du coup, des rappels à l’international ont eu lieu, mais avec retard … plus de 30 pays concernés ...
On est toujours en attente d’une communication de Santé publique de France …

10 avril 2019 : Des cas de listériose en lien avec la consommation de fromages fabriqués par la Société Fromagère de la Brie. Le ministère de la santé communique sur le sujet le 11 avril 2019.
Il s’en est suivi appel massif de fromages par la société fromagère de la Brie, une très mauvaise pub internationale pour nos fromages
On appris par un blog américain que ces cas étaient deux femmes, sinon black out total …

1er avril 2019 : Intoxication alimentaire dans un Ehpad avec ouverture d’une information judiciaire. Nous avons eu droit à deux communiqués en un jour (1 et 2) de la part de l’ARS Occitanie, c’était trop, et depuis plus rien …

Les contrôles sanitaires
Quatre ministres sont au chevet des contrôles sanitaires, d’où le lancement en catastrophe d’une mission inter-inspections sur l'organisation du contrôle de la sécurité sanitaire des aliments.

La lettre de mission commence bien, « La sécurité sanitaire de notre alimentation est une mission de service public majeure, que le Gouvernement souhaite renforcer. Il s’agit à la fois d’un enjeu de santé publique, mais aussi de développement économique et de rayonnement international. »

Mais hélas, on ne s’est pas donné les moyens car le nombre de contrôles ou inspection en sécurité des aliments a baissé depuis 2012 (96 239 inspections en sécurité des aliments) à 54 00 en 2017 puis cela s’est très légèrement accru en 2018 … avec 57 500 inspections et non pas 75 000 comme le clame un tour de passe passe du ministère de l’agriculture dans « Infographie - La sécurité sanitaire des aliments ».


Désormais, depuis le 28 juin 2019, le chiffre de 57 500 inspections en sécurité des aliments s'affiche sur l'infographie sur la sécurité sanitaire des aliments, le blog est donc ravi d'être lu, au moins, par la DGAL!

Il n’y aura pas de changement à venir car l’essentiel de cette mission est : « Mais que va-t-on faire de la DGCCRF ? », voir 1, 2, 3, 4, 5 et 6.

Changement à la tête de la direction générale de l’alimentation
Depuis 2012, le directeur général de l’alimentation a cautionné la baisse des contrôles ou inspections en sécurité des aliments. A mon sens, ce changement technique vise d’abord à anticiper l’option retenue par la mission inter-inspections sur l'organisation du contrôle de la sécurité sanitaire des aliments par un homme du sérail. 

Par ailleurs, il ne faut rien attendre de bien neuf avec ce 'nouveau' directeur dans la communication et la transparence des actions de contrôles et d’inspections en sécurité sanitaire des aliments, ce n'est pas le genre de la maison ...

Propos ésotériques, idéologiques et consternants du ministre de l’agriculture
Ils ont rapportés ici, et encore ici par des articles bien documentés que je vous recommande vivement.

Le visionnage de la vidéo du Dauphine Libéré sur l'interview du ministre de l'agriculture est à voir, car c’est un grand moment de science politique mais aussi de franche rigolade …, il ne manque plus que de décider la date des moissons après avoir tiré les cartes … mais quelle tristesse ce ministre de l’agriculture …

Ah oui, j’oubliais, le ministre veut créer un observatoire haut perché de l’agribashing, mais il ne voit pas que l’agribashing est au sein même du gouvernement ...

lundi 6 mai 2019

Maîtriser la croissance de E. coli après refroidissement en utilisant des méthodes simples


Voici un sujet « classique », comment maîtriser les populations de Eschercichia coli comme bactéries de substitution dans trois produits alimentaires à l'aide de différentes méthodes de refroidissement.

Résumé.

La Food and Drug Administration des États-Unis (FDA) a identifié le refroidissement inapproprié (« lent ») comme un facteur important contribuant aux épidémies de maladies d'origine alimentaire.

L'efficacité des techniques de refroidissement après traitement thermique sur la maîtrise de la croissance de bactéries de substitution de Escherichia coli dans la viande pour tacos, le chili con carne avec des haricots et la sauce marinara à faible teneur en sodium a été évaluée.

Chaque produit cuit à 73,9°C a été divisé en portions dans des bacs en acier inoxydable avec une profondeur de 2 et 3 pouces (entre 5 et 7,6 cm), et refroidi à 60°C ± 5°C avant une inoculation par E. coli. Les bacs ont été préparées avec différentes méthodes de fermeture afin de permettre ou de restreindre l'exposition à l'air, puis placées dans un congélateur commercial à -20°C ou situées dans un bain d'eau glacée dans un réfrigérateur commercial à 4°C.

