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samedi 28 octobre 2023

Un fromage au lait de chèvre de France soupçonné d'être à l'origine d'une épidémie de cryptosporidiose en Suède

Un fromage au lait de chèvre de France soupçonné d'être à l'origine d'une épidémie de cryptosporidiose en Suède, selon une notification au RASFF de l’UE par la Suède le 27 octobre 2023.

La fiche de danger microbiologique transmissible par les aliments de l’Anses sur Cryptosporidium spp. rappelle qu’en 2017, une épidémie dans l’ouest de la France a été reliée à la consommation de fromage blanc biologique au lait non pasteurisé.

Etait-ce le cas pour ce fromage de chèvre ? Pas d’information à ce jour dans la notification.

Il est noté dans cet article que «La cryptosporidiose humaine apparait largement sous-diagnostiquée en France. Les prescriptions de routine pour le diagnostic biologique de diarrhées persistantes devraient être améliorées en spécifiant une recherche parasitologique (dont cryptosporidies).»

Ainsi dans cette épidémie de gastro-entérite, qui n’était pas qu’une gastro hivernale, ni une suspicion d’intoxication alimentaire, «Le génotype hypertransmissible C. parvum IIaA15G2R1, considéré comme zoonotique, a été retrouvé dans des échantillons de fèces de veaux à proximité du laboratoire de fabrication de fromages.»

A suivre ...

vendredi 7 juillet 2023

Fromages de chèvre et/ou de brebis et une suspicion de présence de Listeria : des rappels qui n’en finissent plus, façon puzzle

Contrairement au communiqué de la préfecture de Haute-Corse et accessoirement de l’entreprise, qui informait de rappels dès le 16 juin 2023,  RappelConso signalait que des fromages ont aussi été rappelés le 14 juin 2023.

Ce que ne dit pas le communiqué de la préfecture, ni celui de l’entreprise, c’est qu’il y a eu dans un passé très récent d’autres rappels de fromages :

- Le 2 juin 2023, rappels de pâte molle de chèvre 250gpâte molle de chèvre 350g et tomme Marmanu 700g pour suspicion de Listeria monocytogenes.

- Le 19 mai 2023, rappels de pâte molle de brebis 350g et de pâte molle de brebis 350g pour contamination par Listeria monocytogenes.

Un nouveau rappel de fromage de brebis Le Ghisoni a eu lieu le 21 juin 2023. et publication d'une notification d'alerte au RASFF de l'UE par l'Allemagne le 22 juin pour la présence de Listeria monocytogenes dans des fromages de brebis de France.

On apprend dans cette notification que le produit n’a été distribué qu’en Allemagne  et France. Puis, on apprend qu’il a été aussi distribué en Italie, Pays-Bas, Suisse. La notification ne rapporte toujours pas que le produit a été aussi distribué en Belgique.

En effet, l’AFSCA de Belgique informe le 30 juin du rappel de fromages de chèvre de la marque Ottavi en raison de la présence possible de Listeria monocytogenes.

Rappelons aussi que le 23 jjuin 2023, des fromages de brebis ont été importés mais non distribués aux États-Unis …

Enfin le 3 juillet, 20e rappel de fromages avec ce rappel de fromages de chèvre/brebis de la fromagerie Ottavi en libre service et à la coupe, pour cause de suspicion de Listeria.

On croyait donc en avoir fini, mais voici que des fromages sont signalés une nouvelle fois aux Etats-Unis. Estancia Holdings, de Cumming, Géorgie, rappelle le 5 juillet (source FDA) un lot de tomme Corse de brbis de marque Ottavi en raison d'une contamination potentielle par Listeria monocytogenes.

Le 22 juin 2023, Estancia Holdings a été informée par le fournisseur français qu'une tomme qu'il a reçue pourrait être contaminée par Listeria monocytogenes (voir photo).

Un cas du lot affecté a été importé la semaine du 9 juin et il a été vendu la même semaine à un distributeur à Portland, Oregon.

Encore un rappel façon puzzle ...

samedi 1 avril 2023

Les STEC et des produits laitiiers au lait cru de chèvre, une très mauvaise série

Dans la gestion des alertes alimentaires, le ministère de l’Agriculture nous dit entre au
tr
es choses :

la réalisation d’inspections dans les entreprises concernées et de prélèvements d’échantillons de produits finis ou de matières premières.

Je crois sans risque de me tromper que certaines entreprises ont dû avoir de fréquentes inspections ces derniers temps, mais sait-on jamais ?

Les cas évoqués ci-après concernent 12 rappels de différents produits laitiers à base de lait cru de chèvre en 6 mois pour cause de présence de Escherichia coli producteurs de shigatoxines (STEC).

Voici le détail,
- 21 octobre 2022, rappel de faisselle de chèvre au lait cru.
- 24 octobre 2022, rappel de faisselle de chèvre au lait cru.
- 8 novembre 2022, rappel de fromage de chèvre sec.
- 8 novembre 2022, rappel de chèvre frais.
- 8 novembre 2022, rappel de Cabrifrais.
- 8 novembre 2022, rappel de chèvre frais.
- 31 mars 2023, rappel de chèvre sec.
- 1er avril 2023, rappel de Cabrifrais.
- 1er avril 2023, rappel de chèvre frais.
- 1er avril 2023, rappel de chèvre frais.
- 1er avril 2023, rappel de faisselle de chèvre.

