mardi 14 février 2023

A propos des résidus d’acide salicylique dans les denrées d’origine animale

Avis 01-2023. Résidus d’acide salicylique dans les denrées d’origine animale (SciCom 2022/12). Avis scientifique approuvé par le Comité scientifique de l’AFSCA de Belgique le 30 janvier 2023.

Contexte et Termes de référence
La présence de résidus d'acide salicylique a été détectée à plusieurs reprises dans des échantillons de lait prélevés par l'AFSCA et les secteurs MelkBe, FEBEV et l'Algemeen Boerensyndicaat. Dans la plupart des cas, les enquêtes des unités locales de contrôle (ULC) de l'AFSCA n'ont pas permis d'identifier un traitement médical ou l'utilisation d'un biocide pouvant être lié à la présence de ces résidus. Les secteurs s'interrogent donc sur la possibilité d'une origine autre que le traitement médicamenteux des animaux ou l'utilisation de biocides, notamment une origine végétale par le biais des végétaux consommés par les animaux en pâture ou des aliments complémentaires pour animaux.

Pour ces raisons, il est demandé au Comité scientifique de remettre un avis sur la présence de résidus d'acide salicylique dans les denrées d'origine animale. Son objectif est plus particulièrement de répondre aux questions suivantes :

- Quelles sont les sources naturelles possibles de résidus d'acide salicylique dans les denrées d'origine animale, et principalement dans le lait et les muscles ?
- Est-il possible de faire la distinction entre les sources naturelles possibles et l'administration exogène d'acide salicylique ?
- Quels sont les risques pour la santé animale et la sécurité alimentaire associés à la présence de résidus d'acide salicylique dans les denrées d'origine animale, et peut-on recommander des options de gestion pour réduire le risque de présence de ces résidus ?

Conclusions
L’acide salicylique est une substance pharmacologiquement active autorisée en tant que médicament vétérinaire mais également présente dans des biocides autorisés en Belgique. Les dépassements des limites maximale de résidus (LMRs) dus à l'administration de médicaments vétérinaires ou à l’application de biocides ne peuvent être exclus, mais seraient plutôt liés à une utilisation incorrecte des médicaments vétérinaires (dose administrée incorrecte, non-respect du délai d’attente ou des espèces cibles, etc.) ou des biocides (absence de rinçage ou rinçage incomplet, utilisation de biocides non autorisés pour les installations de traite, accumulation de résidus suite à une utilisation simultanée de plusieurs biocides contenant de l'acide salicylique au cours de la même période, etc.).

Il faut toutefois souligner ici que la LMR définie pour le lait est extrêmement basse et que cette valeur est le sujet de discussions au sein du réseau des Laboratoires de Référence européens.

L'acide salicylique est également un composé naturellement présent dans les végétaux. Parmi les cultures à destination fourragère, le foin de luzerne (485 mg/kg), le foin de trèfle (32 mg/kg) et le maïs (jusque 12,8 mg/kg) ont été identifiés comme des sources potentiellement importantes d’acide salicylique chez les animaux de rente. Parmi les espèces sauvages, l'écorce de saule (jusqu'à 3000 mg/kg) constitue une source également importante. Ces concentrations en acide salicylique listées dans ces sources végétales doivent cependant être interprétées avec prudence car elles peuvent varier fortement d'une variété à l'autre, suivant la partie de la plante concernée (feuilles, fleurs, graines), du stress ou encore de l’origine géographique et des conditions de culture.

Sur base d’une ration journalière dans le respect de bonnes pratiques agronomique, il a été estimé qu’un bovin adulte pourrait consommer environ 2 g d’acide salicylique par jour par le biais de son alimentation. Compte tenu des informations disponibles, ces quantités ne devraient pas mener à des dépassements de LMR.

Lorsqu’ingéré à haute dose (> 700 mg/litre de plasma), les salicylates peuvent être la cause de toxicité sévère pour la santé humaine. Les concentrations retrouvées dans les végétaux et dans les denrées animales ne représentent cependant aucun risque ni pour la santé humaine, ni pour la santé animale.

Pour le Comité scientifique et dans l’état actuel des connaissances, la présence de résidus d’acide salicylique dans le lait suite à la consommation de végétaux qui en contiendraient une forte teneur est peu probable, même dans des cas de consommation de matières végétales très riches en acide salicylique.

Les salicylates s’hydrolysent in vivo en acide salicylique. De ce fait, il est impossible de déterminer si l'acide salicylique détecté dans un échantillon était à l'origine de l'acide salicylique, de l'acide acétylsalicylique, de l'acide méthylsalicylique ou un autre salicylate. Pour la même raison, il est actuellement impossible de pouvoir faire la distinction chez les ruminants entre de l’acide salicylique provenant de l’alimentation animale (naturelle) ou d’origine non alimentaire (traitement médicamenteux ou résidus de biocides). Pour le Comité scientifique, il est cependant cohérent de tout d’abord investiguer sur une origine autre que l’alimentation animale au vu des concentrations qui peuvent être atteintes dans certains biocides (0,1 à 0,5%) ou médicaments (660 mg/g de salicylate de méthyle) en comparaison avec les concentrations présentes dans l’alimentation animale.

Recommandations pour les autorités
En cas de non-conformité et à côté des enquêtes sur une mauvaise utilisation médicamenteuse ou de biocides, le Comité scientifique recommande de vérifier si une alimentation animale riche en luzerne a été donnée aux animaux ou si des compléments alimentaires pour animaux à base de saule ont été utilisés. En plus, en raison du nombre limité d'études retrouvées sur la teneur en acide salicylique dans la luzerne et en raison de l'importance de la luzerne dans l'alimentation animale, il peut être recommandé de mener des études supplémentaires sur la teneur en acide salicylique de cette source végétale.

D’autre part, des vérifications devraient également été faites quant à l’utilisation de biocides et au respect de leurs conditions d’utilisation. L’idéal serait d'inclure des avertissements sur l'utilisation de l'acide salicylique dans les fiches techniques ou les documents d'autorisation des produits biocides, en soulignant la possibilité qu'on les retrouve dans le lait ou la viande.

Afin d’établir les taux de transfert possible de l’alimentation animale vers les produits animaux, il serait souhaitable de réaliser des études supplémentaires et plus particulièrement chez les ruminants.

dimanche 12 février 2023

Le Val d'Oise, département pilote, pour l’hygiène alimentaire et la sécurité des aliments

Le Val d’Oise fait figure, me semble-t-il, de département pilote en France matière de lutte pour l’hygiène alimentaire et la sécurité des aliments vis-à-vis des enseignes de la restauration commerciale ainsi que des commerces de bouche. Le blog suit presque régulièrement l’action du préfet de ce département et vous pouvez les articles publiés ici.

