samedi 23 octobre 2021

Irlande: Rapport 2020 de l'agence de sécurité des aliments. Une comparaison avec la France est-elle possible ?

Oui, mais parfois, on envie un peu les autres pays. Travers bien français ? Certes oui, mais au moins nous avons des données et on en vient à se demander, c’est comment chez nous, chut, c’est un secret défense !

Voici donc «L'agence alimentaire irlandaise, la FSAI, détaille les importants défis auxquels elle a dû faire face en 2020», source article de Joe Whitworth paru le 22 octobre 2021 dans Food Safety News.

La pandémie de coronavirus, le Brexit et les problèmes de ressources ont gravement mis à l'épreuve la Food Safety Authority of Ireland (FSAI) en 2020, selon le rapport annuel de l'agence (124 pages versus 48 pages pour le rapport 2020 de la DGAL)

Les inspections des aliments, l'échantillonnage et les ordonnances d'exécution ont tous diminué, mais les alertes sur les aliments et les allergènes ont augmenté par rapport à 2019.

C’est aussi le cas chez nous en France; en 2020, il y a eu 41 600 inspections versus 58 200 en 2019. On se rappellera qu’il n’en pas étét toujours ainsi avec les bonnes années, 2012 et 2013, où il y avait eu respectivement, 86 239 et 82 729 inspections ensécurité des aliments.

Les rappels des produits alimentaires ont très sensiblement augmenté pour ne pas dire explosé en 2020: 997 rappels, dont 373 rappels liés à la présence d’oxyde d’éthylène versus 367 en 2019 et 332 en 2018.

En Irlande, les inspecteurs ont signifié aux entreprises 31 ordonnances de fermeture, deux ordonnances d'amélioration et neuf ordonnances d'interdiction, et ont engagé cinq poursuites contre des entreprises.

Les 42 ordonnances d'exécution représentaient une diminution de 67% par rapport aux 125 adréssées en 2019, reflétant l'impact de la pandémie de la COVID-19 sur le secteur de la restauration. Cependant, le nombre de poursuites est passé de deux à cinq.

Aucune donnée de ce type pour la France, à ma connaissance.

Les types de problèmes qui ont conduit à une action sont le mauvais nettoyage et la désinfection des locaux, une mauvaise hygiène personnelle; le manque d'eau courante; les installations de lavage des mains inadéquates, le stockage incorrect des aliments, l'absence ou l'inefficacité d'un programme de lutte contre les nuisibles, des problèmes structurels dus à un manque d'entretien continu et l'absence ou l'insuffisance de système de management de la sécurité des aliments.

La pandémie et les restrictions associées ont également affecté le système de contrôle officiel. Il n'a pas été possible d'inspecter certaines entreprises avec des consommateurs ou des résidents vulnérables, comme les maisons de santé.

Les préparatifs du Brexit, en particulier pour le renforcement des contrôles à l'importation au port de Dublin et à l'europort de Rosslare, ont présenté des défis pratiques pour assurer des niveaux normaux de contrôles officiels.

Des ressources réduites ont pû avoir un impact sur la santé publique

De nombreux agents de santé environnementale ont été détournés vers un travail de recherche des contacts pour soutenir le contrôle de la pandémie. Un certain nombre de laboratoires de prélèvements pour le virus de la COVID-19, réduisant leur capacité de contrôles alimentaires officiels. Un laboratoire a vu son accréditation suspendue en raison de la réduction de l'échantillonnage des aliments à la suite de la pandémie.

Les contrats de service et les relations avec d'autres agences aident la FSAI à prioriser ses ressources limitées dans les domaines les plus à risque pour le consommateur. Cependant, toute nouvelle réduction mettra «sérieusement en cause» la capacité de protéger la santé publique. Cela a été particulièrement évident en 2020 et dans les discussions de financement avec le service vétérinaire de l'autorité locale avant qu'un accord sur un budget 2021 ne soit trouvé, selon le rapport.

Comme on la vu plus haut, en France, cela fait des années que la baisse des inspections est continue ...

En 2020, le financement fourni par la FSAI aux autorités locales pour effectuer des contrôles officiels était inférieur au montant demandé. La FSAI n'a pas été en mesure de financer le recrutement des personnes pour des postes vacants.

En 2020, 50 044 entreprises alimentaires étaient sous tutelle d'agences ayant des contrats de service avec la FSAI. Il s'agit d'une légère augmentation par rapport à 2019. Parmi les entreprises enregistrées, près de 92% sont inspectées par les services de la santé environnementale; 6% par l'Autorité de protection des pêches maritimes, 2% par ministère de l’agriculture, de l’alimentation et d ela marine et 1% par les autorités locales.

Il y a eu une baisse de 2015 à 2020 des inspections de près de 58 500 à près de 33 500. En 2020, 50 261 échantillons ont été prélevés, soit une baisse de 11,4 % par rapport à 2019.

Comme évoqué plus haut, la baisse constant des inspections a commencé sous l’ère du ministre de l’agriculture, M. Le Foll pendant les cinq années à sonministère. Vous aurez aussi noté, j'en suis certain, que le nombre d'inspections en sécurité des aliments Irlande est pratiquement le même qu'en France pour l'année 2019 ...