Personnellement, je suggérerais aux producteurs concernés de pasteuriser leur lait parce des rappels aussi fréquents, ce n’est pas bon signe pour la santé de leur entreprise.

Dans le cas contraire, je conseille fortement la lecture d’un document d’aide méthodologique : Surveiller STEC hautement pathogènes en filière de fabrication de fromages au lait cru de 2022 (source plateforme de surveillance de la chaîne alimentaire).

Par contre si vous voulez savoir en tant que consommateurs, si des inspections ont lieu sur site, contentez-vous des avis de rappel, le reste est secret défense !

Mise à jour du 4 avril 2023
Voici, le 4 avril, selon RappelConso, 7 nouveaux rappels de fromage de chèvre au lait cru pour cause de présence de Escherichia coli producteurs de shigatoxines (STEC).
On a eu droit enfin, ce 4 avril, à une notification au RASFF de l’UE, 2023.2283par la France de la présence de Escherichia coli producteurs de shigatoxines (STEC) dans du fromage de chèvre de France.

jeudi 6 octobre 2022

Une étude détaille l'étendue de l'encéphalite à tiques d'origine alimentaire en Europe

Le blog vous a proposé le 5 octobre un document de l’Anses sur «Encéphalite à tiques : remonter à l'origine des cas de transmission via le fromage».

Voici en complément, «Une étude détaille l'étendue de l'encéphalite à tiques d'origine alimentaire en Europe», source article de Joe Whitworth paru le 6 octobre 2022 dans Food Safety News, complété par mes soins -aa.

Des programmes de vaccination et des campagnes de sensibilisation du public pourraient réduire le nombre de personnes touchées par le virus de l'encéphalite à tiques, qui est parfois d'origine alimentaire, selon des chercheurs.

L'encéphalite à tiques (TBE) est une infection virale du système nerveux central. Les humains contractent principalement la TBE par des piqûres de tiques, mais cela est parfois contracté en consommant des produits laitiers crus non pasteurisés provenant d'animaux affectés.

Des chercheurs israéliens ont analysé des cas de TBE d'origine alimentaire, principalement en Europe centrale et orientale. La plupart des infections ont été signalées pendant les mois les plus chauds d'avril à août et étaient associées à des produits laitiers crus non pasteurisés de chèvre. La période d'incubation médiane était courte à 3,5 jours et les maladies neuroinvasives étaient courantes, selon l'étude publiée dans Emerging Infectious Diseases, Systematic Review and Meta-analysis of Foodborne Tick-Borne Encephalitis, Europe, 1980-2021.

Au total, 19 études ont été incluses, décrivant 410 patients à travers l'Europe. Les pays ayant signalé des cas de 1980 à 2021 comprenaient la Slovaquie, la République tchèque, la Pologne, la Hongrie, l'Estonie, l'Allemagne, la Croatie, l'Autriche, la Russie et la Slovénie.

Détails sur les patients
Sur 273 patients disposant de données sur la saison d'infection, 243 ont été infectés d'avril à août et 30 de septembre à novembre. Les patients étaient âgés de 1 à 85 ans. La plupart des cas se sont produits au cours des mois qui correspondent à la saison des tiques en Europe.

Sur les 120 patients dont le statut vaccinal a été enregistré, un seul était vacciné. Cette personne a eu son dernier rappel de vaccination contre le virus de la TBE (TBEV) plus de 15 ans avant l'infection.

Chez 232 patients, l'investigation épidémiologique a révélé une consommation de lait cru de chèvre ou de fromage, du lait cru de brebis ou du fromage a été signalé dans 88 cas, la consommation de lait de vache non pasteurisé dans 23 cas et la consommation d'un mélange de produits laitiers non pasteurisés dans sept cas.

Pour 124 des 138 patients pour lesquels la période d'incubation a été signalée, elle était inférieure à deux semaines. Pour 14 patients qui ont signalé la chronologie exacte de l'infection, la période d'incubation moyenne était de 3,5 jours.

Bien que la TBE soit une maladie à déclaration obligatoire en Europe, presque tous les cas sont survenus dans des régions spécifiques. Cela pourrait s'expliquer par les habitudes de consommation de produits laitiers non pasteurisés dans différentes régions, mais les données sur la fréquence de cette consommation dans diverses parties de l'Europe font défaut, ont dit les chercheurs.

TBE : Un problème de santé publique
Une épidémie récente s'est produite dans le département de l'Ain en France, où le TBEV n'avait pas été détecté auparavant. Les investigations ont révélé que tous les 43 patients sauf un avaient consommé du fromage de chèvre non pasteurisé d'un producteur local.

Les chercheurs ont dit qu'il pourrait y avoir un sous-diagnostic, une sous-déclaration, des variations en raison du faible nombre de patients impliqués dans certains rapports d'épidémie et des investigations épidémiologiques incomplètes.