Voici la dernière action qui date du 10 février 2023 …

Une boulangerie d'Argenteuil fermée après un contrôle d'hygiène, source la gazette du Val d’Oise.
Un contrôle sanitaire réalisé par la préfecture du Val-d'Oise dans une boulangerie d'Argenteuil a entraîné la fermeture administrative du commerce. 

France : Rappels de produits alimentaires éparpillés, façon puzzle !

Reconstituer le puzzle des rappels tel est le lot quotidien de consommateur qui cherche à comprendre comment cela fonctionne ?
Pas aussi bien que le prétendent nos autorités !

Voici deux exemples récents issus de l’application qui vous veut du bien, RappelConso.

On se souvient des nombreux rappels éparpillés des spécialités végans et bio de la société Jay&Joy, façon puzzle, pour cause de présence de Listeria monocytogenes, et de plus, il y a eu des cas de listériose qui ont justifié ces rappels, selon Santé publique France du 20 janvier 2023.

Jugez plutôt, un avis rappel le 25 avril 2022, un autre le 25 juillet 2022, puis en 2023, un rappel le 14 janvier et 22 avis de rappel le 23 janvier. Soit un total de 25 rappels !

On pensait à un accident, mais pas du tout ; voici que cela recommence, en plus fort, en plus éparpillé en février 2023, avec cette fois-ci des produits de la société laitière de Vichy suspectés d’être contaminés par Listeria monocytogenes.

Deux rappels le 2 février, deux rappels le 4 février, un rappel le 6 février, un rappel le 7 février, deux rappels le 9 février, 23 rappels le 10 février et deux rappels le 11 février. Soit un total de 33 rappels !

Sans doute faudra-t-on attendre la fin du week-end pour compléter ce tableau des rappels façon puzzle ...

Mise à jour du 15 février 2023
Rappel en Allemagne le 14 février 2023 de  Gaperon brebis et de Gaperon chèvre  de la société laitière de Vichy.

Améliorer la santé des abeilles avec des probiotiques et des vaccins

«Améliorer la santé des abeilles avec des probiotiques et des vaccins», source ASM News.

Les abeilles vivent dans des sociétés denses et complexes, dont les services écosystémiques sont indispensables.

Les abeilles, en particulier l'abeille occidentale Apis mellifera, sont d'importants pollinisateurs dans les environnements agricoles. Les abeilles ouvrières remplissent toutes les fonctions de la colonie, à l'exception de la ponte, et leur santé est essentielle au bien-être de toute la ruche. Si ces ouvrières disparaissent, des événements destructeurs connus sous le nom d'effondrements de colonies peuvent en résulter. Lors d'un effondrement de colonie, les abeilles ouvrières meurent ou quittent la ruche, abandonnant leur reine et perdant ainsi toute la ruche.

Les forces motrices de l'effondrement des colonies sont à la fois complexes et peu claires, mais elles sont essentielles à comprendre si nous voulons protéger les abeilles et les services écosystémiques qu'elles fournissent. Ainsi, la santé des abeilles est un élément important de la recherche scientifique et des efforts de conservation dans le monde entier. Les chercheurs examinent des facteurs tels que les maladies, les pesticides, les changements dans les sources de nourriture et même le stress lorsqu'ils étudient comment ces types de perturbations affectent la survie, le comportement et le microbiote intestinal des abeilles. Certains de ces dangers ont des origines microbiennes, et certains ont des solutions microbiennes.

Le microbiome intestinal des abeilles mellifères offre des indices
L'intestin est un habitat particulièrement dense en microbes, qui est tout aussi important pour les insectes, comme les abeilles, que pour les mammifères comme nous. Bien que le microbiote intestinal des abeilles mellifères soit relativement simple, n'abritant que 5 membres principaux, il offre de nombreux avantages pour leur santé. Ceux-ci incluent une croissance, une digestion et une protection améliorées contre les agents pathogènes opportunistes.

De plus, le microbiote intestinal peut jouer un rôle dans ce que l'on appelle l'axe intestin-cerveau, la communication bidirectionnelle entre le tractus gastro-intestinal et le système nerveux central. Les scientifiques ont montré que le microbiote intestinal affecte le comportement social des abeilles, car il semble être important pour la médiation des interactions sociales et l'analyse des informations sensorielles de leur environnement. Les abeilles utilisent ces signaux sociaux pour se transmettre des informations entre elles, les aidant à naviguer dans le monde qui les entoure, soulignant l'importance du microbiote intestinal pour une ruche fonctionnelle.

Chez les abeilles, comme chez les autres animaux, un microbiote intestinal sain est crucial pour un hôte sain. Cependant, tout comme le nôtre, le microbiote intestinal des abeilles est également vulnérable aux perturbations qui induisent un état perturbé appelé dysbiose. Les menaces viennent de plusieurs côtés : les antibiotiques, la perte d'habitat, l'alimentation, les pesticides et même les impacts à grande échelle du changement climatique. La dysbiose dans l'intestin peut rendre les abeilles plus vulnérables aux agents pathogènes et avoir un impact négatif sur leur santé.

Pro-abeille-otiques
Compte tenu de l'importance du microbiote intestinal, certains efforts pour la santé des abeilles commencent par des traitements axés sur le microbiote. Dans une approche similaire aux interventions pour les troubles intestinaux humains, certains chercheurs cherchent des traitements probiotiques pour protéger les abeilles contre la dysbiose intestinale et ses effets négatifs. Bien que des preuves solides de l'efficacité des probiotiques chez les abeilles mellifères fassent encore défaut, les souches d'abeilles indigènes semblent avoir plus de succès à rester dans l'intestin après l'arrêt du traitement probiotique que les mélanges probiotiques commerciaux qui ne sont pas nécessairement dérivés des abeilles.

Concevoir des probiotiques pour combattre le virus des ailes déformées
L'acarien varroa est un agent pathogène destructeur des abeilles.

Pour aller plus loin, des efforts sont également en cours pour produire des probiotiques «sur mesure» pour les abeilles, qui peuvent aider à les protéger contre les parasites et les agents pathogènes. Par exemple, l'acarien varroa, un agent pathogène destructeur des abeilles, parasite les abeilles et transmet un agent pathogène viral connu sous le nom de virus des ailes déformées (DWV pour deformed wing virus). Le varroa et le DWV sont des habitants indésirables des ruches, mais extrêmement communs, et peuvent provoquer des effondrements des colonies.

