Dans ce que France
Inter appelle une enquête diffusée le 10 septembre 2022, vous
lirez ou écouterez à propos des «Pizzas Buitoni contaminées à
l’E. Coli : les révélations des salariés».
Résumé
Six mois après le scandale, plusieurs salariés de l’usine Buitoni
à Caudry mettent en cause des pratiques que Nestlé leur aurait
imposées : la réduction du temps de nettoyage et l’utilisation
d’une farine non pasteurisée.
Un autre
article de la même radio traite des «Pizzas Buitoni contaminées
: de nouveaux dysfonctionnements dénoncés par les salariés».
J’ai sélectionné quelques extraits ci-après, mais rien de bien
nouveau ...
Le 1er avril dernier, un arrêté de la préfecture du Nord ordonne
l’arrêt de la production «jusqu’à la remise en conformité
avec la réglementation en matière d’hygiène».
Voici ci-dessous des extraits de l’arrêté préfectoral daté du
1er avril 2022 de la préfecture du Nord.
Réduire au minimum les temps qui ne sont pas consacrés à la
production
L’enquête a néanmoins permis de révéler des défaillances dans
la gestion de l’usine. Celles-ci avaient déjà été pointées par
la DGCCRF dans trois rapports datant de 2012,
2014
et 2020
(comme l’a révélé le média d’investigation en ligne
Disclose).
On avait alors découvert la présence de moisissures, de rouille et
de peintures écaillées dans l’usine, ainsi que des mites
alimentaires sur la ligne de production des pizzas Fraîch’Up.
«En 2012, Nestlé a mis en place une nouvelle manière de gérer
le site. On appelle ça la méthode
Lean», explique Maryse Tréton de de la fédération CGT de
l’agroalimentaire. L'objectif est de réduire au maximum tous
les temps qui ne sont pas dédiés à la production. On réduit les
temps de nettoyage et les temps de maintenance préventive pour faire
de la production au maximum.»
Commentaire
Pourquoi
faut-il faire des rapports si l'on n’agit pas ? La question ne sera
pas posée à la DGCCRF, mais uniquement à la direction de Nestlé ...
«L’état général s’est dégradé»
Selon des salariés, les conséquences de cette réorganisation ne se
font pas attendre : «Pour nous, ça voulait dire aller plus vite
sur le nettoyage. Du coup, la priorité, c'était de nettoyer la
ligne de production et les machines. Mais pas ce qu’il y avait
autour, comme par exemple les murs et les plafonds. Ce n’était
plus possible de tout faire.» Interrogée sur ce point, la
direction de Nestlé France confirme que le temps de nettoyage est
aujourd’hui de moins de 5 heures. Mais elle précise qu’elle fait
effectuer «des prélèvements microbiologiques systématiques
dans différentes zones stratégiques du site». Voir aussi cet article du blog.
Cette réduction du temps de nettoyage aurait eu d’autres
conséquences. Selon les salariés que la Cellule investigation de
Radio France a rencontrés, certaines zones de l'usine qui étaient
nettoyées au moins une fois par an avant 2015, ne le seraient plus.
«Avant, explique l’un d'eux, on fermait l’usine trois
semaines au mois d’août. Pendant ce temps, l’entreprise de
nettoyage qui avait un contrat avec l’usine pouvait faire du
nettoyage de fond. Depuis, Nestlé ne veut arrêter l’usine qu'une
seule semaine en été. Donc, l’état général s’est dégradé.»
27 degrés à cause de la climatisation bouchée
Dans l’atelier de boulangerie où est fabriquée la pâte des
pizzas Fraîch’Up, «avant 2015, les gaines de la climatisation
étaient nettoyées tous les six mois-un an, explique un
salarié. Maintenant, ce n’est plus fait et ça se bouche.
Quand il fait 40 degrés dehors, comme il y a de la tôle sur les
toits, la température monte très haut dans l’atelier, il fait
très chaud, ça peut monter jusqu’à 27 degrés.»
Interrogée précisément sur ce point, la direction de Nestlé
France n’a pas répondu.
Des silos à farine non nettoyés depuis sept ans
La salubrité d’autres zones de l’usine laissait apparemment à
désirer. Il s’agit des silos, ces quatre tours géantes de l’usine
très visibles de loin, et qui stockent chacune 25 tonnes de farine.
«Avant, ils étaient nettoyés une fois par an, au mois d’août
pendant la fermeture de l’usine. Depuis 2015, ils ne l’ont plus
été à ma connaissance», affirme un salarié. Or, selon le
Guide européen des bonnes pratiques d’hygiène pour l’entreposage
des céréales que nous avons consulté, il faudrait nettoyer les
lieux de stockage au moins une fois par an.
Un changement de farine qui pose question
La piste d’une contamination à l’intérieur de l’usine est
l’une des hypothèses avancées par les scientifiques, mais elle
n’est pas la seule. Il n'est pas exclu que la farine ait pu être
contaminée avant d'être livrée à l’usine. Cette éventualité a
été avancée par Christophe Cornu, le PDG de Nestlé France, dans
une interview au Figaro
en juillet dernier.
Pour parer à cette éventualité, il existe un type de farine
traitée thermiquement, c’est-à-dire chauffée pour tuer les
bactéries. Elle est régulièrement employée pour la fabrication de
pâtes crues, plus propice à la présence de bactéries. Et Buitoni,
selon des salariés, utilisait ce type de farine jusqu’en 2021 pour
fabriquer la pâte de sa gamme Fraîch’Up. Mais ils affirment
qu’après cette date, c’est une autre farine non traitée
thermiquement qui aurait été utilisée.