Une autre explication pourrait être la variabilité de la charge virale des produits laitiers infectés car la dose exacte de TBEV requise pour une infection humaine par voie orale est inconnue et pourrait être différente de la charge virale pour une infection clinique par piqûre de tique.

La transmission alimentaire de la TBE est rare, mais peut provoquer des épidémies affectant de nombreuses personnes, ce qui en fait un problème majeur de santé publique. Une telle transmission pourrait être éliminée par des campagnes d'éducation qui encouragent les gens à ne consommer que des produits laitiers pasteurisés et par la vaccination, ont dit les chercheurs.

Dans leur conclusion, les chercheurs notent,

 ... le TBE d’origine alimentaire en Europe est signalé principalement dans une région géographique bien définie pendant la saison des tiques, avec quelques signalements en Russie et récemment en France. Nous avons trouvé un taux d'attaque de la TBE d’origine alimentaire variable, qui pourrait être le résultat de nombreux facteurs, y compris la variabilité de la charge virale dans les produits laitiers infectés, compatible avec un rapport précédent. Les caractéristiques cliniques de la TBE d’origine alimentaire sont similaires à celles rapportées pour le TBE acquis par des piqûres de tiques, et des symptômes spécifiques su système nerveux central (SNC) se développent chez près de 40% des personnes infectées. La vaccination semble être efficace pour prévenir la TBE d’origine alimentaire. Nos résultats pourraient aider à sensibiliser les épidémiologistes, les cliniciens, les responsables de la santé publique et le public des zones endémiques à la TBE d’origine alimentaire. Les programmes de vaccination et les campagnes de sensibilisation du public pourraient réduire considérablement le nombre de patients touchés par cette infection potentiellement grave du SNC.

Une autre étude, publiée dans International Journal of Molecular Sciences, a fait état d'une épidémie familiale de cas de maladie, initialement évocatrice d'une infection interhumaine, au début de l'été en Autriche.

Le patient index était un homme de 39 ans, qui a été hospitalisé avec une histoire de quatre à cinq jours de maux de tête et de forte fièvre, avec des malaises et des étourdissements précédents pendant un à deux jours. Son fils de 14 ans et sa femme de 41 ans ont également été admis respectivement trois et huit jours plus tard. Ils ont ensuite sortis de l’hôpital avec des maux de tête résolutifs et sans fièvre.

Après interrogatoire, il a été constaté que la famille avait du lait de chèvre non pasteurisé provenant d'une ferme de Braunau en Haute-Autriche, deux semaines avant l'apparition des symptômes. L'encéphalite à tiques a été diagnostiquée suite à la consommation de lait de chèvre et le virus a été détecté dans des échantillons de lait congelé.

L'homme et sa femme n'étaient pas vaccinés. Le fils de 14 ans avait reçu trois doses du vaccin, mais pas selon le calendrier de vaccination recommandé. Un autre garçon de 7 ans n'a pas été infecté bien qu'il ait bu du lait et qu'il n'ait pas été vacciné.

mercredi 29 décembre 2021

Retour sur un rappel de fromages de chèvre pour cause de présence de Listeria: 50 000 euros de pertes et 2 tonnes fromages détruits

Meilleurs voeux à tous les lecteurs et merci à vous d’agir pour le rétablissement de l'accès aux anciens articles du blog ...

«Deux-Sèvres : l'épisode de listeria a marqué la fromagerie La Revalière du Tallud», source La Nouvelle République du 29 décembre 2021.

La fromagerie La Revalière, installée depuis quarante ans dans le lieu-dit du même nom, au Tallud, a subi à l'automne 2021 un rappel de produits. En cause : une infection du lait cru, et donc des fromages, à la listeria.

Au début de l’automne, la fromagerie La Revalière du Tallud a fait l’actualité. Mais certainement pas pour une raison qui laissera un bon souvenir à ses dirigeants. Le mercredi 3 novembre 2021, le site gouvernemental Rappel Conso annonçait un rappel des produits confectionnés au sein de la fromagerie de Gâtine.  Alice Belegou, salariée et future repreneuse de l’entreprise de ses beaux-parents, revient sur cet épisode fâcheux.

6 à 30% des animaux d'élevage hébergent cette bactérie
«Nous avons appris le 25 octobre par la direction des services vétérinaires que nos produits étaient touchés par la listeria, rappelle-t-elle. Ils nous ont confié que la fromagerie du Thouet était touchée avec du lait du même producteur que nous. Nous avons tout de suite arrêté la collecte.»

Le service sécurité sanitaire des aliments de la DDETSPP (Direction départementale de l’emploi, du travail, des solidarités et de la protection des populations) s’est chargé de la «recherche de listeria monocytogenes dans le lait cru, la matière première, et sur les surfaces de la fromagerie afin de maîtriser la contamination des produits finis, les fromages.

Des analyses désormais quotidiennes
Résultat : tous les fromages sont positifs à une bactérie «très largement répandue dans l’environnement et résistante», continue la DDETSPP. «Les ensilages mal faits (acidification insuffisante) peuvent en contenir en grandes quantités et sont à l’origine de la contamination des ruminants. 6 à 30% des bovins, ovins, porcins, caprins et poulets hébergent naturellement cette bactérie dans leur tube digestif.»