Cependant, les chercheurs commencent maintenant à comprendre comment la protection contre ces agents pathogènes peut provenir de l'intérieur. Dans une étude, des chercheurs ont génétiquement modifié Snodgrassella alvi, l'un des 5 microbes intestinaux de l'abeille domestique, pour stimuler le système immunitaire de l'abeille et augmenter la réponse d'ARN interférent. Dans cette réponse, le système immunitaire reconnaît l'ARN double brin exogène (ARNdb) à l'intérieur des cellules et dégrade tout ARNdb correspondant en le découpant. Cette réponse peut être exploitée pour cibler l'ARN spécifique de l'agent pathogène, bien que l'injection directe d'ARNdb ciblé ait eu un succès limité chez les abeilles. Cependant, S. alvi modifié pour le produire à l'intérieur de l'hôte a été très efficace pour protéger les abeilles contre le varroa et le DWV.

Protection supplémentaire contre le varroa
Pour le DWV, S. alvi a produit des sections de correspondance d'ARNdb du génome viral, incitant les abeilles à découper l'ARN correspondant appartenant au virus, tandis que le mécanisme de lutte contre le varroa était légèrement plus complexe. Lorsque les acariens, comme le varroa, parasitent les abeilles, ils mangent des corps gras contenant de l'ARNdb sur le thorax et l'abdomen des abeilles. Lorsque les acariens ont ingéré de l'ARNdb correspondant à 14 de leurs propres gènes essentiels, produits par S. alvi dans l'intestin, les abeilles ont été protégées contre l'infection car l'ARNdb déclenche la réponse d’ARN interférent des acariens, les amenant à découper leur propre ARN. Bien qu'il s'agisse d'un pas en avant prometteur, la question de savoir si ce type de technologie peut être étendu pour protéger des ruches entières contre différents types de maladies reste une question ouverte.

Le premier vaccin pour les abeilles fait le buzz
En plus de ces nouvelles connaissances dans le domaine des probiotiques, des avancées majeures dans le développement de vaccins changent notre regard sur la loque américaine, une maladie bactérienne répandue qui provoque l'effondrement des colonies. En janvier 2023, le département américain de l'Agriculture (USDA) a autorisé le premier vaccin oral pour protéger les abeilles contre la loque américaine. La technologie vaccinale repose sur l'alimentation des larves inactivées de Paenibacillus (l'agent causal de la maladie) à la reine des abeilles via la gelée royale, sa source spéciale de nourriture. Une fois que la reine des abeilles a ingéré le vaccin, son corps produit des anticorps qui se propagent dans ses œufs. Cela rend également sa progéniture, la cible de P. larvae, immunisée. Cette technologie vaccinale ouvre la voie à la protection des abeilles, ainsi que d'autres insectes, contre d'autres menaces microbiennes.

Au-delà de l'abeille
Bien que des progrès significatifs aient été réalisés, certains affirment que l'accent écrasant de la recherche sur les abeilles est myope, car elles ne sont en aucun cas les seuls pollinisateurs du bloc. Par exemple, les abeilles sauvages sont un groupe incroyablement diversifié comprenant environ 20 000 espèces. Bien qu'elles ne produisent pas de miel, elles sont des membres extrêmement importants des écosystèmes à part entière. Nous en savons très peu sur beaucoup d'entre eux, en particulier sur leur microbiote intestinal, ce qui limite les mesures microbiennes que nous pouvons prendre pour les protéger.

Sauver les abeilles, à la fois mellifères et sauvages, est un effort continu à travers le monde. Les comprendre de l'intérieur peut nous aider à les protéger de certaines des menaces auxquelles elles sont confrontées, bien que nous ne puissions pas perdre de vue des problèmes plus vastes, tels que la perte d'habitat et le changement climatique, pour lesquels les interventions microbiennes ne sont guère plus qu'un pansement.

Si vous souhaitez en savoir plus sur les facteurs qui menacent la survie des colonies d'abeilles, consultez cet article, qui explique les facteurs de stress microscopiques et macroscopiques, ainsi que ce qui peut être fait pour aider à résoudre le problème.

L’image représente des interactions directes entre les abeilles qui les aident à transmettre des informations et à maintenir le fonctionnement de la ruche.

samedi 11 février 2023

Le combat victorieux de Mme Yasmine Motarjemi contre Nestlé

Selon le quotidien suisse Le Temps du 31 janvier 2023, dans le «Conflit entre Nestlé et Yasmine Motarjemi: la multinationale renonce à faire recours».

Reconnu fautif dans un cas de harcèlement, le géant de l’agroalimentaire ne fera pas recours auprès du Tribunal fédéral. Nestlé devra verser des dédommagements à son ex-responsable de la sécurité des aliments, Yasmine Motarjemi.

Les lecteurs du blog connaissent Madame Yasmine Motarjemi car elle a publié une étude de cas sur un scandale de sécurité des aliments dans une multinationale alimentaire suisse.

Voici un texte que Mme Yasmine Motarjemi a publié le 31 janvier 2023 sur Linkedin, «Grande Victoire sur Nestlé !»

Plus de 17 ans de combat ! Grande Victoire sur Nestlé !
Un combat pour la sécurité sanitaire des aliments, les droits humains, la justice et la vérité !

Je viens d'apprendre que Nestlé renonce à faire recours au niveau fédéral (voir ci-dessous leur communiqué de presse. Il va sans dire que c'est honteux ce que Nestlé déclare !

Voici ma réponse
«Tout d’abord je salue la décision rendue par la Cour d’Appel civil du tribunal cantonal du canton de Vaud. Je remercie toutes les personnes qui sont restées auprès de moi dans ce long combat.

Cette décision marque le terme d’un combat commencé face à Nestlé il y a 17 ans, contre le harcèlement mené par la Direction de Nestlé à mon encontre. Je souhaite souligner que ce harcèlement a été mis en œuvre à mon encontre suite aux dysfonctionnements et des violations que je soulevais dans le domaine de la sécurité sanitaire de leurs produits. Contrairement à ce que soutient Nestlé dans son communiqué, s’il s’agit bien du droit de travail, l’origine du harcèlement trouve sa source dans les questions relatives à la gestion de la sécurité des aliments.