«Début 2021,
il y a eu changement de farine alors que ça faisait 20 ans qu'on
faisait la Fraîch’Up avec la même, nous a-t-on affirmé. On
n'avait jamais eu de problème avec cette farine pasteurisée. Et on
nous a dit : maintenant vous allez utiliser une pâte classique qui
n'est pas pasteurisée. On n’a pas compris pourquoi.» Interrogée
sur ce point, la direction de Nestlé nous a confirmé qu’elle
avait changé la recette des pizzas Fraîch’Up, mais sans donner de
précisions sur la nature de la farine qu’elle utilise désormais.
L’article cite «Une alerte, déjà chez Nestlé, aux Etats-Unis en
2009», c’était un peu plus qu’un alerte, mais sur cette affaire,
le blog vous en avait largement parlé en son temps. Voir aussi tous
les articles parus sur le sujet dans Food
Safety News.
En 2009, la pâte à cookies préemballée de Nestlé Toll House a
rendu malade 72 personnes dans 30 États contaminée par E. coli
O157:H7, et 35 de ces personnes ont été admises à l'hôpital,
dont quelques-unes avec une maladie grave.
En janvier 2010, Nestlé
a identifié la présence de E. coli O157 dans sa pâte à
cookies avant que cela n’atteigne des consommateurs.
Le communiqué de presse de Nestlé indiquait : «le produit
actuellement sur les étagères des magasins affichant l'autocollant
Nouveau lot» n'est pas affecté et aucun produit n'est rappelé.»
Un changement que Nestlé prévoit d'apporter est de traiter
thermiquement toute la farine utilisée dans la pâte à biscuits
Toll House . Ce procédé, que Nestlé a commencé à utiliser
mercredi, entraînera une suspension temporaire de la production.
Cependant, la production avec le nouvel ingrédient débutera la
semaine du 25 janvier et le produit apparaîtra sur les tablettes des
épiceries début mars 2021.»
Si l’on remonte un peu plus loin, le CDC
avait mis en cause de la farine en 2016 où 63 personnes dans
plusieurs Etats avaient été rendues malades.
A cette occasion, le CDC avait indiqué,
Cette épidémie rappelle qu'il n'est pas sûr de goûter ou de
manger de la pâte ou de la pâte crue, qu'elle soit faite de farine
rappelée ou de toute autre farine. La farine ou d'autres ingrédients
utilisés pour faire de la pâte crue ou de la pâte à frire peuvent
être contaminés par des STEC et d'autres germes qui peuvent rendre
les gens malades.
Plus récemment, le blog avait synthétisé certaines pistes dans
Quelques
éléments sur une ‘possible’ contamination de la pâte de
pizzas.
Enfin, on rappelera une fois de plus cette BD de 1993 !
Complément
Le nettoyage du site confié à une entreprise extérieure
Nestlé ne conteste pas l’évolution de la durée consacrée au
nettoyage de site. Le groupe affirme que le temps effectif consacré
au nettoyage n'a pas varié. Avant 2015, un prestataire extérieur
était chargé du nettoyage, effectué entre 23h et 5h, avec une
équipe de cinq personnes. Depuis l'internalisation, ce sont au moins
dix personnes qui sont affectées au nettoyage, sur une durée
inférieure, a-t-on expliqué.
«À l'issue de chaque cycle de production, les lignes sont
intégralement arrêtées et nettoyées suivant un processus strict
d'une durée de 4h45, comprenant une phase de nettoyage, puis de
désinfection et enfin un rinçage à l'eau dont l'efficacité est
contrôlée par des prélèvements microbiologiques systématiques
dans différentes zones stratégiques du site», a déclaré à
l'AFP un porte-parole du groupe.
Selon La
Voix du Nord du 10 septembre, «Affaire Buitoni: l’usine de
Caudry rouvrira-t-elle mi-novembre?»
Alors que de nouvelles révélations de salariés témoignent de
dysfonctionnements sur l’entretien du site, un accord d’entreprise
daté du 18 août fixe à la semaine 46 l’objectif de réouverture
de l’usine Buitoni de Caudry.
Enfin, une curiosité
de la part de l’avocat d'une quinzaine de plaignants,
Me Richard Legrand s'est rendu à Caudry le 10 septembre, récupérer,
avec une glacière, deux pizzas surgelées. Potentiellement
contaminées, il va les faire analyser. Si de nouvelles souches ou de
nouvelles bactéries sont identifiées, le nombre de plaignants
pourrait augmenter considérablement.
Contacté mi-mai par un habitant d'une commune proche de Caudry qui
avait acheté deux pizzas de la gamme Fraîch Up, quelques jours
avant le 18 mars, date du retrait de ces pizzas des étals des
supermarchés, l'avocat Richard Legrand a décidé de venir, glacière
à la main, les chercher et de faire réaliser des analyses sur ces
pizzas.
Me Legrand a d'abord proposé de les mettre à disposition de la
justice. Sans réponse du juge, il va donc les faire
analyser lui-même cette semaine.
C’est bien connu la justice est aveugle, et s'il y a de nouvelles souches ou de nouvelles bactéries, il y aura de nouveaux plaignants, pardon, de nouveaux clients ...
Complément
L’article auquel Bill
Marler fait référence à pour titre, «Buitoni
affair: new testimonies overwhelm management» (Affaire
Buitoni : de nouveaux témoignages accablent la direction)
qui rend
compte de l’article de France Inter, dont le blog vous a narré
l’essentiel dans Reportage
sur l'usine Buitoni de Nestlé, toujours des questions, mais de
réponse !