La fromagerie effectue désormais des analyses quotidiennes. «Notre équilibre est très fragile», lance Alice Belegou. Nous n’avons pas d’autres choix que de nous protéger si nous voulons continuer à travailler au lait cru. Nous savons que les microbiotes sont une mine d’or qui donnent typicité et originalité au goût.»

Avec ces péripéties, La Revalière a «perdu très gros, les conséquences ont été terribles«. D’abord avec l’inquiétude des clients, qui a déclenché «une vague d’appels«. Les pertes atteignent 50 000 euros et deux tonnes de fromages ont été détruites. «Quand c’est arrivé, nous avons écarté le lait, ajoute-t-elle. Après les analyses, on a vu qu’il n’y avait pas de traces de listeria dans la fromagerie.»

D’un côté, cette structure qui a le lait cru au cœur s'est retrouvée à l’arrêt. De l’autre, une activité d’élevage qui continue, notamment avec un lait envoyé vers les laiteries, où il est chauffé. «Nous ne voulons incriminer personne, nous avons simplement un contrat moral avec les éleveurs qui doivent fournir du lait de qualité et propre», souligne Alice Belegou. L’exploitant n’a pas donné suite à nos sollicitations.

Du côté de la DDETSPP, on précise qu’en cas d’infection avérée d’un troupeau, l’éleveur est «non réglementé» : c’est à la fromagerie de mettre en place «des autocontrôles microbiologiques du lait cru et un cahier des charges pour le fournisseur». Arrêter le lait cru n’est pas une option pour La Revalière. «C’est notre raison d’être, il faut s’accrocher», conclut Alice Belegou.

Complément.
282 rappels de produits alimentaires ayant pour cause la présence de Listeria monocytogenes depuis le 1er avril, selon RappelConso. Je vous laisse imaginer les pertes économiques et les tonnes de produits détruits ...

Merci à Joe Whitworth de Food Safety News de m'avoir signalé cet article.

Aux lecteurs du blog
Grâce à la revue PROCESS Alimentaire, vous n'avez plus accès aux 10 052 articles initialement publiés par mes soins de 2009 à 2017 sur le lien suivant, http://amgar.blog.processalimentaire.com/. Triste histoire de sous ... merci de leur faire part de cette anomalie !

mardi 3 novembre 2020

France : Autopsie d'un rappel de bûche de fromage de chèvre des Pays-Bas

La Commission européenne vous vante tellement la coopération entre les Etats membres de l'UE en matière de sécurité des aliments qu'on finirait par la croire. Personnellement, cela fait bien longtemps que j'y crois pas, mais en voici un nouvel exemple avec le réseau RASFF de l'UE, sensé être, hum, rapide …

Tout commence le 20 octobre 2020 avec une notification au RASFF le 22 octobre 2020 par la Pologne à propos d'une suspicion de contamination par Listeria monocytogenes dans des fromages de chèvre des Pays-Bas.

Le produit a été distribué dans 18 pays : Autriche, Belgique, Bulgarie, République tchèque, Danemark, Estonie, Finlande, France, Allemagne, Grèce, Irlande, Italie, Pologne, Slovaquie, Espagne, Suède, Royaume-Uni, dont les Pays-Bas.

Les Pays-Bas ont publié un avis de rappel par NWVA le 28 octobre 2020 y compris pour pour des fromages de chèvre bio non encore rappelés le 22 octobre 2020 ...

Ce qui est intéressant c'est le contenu de l'avis de rappel,

Aucune contamination n'a été démontrée sur les produits finis. Une source potentielle de contamination n'a été identifiée que lors des tests dans l'environnement du site de production. Bettinehoeve a décidé de rappeler tous les produits de fromage de chèvre affiné (à croûte de moisissures blanches) par mesure de précaution auprès des distributeurs, détaillants et partenaires de la restauration.

La France a demandé des informations le 2 novembre 2020, soit 13 jours après la notification initiale, d'où le rappel le 3 novembre par Auchan via le fabricant Bettinehoeve (Pay-Bas) qui a décidé de rappeler, «toutes les tranches de bûche de chèvre affinés frais emballées auprès des distributeurs». Il y est question de « traces de Listeria monocytogenes ».

Le texte du communiqué indique,

Bien qu'il n'y ait aucune indication de contamination au niveau des produits fabriqués localement, une source potentielle de contamination a été identifiée au cours des tests, des mesures correctives et préventives ont été prises pour garantir la sécurité alimentaire des produits. Bettinehoeve prend ce cas très sérieux et la sécurité des consommateurs est primordiale.

Le Royaume-Uni, qui semble-t-il n'a pas vue cette notification initiale au RASFF de l'UE, a publié une nouvelle notification le 30 octobre 2020 et rappelle le produit en question le même jour via une publication de la Food Standards Agency.