Je suis consternée d’apprendre que Nestlé considère avoir pris des mesures de protection en ma faveur, alors que c’est précisément le contraire qu’ont constaté les autorités judiciaires. Il en va de même du harcèlement moral commis à mon encontre que Nestlé a fermement et de manière implacable contestée pendant toute la procédure. Nestlé a non seulement nié tout harcèlement, mais a également nié tout préjudice et soulevé tous les moyens possibles pour réduire à néant toute réparation en ma faveur. L’ampleur du montant auquel Nestlé a été condamné montre indiscutablement que Nestlé a asséné des contre-vérité tout au long de la procédure. Ce montant est en lien avec l’impact irrémédiable sur ma santé des agissements que j’ai subis au sein de Nestlé.

En ce qui concerne l’enquête menée par la Direction de Nestlé et censée avoir été un instrument de protection en ma faveur, je rappelle tout simplement les écrits de la cour d’Appel civil du tribunal cantonal qui l’a qualifié de «simulacre de procédure, et un autre acte de harcèlement».

Il ne faut pas être dupe quant au renoncement de Nestlé à recourir devant le tribunal fédéral puisque l’on sait qu’un arrêt de cette autorité a une résonnance médiatique et juridique bien plus forte qu’un arrêt d’un tribunal cantonal et que Nestlé n’avait vraisemblablement aucune chance de succès devant le tribunal fédéral. Cela évite ainsi tout risque de jurisprudence du tribunal fédéral sur la notion de harcèlement.»

Déclaration de Nestlé
«Nestlé renonce finalement à saisir le Tribunal fédéral, alors que le délai pour faire appel échoit jeudi. Le groupe entend ainsi mettre un terme définitif «à ce litige qui a duré presque 12 ans, ce que la compagnie regrette sincèrement», selon un porte-parole. De plus, le géant agroalimentaire assure «avoir tenté à plusieurs reprises de trouver une solution. Nous espérons sincèrement que Madame Motarjemi pourra aller de l’avant et reprendre le cours de sa vie», ajoute le porte-parole.

La multinationale ne conteste pas le harcèlement. Elle maintient cependant sa position quant à sa réaction dans cette affaire. «Nous pensons que la société a pris des mesures adéquates de protection de la personnalité de Madame Motarjemi lorsque le cas a été porté à notre attention», souligne Nestlé. «Plusieurs postes équivalents ont été proposés et discutés avec elle dans l’optique de trouver une solution. Et nous avons mandaté un enquêteur externe indépendant pour procéder à la vérification de la situation», défend le porte-parole.

Aujourd’hui, la multinationale affirme vouloir mettre un point définitif à cette affaire, relevant au passage qu’il «s’agit d’une affaire de droit du travail, qui ne concerne ni la sécurité alimentaire, ni la qualité de nos produits, qui restent notre priorité numéro un», souligne le porte-parole de Nestlé.»

Mme Mortajemi m’a expliqué dans un courriel récent que dans une interview qui paraitra la semaine prochaine dans Le Temps, elle s’explique sur l’absurdité de la réponse de Nestlé.

Rétrospective sur E. coli O157:H7 et l'héritage du Dr David Theno

Il est utile de se pencher sur le passé des épidémies à Escherichia coli producteurs de shigatoxines (STEC) car cela apporte un éclairage sur les nombreux cas de contamination, notamment en France, chez des enfants ayant consommé des pizzas Buitoni et sur ce qui se peut passer sur le plan judiciaire. Je préfère prévenir le lecteur que l’article est un peu long mais il est passionnant.

«Food Safety Magazine: Rétrospective E. coli O157:H7 et l'héritage du Dr David Theno», source article proposé par Bill Marler le 10 février 2023 dans le Marler Blog.

Article paru dans Food Safety Magazine Février 2023.

L'histoire de l'épidémie de Jack in the Box de 1992-1993 est bien documentée, mais la façon dont E. coli O157:H7 est apparu pour la première fois sur le radar est moins connue.

Article écrit par Andrew Kesler*, directeur général de la conformité des fournisseurs.

Il y a trente ans, en janvier, commençait ce qui est devenu connu sous le nom de «La Crise» dans les restaurants Jack in the Box, lorsque des centaines de clients sont tombés gravement malades après avoir mangé des hamburgers contenant Escherichia coli O157:H7. Cette épidémie - à l'époque, la plus importante de l'histoire des États-Unis – a fait quatre jeunes morts, en a laissé beaucoup d'autres avec des problèmes de santé permanents, et cela a rendu malades plus de 700 personnes et a a presque ruiné Foodmaker Inc., la société mère de Jack in the Box.

Deux ans avant cette épidémie, en 1991, j'ai passé mon premier Thanksgiving loin de chez moi dans un restaurant Jack in the Box à Lompoc, Californie. À l'époque, je n'avais aucune idée que Jack in the Box deviendrait un élément déterminant de ma carrière dans la sécurité des aliments ou que j'aurais même une carrière dans la «sécurité des aliments». Je rejoindrai plus tard l'équipe assurance qualité de Jack in the Box, dirigée par feu le Dr David Theno, un éminent consultant en sécurité des aliments et en contrôle des processus qui a été embauché par Foodmaker pour comprendre pourquoi l'épidémie s'est produite et pour mettre en place des systèmes pour prévenir qu'une autre ne se produise pas.

L'histoire de cette épidémie de cas de maladie séminale est bien documentée, mais la façon dont E. coli O157:H7, l'organisme mortel responsable de l'épidémie chez Jack in the Box de 1992-1993, est apparue pour la première fois sur le radar est moins connue. L'histoire commence une décennie plus tôt, en 1982, avec une autre chaîne de restauration rapide, beaucoup plus importante. Il est important d'examiner cette épidémie antérieure (qui était en fait techniquement deux épidémies distinctes) pour comprendre pourquoi les conséquences de l'épidémie chez Jack in the Box ont été très différentes, ainsi que comment elle a propulsé d'énormes changements dans l'industrie de la viande et au sein des grandes chaînes de restaurants. L'ensemble de l'industrie alimentaire est devenue beaucoup plus forte grâce à la philosophie fondamentale de Dave Theno selon laquelle il ne devrait y avoir aucun avantage concurrentiel pour assurer la sécurité des aliments.

La série «We Were There» des Centers for Disease Control and Prevention a proposé un document sur E. coli O157:H7. Il traite brièvement des épidémies de 1982 et des travaux scientifiques qui ont suivi, et passe en revue en détail l'épidémie chez Jack in the Box et son impact. Il est raconté du point de vue des services réglementaires et de leurs conclusions sur la façon dont cette épidémie a changé l'industrie. Cet article résume mes observations personnelles basées sur plus d'une décennie de travail chez Jack in the Box et près de trois décennies d'expérience dans l'industrie. Bon nombre des projets sur lesquels j'ai travaillé sont le résultat direct d'actions correctives et de réglementations découlant de notre parcours collectif avec E. coli pathogène.