Les températures des produits ont été enregistrées pendant 24 heures.
Les populations microbiennes ont été dénombrées à 0, 4, 8, 12 et 24 heures.

Les données de température pour la viande pour taco et le chili con carne aux haricots ont révélé que peu de méthodes de refroidissement répondaient aux critères de refroidissement du Food Code 2017 de la FDA, tandis que les données pour la sauce marinara à faible teneur en sodium montraient qu'aucune méthode de refroidissement ne répondait aux critères de refroidissement du Food Code.

Les changements des populations microbiennes étaient < 0,50 log10 UFC/g sur 24 heures dans tous les produits, ce qui indique que toutes les méthodes de refroidissement présentaient un faible risque de prolifération microbienne et étaient donc efficaces pour maîtriser E. coli dans ces produits.

A noter que le Food Code 2017 de la FDA exige:

(1) Refroidissement en 2 heures de 57ºC à 21ºC
(2) Refroidissement en 6 heures de 57ºC to 5ºC ou moins

Référence.

Control of Surrogate Escherichia coli Populations in Three Food Products Using Common Food Service Cooling Methods
Lindsay Beardall, Paola Paez, Randall K. Phebus, Tracee Watkins, Sara E. Gragg

NB : Le résumé à lui seul ne vaut pas la lecture de l’article dans son intégralité.

Les pratiques de stockage des aliments par des personnes âgées et la croissance de Listeria monocytogenes


La listériose touche préférentiellement les sujets âgés, les femmes enceintes, les nouveau-nés, et les personnes dont le système immunitaire est altéré, en particulier les personnes atteintes de cancer, de maladies du foie, celles ayant eu une transplantation et les patients dialysés.

Par ailleurs, selon l’InVS, « En France, l’augmentation de l’incidence de la listériose concerne essentiellement les sujets âgés de plus de 70 ans, présentant des comorbidités. »

Il est donc intéressant de se pencher sur cet article qui traite de la reconstitution en laboratoire des pratiques de stockage des aliments par des personnes âgées afin de déterminer les implications potentielles pour la croissance de Listeria monocytogenes.

Résumé.

Les adultes plus âgés sont particulièrement sensibles à la listériose et nombre d'entre eux consomment fréquemment des aliments prêts-à-être consommés souvent associés à la présence de Listeria monocytogenes.

Par conséquent, un stockage sûr des aliments prêts à être consommés est essentiel pour réduire les risques de listériose.

Cette étude visait à reconstituer en laboratoire les mauvaises pratiques de stockage des aliments à la maison par des consommateurs âgés, afin d'évaluer leur impact potentiel sur L. monocytogenes. Les données observées et autodéclarées relatives aux mauvaises pratiques en matière de conservation des aliments au Canada comprenaient un stockage prolongé des aliments prêts à être consommés et/ou des températures de réfrigération supérieures aux recommandations (> 5°C).

La reconstitution a été réalisée avec du fromage à pâte molle et de la viande prête à être consommée inoculée avec L. monocytogenes, ~3,7 log UFC, conservés aux températures recommandées (2,5°C) (n = 110) ; avec une température dépassant les recommandations (7,8°C) (n = 110) et la température ambiante (19,5°C) (n = 55).

Les échantillons ont été analysés toutes les 24 heures pendant 21 jours. Les résultats ont indiqué que L. monocytogenes augmentait à toutes les températures de stockage.

Les temps moyens de génération nécessaires à une division indiquaient une croissance plus lente de L. monocytogenes à 2,5°C (94 h t-1) qu’à 7,8°C (21,5 h t-1) ou à 19,5°C (11 h t-1), ce qui suggère qu’un stockage prolongé des aliments prêts à être consommés a entraîné une augmentation des populations de L. monocytogenes (< 7,6 log UFC/g), rendant potentiellement ces aliments impropres à la consommation.

Les résultats indiquent que des pratiques de stockage contraires aux recommandations pour les consommateurs, visant à réduire le risque de maladie d'origine alimentaire, augmentent les populations de L. monocytogenes, augmentant ainsi le potentiel de maladie d'origine alimentaire.

Référence.
Laboratory Re-enactment of Storage Practices of Older Adults to Determine Potential Implications for Growth of Listeria monocytogenes
Ellen W. Evans, Elizabeth C. Redmond

En hygiène domestique, l’Anses conseille à propos de la conservation des aliments, entre 0 et 4°C :
Consommez vos produits traiteurs, plats cuisinés, pâtisseries à base de crème ou aliments non emballés dans les 3 jours après achat. Conservez-les au frais.

NB : Le résumé à lui seul ne vaut pas la lecture de l’article dans son intégralité.