En Allemagne, il y a eu trois rappels, le 29 octobre (deux rappels, 1 et 2) et le troisième rappel a eu lieu le 3 novembre 2020 pour le chèbre bio.

Notons enfin qu'il y a eu une troisième notification au RASFF de l'UE le 30 octobre 2020 par l'Allemagne à propos d'une suspicion de contamination par Listeria monocytogenes dans des fromages de chèvre bio des Pays-Bas.

L'Irlande a rappelé des fromages des Pays-Bas en raison d'une possible présence de Listeria monocytogenes ; la Suède le 30 octobre 2020.

A suivre ...

dimanche 7 juin 2020

Encéphalite à tiques : première description d'un foyer de contamination d'origine alimentaire en France


L'Anses nous a informé le 18 mai 2020 de CiTIQUE : la nouvelle version de l’application est désormais disponible.

Pour améliorer la prévention des risques liés aux piqûres de tiques, l’INRAE et ses partenaires ont créé en 2017 l’application participative « Signalement Tique » dans le cadre du projet CiTIQUE auquel l’Anses participe. A partir d’aujourd’hui, une nouvelle version, plus pratique pour les utilisateurs et plus utile pour les chercheurs, est accessible à tous.

L’application gratuite « Signalement Tique » a vocation à améliorer la connaissance des tiques et des maladies associées. Impliquant citoyens et chercheurs, cette application permet de collecter des données sur la répartition géographique, le contexte des piqûres de tiques (date, zone du corps piquée, nombre de tiques implantées, type d’environnement, motif de la présence sur le lieu de piqûre, photo de la piqûre et/ou de la tique…) et les agents pathogènes qu’elles transportent.

Depuis 2007, plus de 23 500 piqûres ont déjà été recensées à l’échelle française et plus de 20 000 tiques ont été déposées dans la première et unique tiquothèque participative française. Grâce à ces données, les chercheurs savent désormais que :
  • les périodes les plus à risques sont le printemps et l’automne,
  • 15 % des tiques analysées sont porteuses de la bactérie à l’origine de la maladie de Lyme,
  • 1/3 des piqûres signalées ont lieu dans des jardins privés ou des parcs publics.
Mais c'est d'une autre information que j'aimerais partager avec vous, grâce à une internaute vétérinaire, il s'agit d'un article paru dans La Dépêche Vétérinaire le 4 juin 2020 par la Pr Jeanne Brugère-Picoux, « Encéphalite à tiques : première description d'un foyer de contamination d'origine alimentaire en France ».
Des fromages au lait cru de chèvre seraient à l'origine d'un foyer de cas d'encéphalite à tiques chez des habitants dans l'Ain, selon l'Agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes et la préfecture du département. C'est la première fois qu'un foyer d'encéphalite à tiques d'origine alimentaire est décrit en France. La transmission de cette maladie par des produits laitiers non pasteurisés semble augmenter ces dernières années en Europe.
L'annonce, le 28 mai, d'un foyer de cas d'encéphalite à tiques (EAT) confirmé (10 cas dont un décès qui ne semble pas être directement lié à cette virose) ou probable chez 26 habitants dans l'Ain, par l'Agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes et la préfecture de l'Ain, a surtout surpris par le caractère exceptionnel de l'origine de l'infection : des fromages au lait cru de chèvre d'une exploitation agricole du bassin d'Oyonnax (ces produits auraient été consommés par au moins 50% des personnes malades).
En effet, l'EAT est l'une des zoonoses virales les plus importantes transmises par la morsure d'une tique infectée. Elle est due à un flavivirus (Tick Borne Encephalitis virus ou TBEV).
Il existe trois sous-types principaux de TBEV (européen, sibérien et extrême-oriental), le sous-type européen étant transmis principalement par la tique Ixodes ricinus (Ixodes persulcatus transmettant les autres sous-types).
La transmission alimentaire par la consommation d'un lait ou d'un produit laitier non pasteurisé provenant d'un ruminant infecté, considérée comme rare, n'avait jamais été décrite en France jusqu'à cette suspicion récente.
Exceptionnellement, une contamination au laboratoire par piqûre ou par aérosols est également possible. 


Trente-deux cas de méningite lymphocytaire, encéphalites et syndromes infectieux, ont été recensés depuis le 14 avril 2020 dans une zone limitée de l'Ain chez des personnes habitant sur le bassin de la commune d’Oyonnax, dans un rayon de 30 km environ. Le pic épidémique des cas est survenu dans la semaine du 20 au 26 avril 2020. Parmi ces 32 cas, le diagnostic d'infection par le virus TBE (Tick-Borne Encephalitis) a été confirmé par le Centre National de référence des Arbovirus le 27 mai 2020 pour 14 cas. Ce virus est l’agent responsable de l’encéphalite à tiques. Les 18 autres cas sont en cours d’investigation et des tests biologiques sont réalisés pour confirmer ou infirmer le diagnostic d’encéphalite à tiques.