Il y a quarante ans
Les épidémies à E. coli de 1982 ne sont pas bien connues ou discutées dans presque tous les récits historiques de E. coli O157:H7. Le nom de la chaîne de restaurants impliquée est rarement associé aux épidémies de la même manière que Jack in the Box est à jamais lié à l'épidémie de 1992-1993. En 2012, Bill Marler, l'avocat qui représentait de nombreuses victimes de l'épidémie chez Jack in the Box, a demandé (de manière rhétorique) sur son blog : «Et si, en 1982, McDonald's avait été désigné comme la source des 47 cas de maladie à E. coli O157:H7 liés à des hamburgers contaminés dans deux États ?»

L'épidémie chez Jack in the Box se serait-elle produite dix ans plus tard ?» C'est une question à laquelle il est presque impossible de répondre, mais les épidémies de 1982 n'ont pas fait la une des journaux nationaux et n'ont pas non plus provoqué les changements collectifs en matière de sécurité des aliments provoqués par l'épidémie chez Jack in the Box, au cours de laquelle quatre jeunes enfants sont décédés.

Le 24 mars 1983, le New England Journal of Medicine a publié l'article intitulé «Hemorrhagic Colitis Associated with a Rare Escherichia Coli Serotype».

L'article résume les résultats de l'enquête de deux épidémies, l'une dans le Michigan et l'autre dans l'Oregon, qui ont rendu malades «au moins» 47 personnes au début de 1982. L'aliment courant dans les épidémies était un hamburger avec trois ingrédients communs d'une seule chaîne de restauration rapide, galette de bœuf, cornichons et oignons réhydratés. Bien que l’article n'ait pas cité le restaurant associé à l'épidémie, une seule chaîne de restauration rapide à l'époque avait des restaurants dans le Michigan et l'Oregon, cuisinait des galettes de hamburger sur des grils plats et utilisait des oignons réhydratés.

Un bref article de presse sur les épidémies, probablement enfoui dans les dernières pages du Washington Post, a été publié le 9 octobre 1982. Il liait McDonald's à ce qui était alors une «maladie intestinale rare... qui peut être liée à des hamburgers insuffisamment cuits». Cristine Russell, écrivant pour le Washington Post, a fait remarquer que le siège social de McDonald's à Oak Brook, dans l'Illinois, «... qui a soutenu que le lien avec ses hamburgers pourrait être une anomalie statistique et a déclaré que les procédures de cuisson requises par l'entreprise garantissaient la sécurité sanitaire des produits». En défense, le vice-président de McDonald's, Edward Schmitt, a fait des remarques sur le petit nombre de cas de maladie comme des «incidents isolés». Il a en outre fait remarquer que la chaîne avait servi près de deux milliards de hamburgers depuis l'apparition des cas de maladie. Dans ce contexte, avec peu de connaissances sur la capacité de E. coli à rendre les humains malades (et de les tuer), il est compréhensible de qualifier cet événement d'«anomalie».

Bien que McDonald's ait publiquement déclaré que les épidémies étaient une anomalie, l'entreprise a pris des mesures pour enquêter sur le micro-organisme et les nouvelles technologies de cuisson pour le combattre - un exemple très précoce de grandes entreprises de restauration commerciale parrainant et promouvant d'importantes recherches sur la sécurité des aliments en partenariat avec le gouvernement et l'industrie. Après les épidémies de 1982, McDonald's a embauché le professeur de microbiologie de l'Université du Wisconsin, le Dr Michael Doyle, qui a recommandé de nouveaux grils à clapet (entre autres actions) qui feraient cuire les galettes de viande bovine hachée simultanément des deux côtés et qui ne s'ouvriraient pas avant la fin du temps de cuisson. Les temps de cuisson et les températures ont été soigneusement étudiés pour s'assurer que les micro-organismes dangereux ont été détruits pendant le processus de cuisson. Petit aparté : j'étais directeur adjoint dans un restaurant McDonald's à la fin des années 1980 et j'ai aidé à installer les nouveaux grils à clapet. Il m’a fallu plus de 30 ans avant de comprendre pourquoi nous sommes passés à cet équipement. À l'époque, je supposais que c'était pour cuire les galettes plus rapidement et augmenter la «rapidité de service».

Pourtant, l'incident de 1982 est resté un article de presse obscur, en dernière page, et les contrôles mis en œuvre pour assurer la sécurité des produits visaient à résoudre le problème principalement par des étapes de maîtrise dans les restaurants. Ce serait un résultat entièrement différent dix ans plus tard, après la mort de quatre enfants à cause de hamburgers insuffisamment cuits servis par la cinquième chaîne de restauration rapide du pays. La nouvelle est devenue nationale avec le logo Jack in the Box partout, ce qui a attiré l'attention du public, de l'industrie, des législateurs et, plus important encore, de Washington, D.C. Il était impossible de garder le Jack à l'intérieur de cette boîte.

Il y a trente ans
Dave Theno a raconté l'histoire à plusieurs reprises. Pour lui rappeler pour qui il travaillait réellement, quel que soit le logo de l'entreprise sur son chèque de salaire, il portait dans son portefeuille une photo de Lauren Rudolph, six ans. Il montrait souvent la photo aux personnes lorsqu'il expliquait pourquoi il recommandait une ligne de conduite particulière pour protéger la santé publique. «Lauren est celle que nous protégeons. Lauren, et les enfants qu'elle représente, sont à qui je dois rendre compte», disait-il. Elle a été la première victime de l'épidémie de Jack in the Box, et Dave a bien connu sa famille à travers l'épreuve.

L'histoire de «La Crise», comme on l'a connue chez Foodmaker, a été savamment étudiée et racontée par Jeff Benedict dans son livre de 2011, Poisoned. Les principales parties de l'épidémie avaient déjà été expliquées, mais ce que le récit inconfortable enseigne est la façon dont le syndrome hémolytique et urémique (SHU), une infection du tube digestif causée par E. coli O157:H7, détruit les globules rouges dans le corps, provoquant une douleur extrême dans les reins et d'autres organes lorsqu'ils commencent à défaillir. Que de si jeunes enfants puissent mourir d'une mort aussi douloureuse – rien qu'en mangeant un hamburger – était inimaginable pour moi.

Riley Detwiler, l'une des quatre jeunes victimes, n'a même pas mangé de hamburger. Il est simplement entré en contact avec un autre enfant dans une garderie qui avait mangé de la viande bovine contaminée, ce qui témoigne de la virulence de E. coli O157:H7, se propageant même par contact croisé entre les personnes. [j’ai lu que cela a été aussi le cas avec les pizzas Buitoni -aa.]