Alertes alimentaires en hausse mais plaintes en baisse

En 2020, l'autorité a émis 112 alertes alimentaires et 55 alertes allergènes, soit une augmentation de 56% par rapport à 2019. Elle a également traité 661 incidents alimentaires contre 679 en 2019. Au total, 159 évaluations des risques ont été réalisées, dont 108 dans le domaine de la sécurité chimique.

Le nombre de plaintes des consommateurs concernant les aliments ou les locaux alimentaires, l'étiquetage et les allergènes était inférieur à 2 272 par rapport aux années précédentes, contre 3 460 en 2019.

Un tiers des plaintes concernaient des aliments insalubres et 30% des mauvaises règles d'hygiène. La réduction reflète l'impact de la pandémie, car de nombreuses entreprises de restauration ont été temporairement fermées pendant des périodes tout au long de l'année.

Le plan de prélèvements de coquillages a détecté la saxitoxine (une toxine associée à l'empoisonnement paralysant des coquillages) dans une zone de production du sud-ouest de l'Irlande. Cela a été trouvé dans une zone qui n'avait pas de tels problèmes auparavant. Elle a été fermée à la récolte commerciale lorsque les résultats enregistrés ont dépassé les niveaux prévus par la législation. L'analyse des échantillons a montré que la toxine a culminé à plus de trois fois la limite réglementaire.

En 2020, les agents de la FSAI ont participé à 95 enquêtes visant à déterminer la nature et l'étendue du non-respect de la législation alimentaire et des infractions liées à la fraude alimentaire. Plus de 24 tonnes d'aliments d'origine animale et non animale ont été retirées du marché à la suite de ces enquêtes.

L'Irlande a publié 11 cas dans le système d'assistance administrative et de coopération et du réseau de fraude alimentaire de la Commission européenne concernant la viande, l'alcool et les compléments alimentaires prétendant traiter, guérir et/ou prévenir l'infection à la COVID-19 et a traité 25 notifications.

Les saisies effectuées dans le cadre de l’oparation Opson IX d’Europol et Interpol comprenaient des aliments d'origine animale tels que de la viande et des produits laitiers, ainsi que de l'eau en bouteille et de l'alcool de contrefaçon.

En 2020, le RASFF a traité 3 862 notifications dont 58 notifiées par l'Irlande. Il y a eu 27 notifications pour des denrées alimentaires originaires du pays tandis que 216 concernaient des produits distribués en Irlande.

En 2020, il y a eu 240 notifications pour des produits d’origine France (212 pour 2021) et il y a eu 221 notifications (206 pour 2021) par la France au RASFF de l’UE.


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Coup de projecteur sur E. coli ST 131

Le blog vous a régulièrement proposé les excellentes informations diffusées par l’OSAV de Suisse au travers de ‘Seismo’, le couteau suisse de la sécurité sanitaire des aliments !

Tous les articles que le blog a consacré à cet outil sont proposés ici.

Désormais, j’ai choisi de sélectionner un article à partir du dernier numéro de Seismo paru en octobre 2021 plutôt que de lister toutes informations.

Facteur de risque pour E. coli ST131 dans différentes denrées alimentaires (selon Wetzel. S. et al.)

J’ai retenu E. coli ST131, suite à la publication d’une note Briefing Letter par l’OSAV sur le sujet.

  • Escherichia coli (E. coli) ST131 est la lignée prédominante parmi les isolats d'E. coli pathogènes extra-intestinaux.
  • ST131 est à l'origine d'infections urinaires et de bactériémies communautaires et hospitalières dans le monde entier, et est considérée comme un problème potentiel majeur en raison de sa multirésistance aux antibiotiques. Les personnes âgées, ou celles avec une condition préexistante, seraient le plus susceptibles à une bactériémie.
  • Une étude publiée en 2018 a identifié qu’une sous-lignée en particulier, la ST131-H22, était établie dans les populations de volailles du monde entier, dont la viande peut servir de vecteur d'exposition et d'infection pour l'homme.
  • Le risque de ST131 en tant qu'agent pathogène d'origine alimentaire a été évalué comme «moyen» pour le poulet, la volaille, le poisson et les produits de mer, et «bas» pour le boeuf, le veau, le porc et d’autres denrées.
  • Le développement des antibiorésistances, le transfert à des lignées normalement inoffensives, l’apparition de nouvelles lignées (p.ex. ST1183) et le vieillissement de la population pourraient influencer l’impact de E. coli ST131 pour la sécurité alimentaire.