L’âge médian des cas est de 48 ans et 17 (53%) sont des femmes. Vingt-huit cas ont été hospitalisés ou ont consulté aux urgences, dont 2 ont été admis en unités de soins intensifs. Un cas possible présentant des comorbidités est décédé. Parmi les cas investigués, les signes les plus fréquemment rapportés sont : fièvre (78%), céphalées (52%), myalgies (35%), vertiges (30%), asthénie (21%), diarrhées (13%), vomissements (13%), troubles de la vigilance (9%) et tremblements (9%).

Trente et un des 32 cas (97%) rapportent avoir consommé du fromage ou de la faisselle de chèvre à base de lait cru en provenance du même producteur de fromages situé dans la zone de résidence des cas. La cause alimentaire de ces infections a été confirmée le 2 juin 2020 par le Centre National de référence des Arbovirus. En effet, la présence de génome du virus TBE a été identifiée dans un fromage de chèvre du producteur concerné. Un retrait-rappel des produits laitiers de ce producteur a été effectué avant même la connaissance de ce résultat. Des investigations vétérinaires sont en cours. Cet épisode de cas groupés d’encéphalite à tiques est le premier identifié en France lié à la consommation alimentaire. En revanche, la documentation de cas d’encéphalites à tiques n’est pas nouvelle en Auvergne Rhône-Alpes. Quelques rares cas sont décrits chaque année dans la région d’Annecy depuis 2003 et plus récemment dans le massif du Livradois-Forez avec la détection de 3 cas en Loire et Haute-Loire durant les étés 2017 et 2018.

L'encéphalite à tiques en augmentation constante en Europe
De 1990 à 1994, on a pu observer une augmentation des cas d'EAT dans les pays de l'espace économique européen, peut-être du fait d'une surveillance accrue, puis, de 1995 à 2009, une certaine stabilité, avec 2 000 à 4 000 cas déclarés par an.

En 2012, la maladie accompagnée de troubles nerveux est devenue à déclaration obligatoire dans l'Union européenne.

Une enquête concernant l'EAT a été réalisée sur la période de 2012 à 2016 en Europe : 23 pays de l'Union européenne ont déclaré 12 500 cas d'EAT (l'Irlande et l'Espagne ne déclarant aucun cas), dont 93% ont été confirmés (11 623) et 7% considérés comme probables (783).

Les Pays-Bas ont déclaré des cas à partir de 2016. Deux pays (République tchèque et Lituanie) ont représenté 38,6% de tous les cas signalés, malgré un effectif ne représentant que 2,7% de la population sous surveillance.

Le taux annuel de notification a fluctué entre 0,41 cas pour 100 000 habitants en 2015 et 0,65 en 2013, sans modification significative. La Lituanie, la Lettonie et l'Estonie avaient les taux de notification les plus élevés avec respectivement 15,6, 9,5 et 8,7 cas pour 100 000 habitants.

Au niveau infranational, six régions avaient des taux de notification annuels moyens supérieurs à 15 cas pour 100 000 habitants, dont cinq dans les pays baltes.

Augmentation des cas en France en 2016
Plusieurs pays avaient signalé l'augmentation des cas d'EAT sur leur territoire, notamment la Suisse qui, de 100 cas annuels déclarés ces 5 dernières années, a notifié 251 cas à la fin du mois d'octobre 20196.

En France, depuis 1968 avec la description du premier cas humain, on a surtout observé une dizaine de cas par an en région alsacienne puis, à partir de 2003, un ou deux cas en Haute-Savoie et, en 2006, un premier cas dans le Sud-Ouest (soit 1 cas pour 100 000 habitants).

Une augmentation marquée des cas d'EAT en France a été observée en 2016 : 54 cas dont 46 avec des troubles nerveux (9 malades ont gardé des séquelles pendant les 15 jours à 8 mois suivants) et une enquête sérologique montrant 5,89% de séropositifs sur 1 643 échantillons sanguins.

La région alsacienne est ainsi passée de 0,5 cas à 1,33 cas pour 100 000 habitants.

Selon l'évaluation de l'ECDC sur l'encéphalite à tiques (EAT),
L'EAT est présent dans de grandes régions d'Europe avec des taux de notification les plus élevés dans les pays d'Europe du Nord, centrale et orientale. L'EAT suit une tendance saisonnière, la plupart des cas étant généralement signalés entre juin et septembre. Le vecteur Ixodes ricinus est largement distribué en France et est présent dans la région Auvergne-Rhône-Alpes. Bien que la transmission d'origine alimentaire soit rare, elle peut survenir par la consommation de lait non pasteurisé et de produits laitiers provenant d'animaux infectés. Des investigations complémentaires sont nécessaires pour définir l'étendue de la circulation du virus dans la région.
Les personnes qui vivent ou voyagent dans des régions où l'encéphalite à tiques est endémique doivent être conscientes du risque d'exposition aux tiques, se protéger contre les piqûres de tiques et envisager la vaccination avant l'exposition, qui offre la protection la plus efficace.
La vaccination est recommandée pour les personnes qui vivent dans des zones à risque TBE ou qui visitent fréquemment les forêts et les prairies. Il a conseillé d'éviter la consommation de lait et de produits laitiers non pasteurisés dans les zones à risque à EAT.