Au début de 1993, l'épidémie était devenue une nouvelle nationale, avec un président nouvellement élu appelant les parents des victimes et promettant de faire plus pour garantir la sécurité des aliments. Les législateurs et l'industrie étaient devenus plus disposés à accepter des changements dans la façon dont les aliments étaient inspectés. L'attention incessante des médias nationaux, combinée à des litiges civils entraînant des règlements de plusieurs millions de dollars pour les victimes, a créé un environnement qui exigeait des changements importants de la part de l'industrie et des législateurs.

Le plan d'action que Dave a entrepris lorsqu'il est arrivé chez Foodmaker, d'abord en tant que consultant, puis à temps plein en tant que vice-président, était de déterminer où dans le processus, de la ferme à la fourchette, des contrôles pourraient être mis en œuvre et mesurés pour assurer la sécurité sanitaires des hamburgers. Son objectif était de donner à l'équipe de direction des paramètres spécifiques à surveiller en tant qu'indicateur de la santé de leur programme de sécurité des aliments, afin qu'ils puissent prendre des mesures immédiates si le système devenait incontrôlable.

Dave s'est rendu compte que la cuisson complète des hamburgers ne résolvait que la moitié du problème. Sachant que l'organisme pathogène peut être transféré par contact avec des mains nues, il a fallu une étape de réduction supplémentaire pour résoudre l'autre moitié du problème. Il a mis en place une règle «pas de contact des mains nues» avec des galettes crues de hamburger, ce qui était du jamais vu à l'époque pour une grande chaîne de restaurants. Former les employés du gril à utiliser des pinces plutôt que leurs mains pour séparer les galettes congelées puis les placer sur le gril n'était pas une mince affaire, surtout lorsqu'il était courant d'en placer jusqu'à 12 galettes sur le gril en même temps.

Dans les restaurants, Dave a mis en place un «retournement final et un contrôle visuel» obligatoires de chaque galette avant de la retirer du gril pour s'assurer que la galette n'était pas rose après le temps de cuisson prévu. (Contrairement à McDonald's, qui avait beaucoup d'argent à investir dans des grils à clapet, Foodmaker n'avait pas un tel capital disponible à l'époque. Il n'était même pas certain que l'entreprise survivrait.) La combinaison de la vérification de chaque galette et de la surveillance des températures de la surface du gril et de la partie interne de la galette plusieurs fois par jour garantissaient un contrôle continu du processus de cuisson.

«Aucun contact avec des mains nues» et «retournement final et contrôle visuel» sont devenus les points critiques pour leur maîtrise (CCP) fondamentaux dans ce qui a été le premier programme HACCP créé pour un restaurant ; et ces deux étapes ont été observées et documentées par la direction du restaurant plusieurs fois dans la journée. Des procédures ont également été mises en place pour vérifier le processus de cuisson en mesurant la température des galettes cuites plusieurs fois par jour. Cela est devenu un autre points critiques pour leur maîtrise (CCP) dans le programme HACCP du restaurant. Le respect de ces étapes du processus, ainsi que de nombreuses autres, était désormais mesuré et est devenu une mesure permettant aux équipes opérationnelles de Jack in the Box de surveiller la santé du système de sécurité des aliments de leur chaîne de restaurants.

Dave a tout aussi rapidement tourné son attention vers l'approvisionnement en galettes de hamburger, adoptant une approche méthodique pour mettre en œuvre HACCP depuis les parcs d'engraissement et l'abattage jusqu'aux opérations de viande bovine hachée qui produisaient les galettes de hamburger. Peu d'«opérations de hachage» à l'époque étaient prêtes à mettre en œuvre un nouveau programme de surveillance microbienne pour tester à la fois la viande entrante et les galettes de hamburger hachées crues pour E. coli O157:H7. Cependant, Texas American et CTI Foods ont tous deux signé pour adopter le nouveau système; et en mettant en œuvre le programme, l'industrie dans son ensemble en a appris beaucoup plus sur la façon dont les E. coli pathogènes pénètrent dans le système d'approvisionnement et de production.

Au fil du temps, des étapes supplémentaires de réduction de l'abattage et de la fabrication ont été utilisées pour réduire la charge microbienne. Bien que les analyses aient été utilisés pour exclure les viandes contaminées, l'intention du programme d’analyses était d'apprendre et d'apporter des améliorations continues aux contrôles du processus. La clé du succès du programme d’analyses était la définition et le suivi des «lots» dans le processus pour permettre la traçabilité et une rotation appropriée. Les résultats des analyses microbiologiques de l'approvisionnement en viande bovine sont devenus une mesure déterminante pour l'équipe de direction de Jack in the Box.

L'une des actions les plus significatives que Dave a prises a été de partager ouvertement le programme d’analyses et les contrôles avec toute personne intéressée dans l'industrie, y compris les chaînes de restaurants concurrentes. Il croyait fermement qu'il n'y avait pas d'avantage concurrentiel en matière de sécurité des aliments. Nous avons appris au fil du temps qu'une éclosion de maladies d'une entreprise peut avoir des effets négatifs sur tout un segment de l'industrie alimentaire, beurre d'arachide, tomates, cantaloups et laitue, pour n'en citer que quelques-uns.

Maîtrise de la qualité et du processus par HACCP
Avant de rejoindre Jack in the Box, Dave Theno avait déjà été le pionnier de l'utilisation du HACCP et de ses concepts pour parvenir à une réduction microbienne grâce à la «maîtrise des processus». Avant Jack in the Box, Dave avait bâti une entreprise de conseil très prospère en travaillant avec des clients qui souhaitaient mettre en œuvre la maîtrise des processus via HACCP dans leur organisation. Au début de sa carrière, il a démontré qu'en identifiant et en surveillant les étapes clés du processus d'abattage de la volaille, le taux de contamination par Salmonella dans les carcasses réfrigérées pouvait être réduit de 35% à environ 1 à 2%. Même pour les processus où il n'y a pas d'«étape de destruction», comme l'abattage, l'identification des étapes clés du processus qui peuvent être contrôlées et mesurées, puis leur mesure, permet d'obtenir une réduction microbienne grâce à la visibilité des données et à l'amélioration continue du processus. C'est exactement ce qui s'est passé à la suite des analyses microbiologiques qui ont été mises en œuvre pour l'approvisionnement en viande bovine hachée de Jack in the Box. Les données ont permis d'examiner les processus plus en amont dans la chaîne d'approvisionnement et d'identifier les domaines où des technologies de contrôle microbiologique supplémentaires aideraient à réduire le niveau global de E. coli. Par conséquent, au cours des trois décennies écoulées depuis la mise en œuvre du programme, l'approvisionnement américain en viande bovine hachée est beaucoup moins exposé aux E. coli pathogènes et les maladies associées à la viande bovine hachée ont été considérablement réduites.