Évolution possible

De nombreux facteurs environnementaux, agricoles et sociétaux pourraient à l’avenir influencer l’impact de E. coli ST131 sur la sécurité alimentaire:
  • Antibiorésistance: Les gènes de résistance aux antibiotiques sont généralement portés par un type spécifique de plasmide, qui est naturellement transférable à d'autres E. coli. Il est donc envisageable que les résistances puissent être transmises à des lignées normalement inoffensives, commensales de l’homme8. De plus, l'utilisation élevée d'antimicrobiens pendant la pandémie de COVID-19, en particulier dans les unités de soins intensifs, pourrait avoir une influence sur le développement de résistances aux antimicrobiens.
  • Autres souches: L’émergence d’autres lignées, aux propriétés analogues à ST131, est décrite. Par exemple, E. coli ST1193 est une nouvelle lignée parmi les Escherichia coli résistants aux fluoroquinolones.
  • Vieillissement de la population : La pyramide des âges montre clairement que la proportion de personnes âgées en Suisse augmente, en raison du faible taux de fécondité et de l’augmentation de l’espérance de vie. Ainsi, la fraction de la population pour laquelle ST131 présente un plus grand risque augmente également.
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Les promesses de réduction de Salmonella dans les volailles n’engagent que ceux qui les écoutent !

«L'USDA annonce de nouveaux efforts pour réduire Salmonella liées aux volailles», source CIDRAP News.

Le Food Safety and Inspection Service (FSIS) de l’USDA a annoncé qu'il mobilisait un effort plus important et plus complet pour réduire les maladies liées à Salmonella associées aux volailles. L'objectif est de réduire de 25% les maladies liées à Salmonella aux États-Unis.

«Beaucoup trop de consommateurs tombent malades chaque année à cause de la volaille contaminée par Salmonella», a déclaré le secrétaire à l'Agriculture, Tom Vilsack dans un communiqué de presse de l'USDA le 10 octobre 2021. «Nous devons constamment évoluer dans nos efforts pour prévenir les maladies d'origine alimentaire afin de garder une longueur d'avance sur les mauvais microbes. Aujourd'hui, nous prenons des mesures pour aider à prévenir la contamination par Salmonella tout au long de la chaîne d'approvisionnement des volaille et du système de production afin de protéger la santé publique.»

L'effort comprend un programme pilote qui établira de nouvelles façons d’analyser Salmonella dans les usines de volaille et encouragera les éleveurs et les producteurs à réduire les bactéries sur les oiseaux avant qu'ils n'entrent dans les usines de transformation. Le FSIS a déclaré qu'il collaborerait également avec le Comité consultatif national sur les critères microbiologiques dans les aliments (National Advisory Committee for Microbiological Criteria in Foods) afin de déterminer quelles souches et combien de bactéries entraîneront probablement une maladie.

Le FSIS estime que plus d'un million de consommateurs malades en raison de Salmonella se produit chaque année, et plus de 23% de ces maladies sont causées par la consommation de poulet et de dinde.

Mais qu’en est-il des efforts de réduction au sein de l’UE ?

  • Dans le rapport sur les zoonoses en 2018, publié en décembre 2019, l’EFSA nous apprenait que «Salmonella est la cause la plus fréquente des foyers épidémiques d'origine alimentaire dans l'UE».
  • Dans le rapport sur les zoonoses en 2019, publié en février 2021, l’EFSA nous indique que les «Cas de Campylobacter et Salmonella stables dans l'UE». La salmonellose était la deuxième zoonose la plus fréquemment signalée dans l'UE.
  • En février 2019, l’EFSA proposait «Cas de Salmonella chez l'homme : évaluation des objectifs de réduction actuels de l'UE».

Il est ainsi rapporté,

Les pays de l'UE sont actuellement tenus de réduire la proportion de troupeaux de poules pondeuses infectées par certains types de Salmonella à 2%. Les experts de l'EFSA estiment que si cet objectif était réduit à 1%, le nombre de cas de salmonellose transmis par des poules pondeuses aux humains diminuerait de 50%.

Un objectif d’1% est actuellement en vigueur pour les poules reproductrices – au début de la chaîne de production de volaille – pour cinq types de Salmonella pertinents pour la santé humaine. L'EFSA recommande de maintenir l’objectif en vigueur pour trois de ces types et de remplacer les deux autres par des types de Salmonella plus pertinents en matière de santé publique aujourd'hui.

Au niveau des toxi-infections alimentaires collectives en France, Salmonella est en 201 comme les années précédentes, l’agent pathogène le plus fréquemment confirmé.

Salmonella représente 36% des TIAC pour lesquelles un agent a été confirmé en 2019, 35 % en 2018, 30% en 2017 ...

On croise donc les doigts pour que cela baisse un jour de 2% …

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vendredi 22 octobre 2021

Le scandale de l'huile frelatée dure toujours en Espagne

Nous sommes toujours en vie
Le scandale de l’huile frelatée est une catastrophe sanitaire d'origine industrielle qui a fait, en 1981, 20 688 victimes en Espagne. Entre 370 à 835 en sont mortes, suivant les décomptes. Source Wikipédia.

Selon Courrier International du 1er octobre 2003,

Le Dr Gaston Vettorazzi était responsable de la division toxicologie de l’OMS lors de l’apparition de l’épidémie. Cet expert aujourd’hui à la retraite nous a déclaré avec la plus grande courtoisie que, si une poignée de journalistes dépourvus de bagage scientifique parvenait à y voir clair dans cette affaire, c’est que la vérité devait vraiment sauter aux yeux. En d’autres termes, il ne pense pas que tout cela découle d’une série d’erreurs administratives, mais que la vérité a été délibérément étouffée par les autorités espagnoles.