NB : L'article s'est largement inspiré de celui de la Pr Jeanne Brugère-Picoux et je conseille vivement la lecture intégrale de l'article qui est en accès libre.

Sur le sujet on lira de l'Anses, Tiques et maladie de Lyme. Mieux connaître et combattre les agents pathogènes transmis par les tiques.

Mise à jour du 2 juillet 2020. On lira le volet encéphalite à tique dans le Bulletin de l'IHU de Marseille du 30 juin 2020, où il est rapporté,
En pratique : L’encéphalite est endémique, de mai à octobre, dans les zones rurales de plusieurs pays d’Europe Centrale et du NordL’encéphalite à tiques est rare en France, une vingtaine de cas sont diagnostiqués chaque année essentiellement en Alsace et en Haute Savoie. La transmission du virus se fait par piqure de tique infestée.de façon exceptionnelle une contamination peut se faire par consommation de lait cru de chèvre ou de brebis. Cette transmission n’avait jamais été décrite en France.
Il existe deux vaccins : Ticovac  et Encepur.

mercredi 6 mai 2020

Retour sur une épidémie à Salmonella Newport associée à du fromage au lait cru de chèvre distribué à l'international, France, 2018.

Voici un article intéressant pour nous Français car cela concerne une épidémie à Salmonella Newport associée à du fromage au lait cru de chèvre distribué à l'international, France, 2018.

Résumé
Les fromages au lait cru sont couramment consommés en France et sont également une source fréquente de toxi-infections alimentaires (TIA). Un système de surveillance des TIA et un système de surveillance en laboratoire visent à détecter les épidémies à Salmonella. Début août 2018, 5 TIA familiales dues à Salmonella spp. ont été rapportées à une agence régionale de santé (ARS). L’investigation a identifié une exposition commune avec un fromage au lait cru de chèvre, à partir duquel Salmonella spp. a également été isolé, ce qui a entraîné un rappel international de produits.

Trois semaines plus tard, le 22 août, une augmentation nationale de Salmonella Newport ST118 a été détectée grâce à une surveillance en laboratoire. Les isolats concomitants des clusters familiaux antérieurs ont été confirmés comme étant S. Newport ST118.

Des entretiens avec une sélection de cas identifiés en laboratoire ont révélé une exposition au même fromage, y compris une exposition à des lots non inclus dans le rappel précédent, ce qui a entraîné une expansion du rappel.

L'épidémie a touché 153 cas, dont 6 en Écosse. S. Newport a été détecté dans le fromage et dans le lait d’une des chèvres du producteur.

La différence entre les deux alertes générées par cette épidémie met en évidence la rapidité du système des TIA et la précision du système de surveillance en laboratoire. C'est aussi un rappel des risques associés aux fromages au lait cru.
Le blog vous avait parlé de cette épidémie dans De l'information sur deux ou trois crises sanitaires en 2018.

Dans cet article, je faisais référence au rapport d'activité de la DGAL 2018 … où l'on apprenait de façon stupéfiante qu'il y a eu « Une centaine de cas de salmonelloses dus à des fromages pélardons ». On verra loin qu’il y a eu beaucoup plus de cas153 cas au moins ...
Un retrait/rappel des lots identifiés chez les malades a été lancé le 10 août, accompagné d'un communiqué de presse afin de toucher des consommateurs potentiels au niveau national pendant cette période de vacances avec une importante mobilité des personnes. La distribution dépassant les frontières de l'Hexagone, l'alerte a été notifiée sur le réseau européen d'alerte (Rasff) le 13 août 2018.
Le 22 août, Santé Publique France rapporte l'existence de nouveaux cas humains de salmonelloses, répartis sur l'ensemble du territoire, dus à une souche de Salmonella Newport, souche génétiquement identique à celle trouvée dans les pélardons impliqués, début août, dans les Tiac des Bouches du Rhône. Les ministères de l’Agriculture et de la Santé décident alors de publier un second communiqué de presse national élargissant les mesures de retrait/rappel à tous les pélardons sur le marché fabriqués par l'entreprise lozérienne.
Au total, 104 malades ont été recensés en France entre le 11 juillet et le 22 août 2018. L'absence de détection de nouveaux cas après le 25 août montre l'efficacité des mesures de retrait-rappel mises en œuvre. Des analyses du lait ont permis d'identifier un animal à l'origine de la contamination. Des opérations rigoureuses de nettoyage et désinfection ont été effectuées dans l'établissement. Un suivi renforcé sur plusieurs semaines a accompagné la reprise de son activité.
Les deux rappels dont il est question sont les suivants :
  • 10/08/2018. L’EARL Mounier procède au retrait de la vente et au rappel du produit « Pélardons »
  • 24/08/2018. Contamination de fromages « Pélardon » de l’entreprise Mounier par des salmonelles : élargissement du retrait-rappel suite à plusieurs cas de salmonelloses
Dans l’article du blog précité j’indiquais :
Notons que le communiqué du 10 août 2018 du ministère de l'agriculture indique que les produits ont été commercialisés « à partir du 21/07/2018 sur l’ensemble du territoire national, dans les commerces de détail et sur les marchés locaux. »
Beaucoup de temps s'est donc écoulé entre la commercialisation et le premier rappel … et nous verrons plus loin, dans la discussion de l’article scientifique proposé en début d’article, que cela peut poser problème.