Dans les années 1980 et au début des années 1990, tout le monde au Département américain de l'agriculture (USDA) ou dans l'industrie n'était pas partisan de la maîtrise des processus par l'utilisation du HACCP, même si la National Aeronautics and Space Administration (NASA) l'avait utilisé avec succès pour assurer la sécurité des aliments de leurs astronautes dans l'espace. Le processus traditionnel des inspecteurs gouvernementaux inspectant visuellement et estampillant chaque carcasse d'animal pour déclarer la sécurité sanitaire était enraciné et considéré par de nombreux acteurs de l'industrie de la viande et du gouvernement comme un succès. Après tout, raisonnaient les détracteurs du HACCP, le consommateur était sûrement assez responsable assez pour savoir bien cuire la viande crue avant de la manger. Les partisans du HACCP soulignaient toutefois à juste titre que la contamination microbienne pathogène ne peut être observée par une inspection visuelle traditionnelle. Un nouveau système de contrôle pendant le processus d'abattage et de la fabrication était nécessaire pour améliorer l'inspection visuelle. L'épidémie de Jack in the Box a adouci les attitudes envers le HACCP, créant une fenêtre d'opportunité pour le changement et, en juillet 1996, un règlement final, Pathogen Reduction; Hazard Analysis and Critical Control Points (HACCP) Systems a été publié dans le Federal Register. C’est devenu connu sous le nom de «Mega Reg» de l'USDA. Le livre de Timothy Lytton de 2019, Outbreak, donne un aperçu supplémentaire de l'histoire derrière l'élaboration de ce règlement.

En 1996, je venais de débuter ma carrière dans l'industrie agro-alimentaire en tant qu'ingénieur qualité et contrôle des procédés chez Hormel Foods. À l'époque, Hormel utilisait un programme de contrôle de la qualité globale (Total Quality Control) dans ses usines de fabrication pour s'assurer que ses processus étaient sous contrôle et produisaient des produits sûrs et cohérents. Chaque étape du processus était clairement définie et le programme décrivait comment chaque étape du processus devait être surveillée et par qui. Chaque page du document de plus de 60 pages a été approuvée et estampillée par le Food Safety and Inspection Service (FSIS) de l'USDA. Toute modification, aussi mineure soit-elle, devait être examinée et approuvée par l'USDA. Ainsi, l'USDA a approuvé le programme dans le cadre duquel l'usine fonctionnait et a régulièrement inspecté les activités individuelles approuvées requises par le programme, servant essentiellement de contrôle de la qualité. Si le programme nécessitait de retirer 60 boîtes de piment après le processus de cuisson et de les incuber, l'inspecteur de l'USDA créerait un rapport de déficience du processus (le prédécesseur des rapports de non-conformité d'aujourd'hui) s'il n'en avait compté que 59 dans l'incubateur. Le rôle des ingénieurs du contrôle qualité et des processus chez Hormel était de s'assurer que les processus étaient en permanence sous contrôle et de les remettre sous contrôle si nécessaire. Le rôle de l'inspecteur de l'USDA était d'inspecter l'usine et ses processus et d'informer la direction de l'usine lorsque des lacunes dans les processus approuvés étaient observées.

La mise en œuvre du HACCP a largement confié le développement et la surveillance des systèmes de contrôle des processus aux usines de fabrication, réduisant théoriquement le fardeau des services réglementaires. Les usines ont développé leurs programmes de contrôle en utilisant les principes du HACCP, et le nouveau rôle de l'USDA était de s'assurer que l'usine appliquait son système HACCP, qui était plus une approche d'assurance qualité que de contrôle qualité. À l'époque, j'étais chargé de rédiger les nouveaux plans et de les mettre en œuvre au niveau de l'usine. Pour les entreprises qui ont utilisé des plans de contrôle de la qualité globale, le passage au HACCP a été relativement facile puisque les contrôles du processus étaient déjà définis. Pour de nombreuses petites entreprises, cependant, la mise en œuvre du HACCP a été un voyage long et difficile.

L'épidémie de Jack in the Box a propulsé toute une industrie vers une nouvelle façon de surveiller les contrôles des processus dans les usines de fabrication et a fait passer le rôle de l'USDA dans la fabrication alimentaire du contrôle à la surveillance, un système qui se poursuit aujourd'hui.

Trente ans plus tard
L'histoire de E. coli O157:H7 ne peut être racontée sans discuter du Dr Dave Theno et de ses contributions à la sécurité de l'approvisionnement alimentaire de notre pays.

Les causes profondes de l'épidémie de Jack in the Box ont largement façonné de nombreuses philosophies de Dave en matière de sécurité des aliments. Gérez les risques aussi loin que possible dans la chaîne d'approvisionnement, mettez en œuvre des programmes d’analyses microbiologiques lorsque les données peuvent être utiles pour favoriser l'amélioration continue du processus, concevez des processus solides et assurez-vous qu'ils sont sous contrôle de «la ferme à l'assiette». Les enseignements tirés de son travail de début de carrière dans la mesure du contrôle des processus restent universels. Chaque processus, même les processus sans étapes pour réduire ou éliminer les bactéries dangereuses, peut être mesuré à des étapes clés. Ces données de mesure peuvent être utilisées pour surveiller le contrôle du processus et l'amélioration continue du processus.

Enfin, «vous obtenez ce que vous démontrez que vous voulez.» Cela signifie qu'en tant que leader, vos employés réaliseront ce qui est important pour vous - pas nécessairement ce que vous dites, mais ce que vous démontrez est important à travers vos actions, ce que vous mesurez et la façon dont vous reconnaissez et récompensez publiquement les performances des employés. Ces actions sont des concepts importants dans le débat actuel sur la création de la culture de la sécurité des aliments au sein des organisations. En tant que vice-président des opérations, si votre première question à votre équipe de management de l'usine concerne le taux d'exécution des instructions, l'efficacité de la ligne de production ou les coûts de main-d'œuvre, que vous avez clairement établi, ce qui vous préoccupe avant tout. Si votre première question concerne les résultats de la surveillance environnementale, la conformité des points critiques pour la maîtrise (CCP) ou les plaintes des clients signalées, alors vous démontrez que la sécurité des aliments est votre priorité absolue. La direction de l'usine est en mesure de suivre toutes ces mesures, bien sûr, mais l'ordre dans lequel vous posez des questions à leur sujet communique vos priorités en tant que leader. Ces priorités deviendront les priorités de votre équipe.