«Des survivants espagnols d'un empoisonnement alimentaire organisent une manifestation au musée du Prado», source Food Safety News.

Un groupe de personnes touchées par une grande épidémie d'empoisonnement alimentaire en Espagne à partir d'huile d'olive frelatée il y a plusieurs décennies a tenté de sensibiliser à l'incident, selon les médias.

Reuters a rapporté que les survivants sont entrés mardi dans le musée du Prado de Madrid et ont menacé de se suicider. Ils ont été enlevés par les agents de sécurité ou laissés volontairement après plusieurs heures. L'un des six à l'intérieur du musée était en fauteuil roulant.

Les manifestants du groupe Segiumos Viviendo (Nous sommes toujours en vie) voulaient une rencontre avec le Premier ministre espagnol Pedro Sánchez et des fonds gouvernementaux supplémentaires pour couvrir les frais médicaux des victimes.

L'association a déclaré que les personnes se sentent «humiliées» et «abandonnées» plus de 40 ans après que la maladie soit connue. Ils ont ajouté que le musée avait été choisi comme site de la manifestation parce que la culture avait aidé les victimes à faire face à ce qui s'était passé.

En 1981, l'ingestion d'huile d'olive frauduleuse a conduit à la découverte d'une épidémie connue plus tard sous le nom de syndrome de l'huile toxique (TOS pour toxic oil syndrome). On pense que la cause en est l'huile de cuisson de colza dénaturée à l'aniline et vendue illicitement comme huile d'olive.

Au moins 20 000 personnes ont été touchées et 350 sont décédées peu de temps après l'apparition de la maladie, tandis que de nombreuses autres maladies chroniques comme une maladie du foie se sont développées. Certaines études évaluent le nombre de décès à plus de 2 000.

Les patients présentaient des douleurs musculaires, appelées myalgies, et un nombre très élevé d'un type de globules blancs, appelé éosinophilie. Les femmes de moins de 40 ans étaient plus fréquemment et gravement touchées que les hommes.

Il y a eu un certain nombre d'affaires judiciaires, dont une qui a commencé en 1987 et s'est terminée en 1989, qui a condamné plusieurs personnes, selon Associated Press.


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jeudi 21 octobre 2021

Oxyde d'éthylène et la Commission européenne: Le show des rappels must go on !

 

Exemples de produits rappelés récemment en France

N’hésitez pas à lire avant ou après l’article ci-dessous, un autre article diffusé par le blog, Aliments contaminés par l’oxyde d’éthylène : quelle est la réalité des risques ?

Voici donc «Certains Etats membres de l'UE s'en prennent aux mesures de rappel d'oxyde d'éthylène», source article de Joe Whitworth paru le 21 octobre 2021 dans Food Safety News, article adapté par mes soins -aa.

Plusieurs pays européens ont qualifié les mesures adoptées pour lutter contre l'oxyde d'éthylène dans un additif alimentaire de «disproportionnées».

Le 13 juillet 2021, il a été convenu que tous les produits contenant de la gomme de caroube (E410) contaminée par de l'oxyde d'éthylène devaient être retirés ou rappelés pour protéger le consommateur. L'additif est utilisé dans les crèmes glacées, les produits carnés, les confiseries et le fromage et est produit à partir de graines de caroube.

Cependant, la Belgique et le Danemark ont ​​fait part de leurs préoccupations concernant le rappel systématique de toutes les denrées alimentaires produites avec une matière première supérieure à la limite maximale de résidus (LMR) légale.

Les découvertes d'oxyde d'éthylène ont commencé en septembre 2020 avec des produits à base de graines de sésame en provenance d'Inde. La substance a été utilisée pour réduire ou éliminer la contamination par Salmonella. Dans l'UE, l'utilisation d'oxyde d'éthylène pour désinfecter les denrées alimentaires n'est pas autorisée. Plus de 700 rapports concernant l'oxyde d'éthylène ont depuis été publiés sur le système d'alerte rapide pour les denrées alimentaires et les aliments pour animaux (RASFF).

Répression des États membres

Lors d'une autre réunion, le 4 octobre 2021, des responsables d'un pays ont déclaré qu'il pourrait ne pas être en mesure de continuer à appliquer l'approche convenue tandis qu'un autre a regretté le peu de temps et la pression sous lesquels les conclusions ont été atteintes.

Des représentants d’Etats membres ont déclaré que la Commission européenne n'avait pas réussi à leur fournir rapidement un communiqué légal pour soutenir les mesures d'exécution, sous-entendu, les mesures de rappels.

La Commission européenne estime que même si l'oxyde d'éthylène n'est pas retrouvé dans le produit final en-dessus de la limite de quantification, ces produits ne sont pas conformes aux exigences de sécurité alimentaire. La gamme potentiellement large d'aliments contenant de la gomme de caroube contaminée à l'oxyde d'éthylène pourrait avoir des effets cumulatifs en consommant une variété d'articles impliqués.