Lors d'un service commémoratif pour Dave Theno en 2016, Bill Marler, l'avocat qui a poursuivi Foodmaker et obtenu des règlements substantiels au nom de ses clients, a parlé de Dave et de son héritage. Pour toute autre personne, il aurait pu être étrange que l'avocat qui a poursuivi l'entreprise pour laquelle vous travailliez assiste à votre service commémoratif, mais pas pour Dave. Dans les années qui ont suivi l'épidémie, il a maintenu une communication ouverte avec Bill Marler. Pas dans le sens de «soit encore plus proche des tes ennemis», mais parce que leur objectif collectif, même en travaillant de part et d'autre de la clôture, était le même : rendre l'approvisionnement alimentaire aussi sûr que possible. Dave a vraiment vécu selon ses paroles, il travaillait pour Lauren Rudolph et tous ceux qu'elle représentait.

Dave était un leader d'opinion très respecté dans le domaine de la sécurité des aliments, connu des services réglementaires, de l'industrie et des avocats spécialisés en contentieux. Il a formé une génération de leaders de la sécurité des aliments pour continuer à travailler vers un approvisionnement alimentaire plus sûr en appliquant la science et le bon sens au contrôle des processus et à la prise de décision grâce à l'analyse des données. Sa personnalité plus grande que nature a également contribué à élever le rôle et la visibilité de la sécurité des aliments en tant que profession. Lorsque j'ai commencé ma carrière dans l'industrie alimentaire dans les années 1990, c'était au service contrôle qualité; les services de sécurité des aliments n'existaient pas encore. Aujourd'hui, nous continuons à voir de plus en plus de fabricants de produits alimentaires dotés d'un cadre supérieur dévoué et expérimenté pour diriger une fonction de sécurité des aliments indépendante. Les entreprises les plus progressistes ont cette position sur la première ligne de leur organigramme, avec les ventes, le marketing, les opérations, la recherche et le développement, la chaîne d'approvisionnement, les ressources humaines, le juridique et la finance. Le rôle n'est pas enfoui sous les responsabilités de quelqu'un d'autre, telles que les opérations ou la chaîne d'approvisionnement.

Pour ceux d'entre nous qui fabriquent et servent des aliments pour la consommation humaine (et en particulier ceux d'entre nous qui ont la «sécurité des aliments» dans nos intitulés de poste), nous devrions tous porter une photo de Lauren Rudolph pour nous rappeler pour qui nous travaillons en fin de compte. et qui nous représentons. Si elle n'avait pas mangé de hamburger, Lauren aurait eu 37 ans cette année et Riley Detwiler, qui n'a pas mangé de hamburger, mais est quand même décédé, aurait eu 32 ans.

*Andrew Kesler a travaillé pour le Dr David Theno chez Jack in the Box, puis au sein de la société de conseil en sécurité des aliments de Dave, Grey Dog Partners, qu'il a fondée avec sa femme, Jill, après avoir pris sa retraite de Jack in the Box en tant que directeur de la sécurité des aliments. Le travail de la vie de Dave était la sécurité des aliments, qu'il a habilement poursuivie jusqu'à s>a toute fin. Andrew Kesler est directeur général de la conformité des fournisseurs pour le premier producteur américain de salades et d'aliments réfrigérés et de santé Auparavant, il gérait les programmes de sécurité des aliments des fournisseurs pour les restaurants McDonald's, Jack in the Box et Qdoba. Il a également fourni un soutien à la gestion des fournisseurs chez Subway et à d'autres clients dans le cadre de l'équipe de conseil en sécurité des aliments de Dave Theno Grey Dog Partners. M. Kesler a commencé sa carrière dans la fabrication de produits alimentaires chez Hormel Foods après avoir servi dans l'U.S. Air Force.

NB : Sur ce sujet, on lira aussi sur le blog, Décès du Dr Lee W. Riley, épidémiologiste et pionnier dans la découverte du rôle de E. coli O157:H7 dans la diarrhée sanglante liée à de la viande hachée bovine insuffisemment cuite.

Les insectes comme denrée alimentaire, c'est possible mais il faut une autorisation

Nos amis suisses de l’OASV nous expliquent ce qu’il en est dans un document du 27 janvier 2023 : «Les insectes comme denrée alimentaire».

Dans certaines cultures, la consommation d’insectes est autorisée. En Suisse, les insectes sont considérés comme des nouvelles sortes de denrées alimentaires. Quelques espèces sont commercialisées depuis 2017 mais leur mise sur le marché doit respecter des exigences spécifiques.

Mise sur le marché de la poudre de grillon domestique partiellement dégraissée
Le 3 janvier 2023, l'Union Européenne a autorisé la mise sur le marché de la poudre partiellement dégraissée d'Acheta domesticus (grillon domestique) en tant que nouvel aliment (novel food). Cela signifie que cette poudre d’insectes peut être utilisée dans la fabrication de certaines denrées alimentaires commercialisées en Suisse.

Voici quelques précisions en lien avec cette autorisation :
- La poudre partiellement dégraissée d'Acheta domesticus a été autorisée car son évaluation a démontré qu’elle ne présentait aucun risque pour la santé humaine.
- La poudre d’insectes autorisée peut seulement être utilisée pour les catégories de denrées alimentaires autorisées et en quantité limitée.
- Si la poudre d'insectes est utilisée dans la fabrication d’une denrée alimentaire, la liste d’ingrédients doit mentionner : «Poudre partiellement dégraissée d'Acheta domesticus (grillon domestique)».
- L'étiquette doit indiquer clairement que cet ingrédient peut provoquer des réactions allergiques chez les personnes allergiques aux crustacés, aux coquillages et à leurs produits, ainsi qu'aux acariens.
- Les insectes étant considérés comme des aliments d'origine animale, une denrée alimentaire qui contient de la poudre d'insectes ne peut pas porter l'indication vegan, végétalien, ni même végétarien.

Vous trouverez dans le doument intégral de plus amples informations sur les espèces d'insectes autorisées en Suisse et sur les exigences relatives à leur commercialisation en tant que nouvel aliment.

Insectes, des «novel food»
Les insectes sont considérés comme des nouvelles sortes de denrées alimentaires et leur commercialisation est soumise aux mêmes exigences que celles-ci. C'est-à dire que pour pouvoir être commercialisés, ils doivent être autorisés.