Des experts des États membres de l'UE, de la Suisse, de la Norvège, de l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), de la Commission européenne, y compris de la DG Santé et des laboratoires de référence de l'UE (EURL), ont participé à la réunion pour apporter des éclaircissements sur les aspects réglementaires et techniques afin de soutenir les mesures d'application par les Etats membres de l'UE.

Les règles mises à jour prévues pour s'appliquer à partir de janvier 2022 comprendront des contrôles d'oxyde d'éthylène pour les importations de gomme de xanthane et de guar, d'épices, de suppléments de carbonate de calcium contenant des plantes et des nouilles.

La Commission européenne a déclaré qu'elle s'était engagée à réduire le gaspillage alimentaire, mais que cela ne doit pas nuire à la sécurité des aliments.

«Il ne peut y avoir de compromis car la sécurité des aliments est une condition préalable essentielle à un système alimentaire durable. Bien qu'il soit regrettable de jeter des aliments, il est essentiel que les aliments dangereux soient retirés de la chaîne d'approvisionnement alimentaire et jetés conformément à la législation européenne en vigueur», selon la Commission européenne.

Certains États membres ont rappelé que, bien qu'ils soient d'accord avec cette déclaration, ils remettent en question l'approche selon laquelle un aliment est considéré comme dangereux et jusqu'où s'étendrait une non-conformité dans la chaîne d'approvisionnement alimentaire, étant donné que la teneur en ETO et 2CE (oxyde d’éthylène et 2-chloroéthanol) des produits alimentaires composites serait dilué quelques milliers de fois. La Commission européenne a reconnu la nécessité d'approfondir l'examen de cette question, en s'appuyant sur l'expérience acquise et l'évolution de la situation.

Action prévue pour les certificateurs bio de l’Inde

L'incident a également incité la Commission européenne à proposer une mise à jour de la liste des autorités de contrôle reconnues pour l'importation de produits biologiques dans l'UE.

Des milliers de tonnes de graines de sésame prétendument bio contaminées par de l'oxyde d'éthylène ont été importées d'Inde depuis fin 2020, certaines provenant d'entreprises contrôlées par des organismes officiels. Cela a donné lieu à environ 90 rapports dans le système d'information sur l'agriculture biologique (OFIS pour Organic Farming Information System). Les niveaux de contamination variaient selon les envois, mais dépassaient généralement de loin le niveau maximal de résidus.

L'absence de réponse sur les causes profondes de la défaillance du système de la part des organismes de contrôle impliqués dans la contamination et les mesures correctives inappropriées prises par ces agences et l'autorité indienne de tutelle, mettent en péril la robustesse des contrôles et de la surveillance, selon le Commission européenne.

Le projet de loi stipule que cinq organismes de contrôle ne devraient pas figurer sur la liste de ceux reconnus par l'Autorité pour le développement des exportations de produits alimentaires agricoles et transformés (APEDA) en Inde. Cela signifie qu'ils ne seront pas en mesure de certifier les exportations de produits biologiques de l'Inde vers l'UE, car les entreprises autorisées par eux ont envoyé des produits contaminés à l'oxyde d'éthylène en Europe.

Plus de 20 autres agences de certification resteront sur la liste. Si le projet de loi est approuvé, il s'appliquera à partir de janvier 2022.

En conclusion de la réunion du 4 octobre 2021, la Commission européenne a résumé les points d'action suivants :

. Demander à l'EFSA d'approuver éventuellement l'évaluation des risques du BfR sous la forme d'une déclaration en tant que priorité urgente.

. Rendre publiques les considérations juridiques concernant la conclusion de la réunion du coordinateur de crise du 13 juillet 2021 dans une annexe au rapport de synthèse de cette réunion.

. En tenant compte de l'expérience acquise, évaluer s'il est nécessaire d'affiner l'approche de la gestion des risques à l'avenir.

Bienvenue chez les bisounours de la Commission européenne !


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Aliments contaminés par l’oxyde d’éthylène : quelle est la réalité des risques ?

Dira-t’on un jour, tout ça pour ça ?
Cela y ressemble fortement !
13 424 produits (références et lots) ont été rappelés depuis plus d’un an en France, selon la DGCCRF, et surtout en lisant l’article du Pr Narbonne, ci-dessous, ces questions nous viennent à l’esprit, tout cela aurait-il pû ou dû être évité ?

Il ne s’agit donc pas d’une crise sanitaire pouvant affecter les consommateurs mais simplement d’un problème de conformité réglementaire d’utilisation d’un procédé non autorisé en Europe qui doit se réglé par des mesures administratives au niveau des importations. De plus les évaluations des risques sanitaires ne doivent pas se faire selon la réglementation actuelle qui n’est pas adaptée au cas particulier du traitement des denrées sèches par l’ETO. 

«Aliments contaminés par l’oxyde d’éthylène : quelle est la réalité des risques ?» est un article écrit par Jean François Narbonne. Docteur ès Sciences (Toxicologie), Professeur honoraire de l’Université de Bordeaux, ancien Directeur du groupe de Toxicologie de l’UMR CNRS 5255, Ancien expert auprès de l’ANSES, du Conseil de l’Europe et de l’UNEP/OMS.

Le blog reproduit plusieurs éléments de cet article paru sur le site de l’Association Toxicologie-Chimie. Je remercie un lecteur attentif du blog de m’avoir signalé cet article. Tous les liens de l’article ci-dessous sont de mon fait.

En allant sur ce lien, vous pourrez lire plusieurs autres articless sur l’oxyde d’éthylène.

1. L’alerte

A la fin du mois d’aout 2020, la Belgique puis l’Allemagne ont effectué un signalement auprès du réseau d’alerte rapide européen pour les denrées alimentaires et les aliments pour animaux (RASFF) sur la présence d’oxyde d’éthylène (ETO) dans des graines de sésame. Des analyses complémentaires réalisées au mois d’octobre ont montré une contamination étendue des graines de sésame, en particulier celles provenant d’Inde. Les concentrations étaient généralement de l’ordre de 0,5 à 10 mg/kg. Les signalements de contaminations concernent au moins de 3 000 tonnes de sésame sur les 60 000 tonnes de graines de sésame importées d’Inde chaque année par l’UE, dont la moitié sont bio. Ces signalements ont déclenché une cascade de rappel de produits tels que : farines, fromage, graines, houmous et tartinables, plats préparés, pains, purées de sésame, céréales, burgers, confiseries, épices, biscottes. Depuis plusieurs années, les produits en provenance d’Inde font l’objet de demandes pressantes de la Commission européenne en matière d’hygiène. En cause, des contaminations par des salmonelles, des résidus de matières non sensés se trouver dans les graines, etc. mis en évidence dans les 5 ou 6 dernières années. L’UE a donc fait pression pour que l’Inde respecte mieux les exigences sanitaires. Les opérateurs locaux ont alors vraisemblablement eu recours au traitement par l'ETO qui a également été détecté dans des graines de sésame en provenance de Bolivie et d'Ethiopie, ainsi que dans des épices et aromates de Turquie, de Tanzanie, du Sri Lanka, d'lndonésie, d'Egypte, du Maroc et des Pays-Bas. Les conséquences médiatiques dans un contexte de pandémie mondiale ont suscité des craintes irraisonnées chez les consommateurs : «Alimentation, présence d’un pesticide : 7000 références retirées des rayons» ; «Sésame contaminé : Pourquoi le bio est touché». Pour comprendre cette crise il faut connaître les données scientifiques et techniques du problème.

2. Les traitements de désinfection

Les techniques classiques de décontamination des denrées alimentaires par la chaleur ont leurs limites puisque certains germes présentent une résistance au système de stérilisation classique. Leur élimination nécessite l'utilisation de conditions spéciales (chauffage à 120°C, hautes pressions) car les spores résistent par la synthèse d'une protéine qui leur permettent de survivre dans une eau bouillante. Du fait de la sensibilité des poudres alimentaires à la chaleur, les procédés de décontamination athermiques chimiques (fumigations) et physiques (irradiation, UV, hautes pressions, lumière pulsée...) semblent plus appropriés car ils permettent d’éviter les dégradations thermiques des qualités organoleptiques et des propriétés nutritionnelles. Très longtemps utilisée, la fumigation consiste à appliquer, sur les poudres, des gaz tels que l’oxyde d’éthylène, l’oxyde de propylène, le phosphure d’hydrogène et le bromure de méthyle qui sont des composés engendrant des réactions d’alkylation et provoquant ainsi la destruction ou l’inactivation des micro-organismes. Utilisée jusqu’en 1980, la fumigation des poudres alimentaires présentait de nombreux inconvénients, notamment la production de composés nouveaux (néoformés), ayant une toxicité inférieure à celle des agents primaires (éthylène glycol, chloro-2 éthanol, épichlorhydrine...).

3. Oxyde d’éthylène et 2-chloroéthanol – Informations générales

Il s’agit d’un gaz produit par oxydation de l’éthylène, de façon naturelle par la flore microbienne, soit de façon industrielle par catalyse en présence d’argent. Ce gaz sert à la synthèse de composés comme l’éthylène glycol, certains gaz propulseurs, additifs de carburants, formulations de pesticides, matières plastiques. Il est ou a été utilisé dans la synthèse ou comme intermédiaire de synthèse de nombreux produits …. L’oxyde d’éthylène (ETO) a été utilisé comme agent de stérilisation de matériel médical et comme insecticide pendant une quarantaine d’années. Cet usage est maintenant interdit dans l’UE. Comme fumigant, il reste en usage dans différents pays hors UE pour son rôle de biocide dans le stockage des denrées, essentiellement des farines, des amendes, des fruits secs et des confiseries en Europe et aux Etats-Unis. L’ETO est aussi utilisé pour la stérilisation et comme traitement antifongique et antibactérien dans certains produits comme les épices, la poudre de curry et des noix de coco déshydratées. La stérilisation nécessite des doses plus élevées que les traitements insecticides mais concerne des aliments peu consommés en quantité. Techniquement, l’ETO est utilisé en mélange avec du CO2 dans des installations dédiées et sécurisées. Le principal produit de dégradation de l’ETO est le 2-chloroéthanol (2-CE) ou éthylène chlorohydrine, qui se forme quand l’ETO réagit avec le chlore (Na Cl) qui se trouve dans les matrices alimentaires traitées.

4. Problème du cadre législatif et réglementaire

Si l’ETO est un puissant toxique pour les travailleurs exposés, la toxicité pour les produits traités doit être considérée sous un aspect très différent. Dans le cas de stérilisation de matériel médical par exemple, l’exposition du consommateur peut venir d’un certain relargage au moment de l’utilisation, d’ETO adsorbé sur les matériaux plus ou moins poreux (en plastique par exemple). Ceci peut en particulier concerner du matériel jetable à usage unique, conservé sous emballage étanche et qui pourrait induire une courte exposition au moment de l’ouverture pour utilisation. Dans le cas de stérilisation de produits alimentaires secs, comme des graines ou des épices, le problème est différent car si le but est aussi d’éliminer de graves dangers biologiques (bactéries et virus) fréquents dans les pays producteurs (Inde Pakistan, Egypte, Afrique…), l’ETO a pu être faiblement adsorbé sur les matrices. Cependant ayant un point d’ébullition de 10,4°C, l’ETO s’évapore au cours des phases de stockage, de dilution et de chauffage éventuels dans le cadre des processus de fabrication des produits finis. Ainsi on ne détecte plus d’ETO dans les produits bruts traités ou dans les produits finis mais on trouve le produit néoformé, le 2-CE, dont la toxicité n’a plus rien à voir avec celle de l’ETO. Si on veut trouver une comparaison pertinente, on peut se référer au traitement de stérilisation des denrées par ionisation. Dans ce cas l’agent biocide est le radical hydroxy OH., généré par radiolyse de l’eau présente dans la matrice. Cette entité extrêmement réactive de l’oxygène, est aussi hautement cancérigène par réaction avec l’ADN des cellules vivantes (donc aussi pour les opérateurs non protégés). Dans les matrices alimentaires ce radical induit la formation de composés néoformés issus essentiellement de la radiolyse des lipides (aldéhydes, oxycholestérol…) qui entrent dans l’évaluation des risques pour les consommateurs et dans l’estimation de la balance bénéfices /risques. Dans ce cas la toxicité propre du rayonnement ionisant n’entre pas en ligne de compte dans cette évaluation. Dans le cas du traitement par l’ETO, la forme active de l’oxygène est l’époxyde porté par l’éthylène qui du fait de sa réactivité sur les entités biologiques vivantes, a son effet biocide mais induit sur les matrices alimentaires «inertes» la formation du 2-CE qui est le composé néoformé majeur. On pourrait aussi faire un parallèle avec les traitements thermiques de pasteurisation ou stérilisation où on considère la toxicité éventuelle des composés néoformés ingérés par le consommateur (produits de Maillard, lipides oxydés, acrylamide, furanes…). Il semble donc que le cadre réglementaire lié au classement de l’ETO comme pesticide paraît à première vue, comme un peu décalé par rapport à un procédé de décontamination des denrées alimentaires. Pour comprendre ce décalage, il faut rappeler les contextes réglementaire et toxicologique.

4.1. Réglementation

D’un point de vue légal, les résidus d’ETO sont considérés comme des pesticides. En effet, la Directive 2009/128/CE a instauré un cadre communautaire d’action pour parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable. Les pesticides sont : *D’une part les produits phytopharmaceutiques au sens du règlement (CE) n°1107/2009 ; *D’autre part les produits biocides au sens du règlement (CE) 528/2012. -Les produits biocides sont destinés à détruire, repousser ou rendre inoffensifs les organismes nuisibles, à en prévenir l’action ou à les combattre de toute autre manière par une action autre qu’une simple action physique ou mécanique. Exemples : désinfectants, produits de protection, produits de lutte (insecticides, rodenticides), peintures antisalissure sur les bateaux, etc. -Les produits phytopharmaceutiques permettent de protéger les végétaux en détruisant ou éloignant les organismes nuisibles indésirables ou en exerçant une action sur les processus vitaux des végétaux. Exemples : insecticides, fongicides, herbicides, acaricides... Ainsi, les deux catégories de pesticides, biocides et produits phytopharmaceutiques, sont définies par leurs usages et non leurs formulations chimiques.

Dans le cadre du traitement de désinfection des denrées alimentaires, l’ETO est donc classée comme un biocide figurant sur la liste de l’ECHA comme TP2 (désinfectant). Cependant en Europe, l’utilisation pour la désinfection des denrées alimentaires n’est pas autorisée (ECHA, 2020). La réglementation pesticide (EC) No 396/2005 précise que les limites maximales applicables aux résidus de pesticides (LMR) présents dans ou sur les denrées alimentaires et les aliments pour animaux d’origine végétale et animale sont exprimées comme la somme de la matière active et de ses métabolites. Pour l’ETO la LMR concerne donc la somme ETO + son métabolite le 2-CE, exprimés en équivalent ETO. La LMR est de 0,02 mg/kg valeur de la LOQ (limite de quantification).

Si on prend la réglementation dans son expression, on voit qu’elle concerne les résidus présents «dans ou sur les denrées alimentaires». Or l’expérience issue des cas historiques de contamination par l’ETO (des milliers de dosages depuis le «début de la crise» en 2019) montre que dans les résultats analytiques exprimés en ETO + 2-CE, l’ETO est inférieur à la LOQ, la seule présence détectée est celle du 2-CE. Ceci s’explique très simplement par la volatilité de l’ETO à température ambiante et donc à son dégagement rapide au cours du stockage des denrées et de leur transformation, surtout si le process comporte une phase de chauffage du fait de son point d’ébullition de 10,4°C alors que celui du 2-CE est de 129°C. Dans le produit fini, seul le composé néoformé par réaction de l’ETO avec le Cl présent dans les matrices alimentaires est détectable. Ainsi la réglementation «pesticide» base l’évaluation des risques sanitaires sur une substance l’ETO, à laquelle le consommateur n’est pas exposé ! L’ évaluation des risques sanitaires devrait logiquement être basée sur le 2-CE, substance néoformée réellement présente.

La réglementation sur les biocides paraît pertinente quand le produit de traitement reste présent dans ou sur la denrée alimentaire, par-contre elle ne l’est plus quand le produit de traitement disparait rapidement et que ne persistent que les produits néoformés.

De même si la toxicité des métabolites est inconnue ou peu documentée, l’assimilation de leur toxicité à celle de la substance parente est pertinente (par précaution), elle n’est plus dans le cas inverse. Or il existe une réglementation qui tient compte de la disparition de la substance de traitement au cours d’un procédé : C’est celle qui différencie les auxiliaires technologiques des additifs. En effet leur définition précise que : «Les auxiliaires technologiques sont des substances, non consommées comme ingrédients alimentaires en soi, mais utilisées lors du traitement ou de la transformation de matières premières, de denrées alimentaires ou de leurs ingrédients afin de répondre à un objectif technologique donné». En fait la France est l'un des seuls pays européens à préciser les conditions d'évaluation, d'autorisation et d'utilisation de ces auxiliaires via le décret n° 2011-509 du 10 mai 2011 et l'arrêté du 7 mars 2011.

On voit donc que les autorités françaises sont capables d’adapter les règlements quand la législation européenne ne prend pas en compte des contextes spécifiques.
Cependant si un auxiliaire technologique «disparaît» au cours d’un traitement technologique il induit la formation de composés néoformés qui peuvent avoir leur propre toxicité. Dans ce cas, le cadre réglementaire le plus adapté est celui appliqué pour l’évaluation des effets des traitements technologiques sur les matrices alimentaires couvert par le règlement (CE) n°258/97 (catégorie 6/f) concernant les «nouveaux aliments ou novel foods». Il s’agit en effet les «aliments et ingrédients alimentaires auxquels a été appliqué un nouveau procédé de production qui n’est pas couramment utilisé, lorsque ce procédé entraîne dans la composition ou la structure des aliments ou des ingrédients alimentaires des modifications significatives de leur valeur nutritive, de leur métabolisme, ou de leur teneur en substances indésirables». Dans le cadre, de nouveaux procédés de décontamination (comme la lumière pulsée ou les hautes pressions), les questions instruites par les agences nationales sont les suivantes : - Evaluation de l'efficacité du traitement pour la décontamination de surface des produits ; - Evaluation de l’impact du procédé sur la qualité sanitaire et les caractéristiques nutritionnelles des produits.
C’est ce contexte réglementaire qui semble le plus approprié dans le cadre du traitement des aliments secs par l’ETO.(...)

Conclusion

Il ne s’agit donc pas d’une crise sanitaire pouvant affecter les consommateurs mais simplement d’un problème de conformité réglementaire d’utilisation d’un procédé non autorisé en Europe qui doit se réglé par des mesures administratives au niveau des importations. De plus les évaluations des risques sanitaires ne doivent pas se faire selon la réglementation actuelle qui n’est pas adaptée au cas particulier du traitement des denrées sèches par l’ETO. On a vu qu’en son temps, l’administration Française avait su adapter la réglementation au cas particulier des auxiliaires technologiques. La réglementation la plus pertinente est celle de l’évaluation des procédés technologiques introduite en 1997 dans le cadre de la directive «Novel Foods». On ne voit pas pourquoi les procédés plus anciens ne seraient pas évalués sur les mêmes critères.
Il est étonnant que devant un tel décalage entre la perception et la réalité des risques, les opérateurs des filières alimentaires, les assureurs des lourdes opérations de rappel, les experts des agences et des organismes de recherche, les journalistes spécialisés ou même les hommes politiques conscients, n’aient pas alertés les administrations en charge de l’application des règlements.

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