Je relaie l'ensemble du texte de la discussion pour une meilleure compréhension de cette épidémie.

Discussion
Nous avons décrit une importante éclosion à S. Newport susceptible liée à un fromage au lait de chèvre cru artisanal distribué à l'international produit en France. L'ampleur de l'épidémie est probablement sous-estimée.

En France, un facteur de multiplication de 20 a été estimé entre les cas de Salmonella constatés par le système de surveillance en laboratoire et les cas dans la communauté.

Le taux d'attaque élevé observé dans les clusters familiaux, et le fait que plus de 23 000 unités potentiellement contaminées ont été distribuées en France et à l'international, suggère en outre une sous-estimation de l'ampleur tant en France qu'à l'international.

Aucun cas international n'a été signalé, à l'exception de ceux signalés en Écosse.

Étant donné que seulement 24 unités impliquées dans le premier rappel ont été vendues en Écosse et que quatre cas connus pour avoir été exposés à ces unités ont été identifiés, il semble probable que des cas se soient également produits dans d'autres pays qui ont reçu le produit.

Cependant, le premier rappel a probablement atténué une éclosion beaucoup plus importante. Alors que 5 des 6 foyers à S. Newport identifiés en France sont désormais associés à des fromages au lait de chèvre cru, nous n'avons pas connaissance d'affinité particulière entre ce sérotype et les chèvres ou les produits laitiers.

Ailleurs, les sources des éclosions à S. Newport ont été éclectiques, y compris des produits frais (fruits, légumes à feuilles, à racines et à tiges de vigne, graines germées, fruits à coque), la viande bovine hachée et d'autres aliments d'origine animale, suggérant des réservoirs variés.

Deux autres foyers liés à la consommation de fromages au lait cru ont été signalés - tous deux aux États-Unis et associés à des fromages au lait de vache non pasteurisés. Fait intéressant, aux États-Unis, les isolats de S. Newport avec un profil pansusceptible sont souvent associés à des produits frais et à des réservoirs environnementaux potentiels tandis que les isolats multirésistants sont associés à des produits d'origine animale, ce qui conduit à l'hypothèse que la pansusceptibilité est un indicateur d'un réservoir environnemental, ou d'un environnement avec moins d'exposition aux antibiotiques. Le contact avec les amphibiens et les reptiles s'est également avéré être associé à une infection pansusceptible, conformément à l'hypothèse de l'association entre la pansusceptibilité et les réservoirs environnementaux.

Les isolats de cette éclosion étaient sensibles. Pour se conformer aux exigences AOP, les chèvres produisant le fromage impliqué doivent passer la majorité du temps à l'extérieur et se nourrir de végétation naturelle et peuvent donc avoir été exposées à un réservoir environnemental.

L'épidémie a mis à nouveau en évidence les risques potentiels associés aux produits laitiers crus. Le lait cru de chèvre peut être contaminé par des pathogènes gastro-intestinaux humains similaires au lait cru de vache. En France, six autres foyers à Salmonella ont été liés à des fromages français au lait cru de chèvre et trois foyers à Escherichia coli producteurs de shigatoxines (STEC) ont été liés à des fromages au lait cru de chèvre et de vache.

Des foyers gastro-intestinaux à STEC, Cryptosporidium parvum, Campylobacter spp. et Salmonella spp. associés à la consommation de lait cru de chèvre ou de son fromage ont été signalés par d'autres pays. En outre, la consommation a également été associée à d'autres infections zoonotiques non gastro-intestinales, notamment l'encéphalite à tiques, la brucellose, la toxoplasmose, la fièvre Q, la de Streptococcus equi sous-espèce zooepidemicus, la fièvre de la vallée du Rift et la tuberculose.

Comme pour le lait de vache, la contamination du lait de chèvre peut être due à une excrétion directe dans le lait par le pis ou à une contamination externe pendant ou après la traite, selon l'agent pathogène. On pense cependant que la contamination fécale est moins probable que pour le lait de vache car les fèces de chèvre sont granulées et plus sèches, donc moins susceptibles de contaminer le pis. De plus, par rapport aux vaches au pâturage, les pis des chèvres sont moins susceptibles d’entrer en contact avec de la boue contaminée par des matières fécales.

Dans 4 des 7 épidémies à Salmonella documentées en France associées au fromage au lait de chèvre (y compris l'épidémie actuelle), une ou plusieurs chèvres se sont révélées être des excréteurs de pis asymptomatiques, tandis que dans une cinquième, une chèvre avec une mammite clinique s'est avérée être la source.

Dans les foyers à STEC associés au lait cru mélangé, l'agent pathogène a été retrouvé dans les fèces d'un ou plusieurs animaux des deux espèces ou dans l'installation de production, mais pas dans le lait excrété. La consommation de produits laitiers de chèvre est moins courante que celle de lait de vache, bien qu’il puisse y avoir des variations géographiques.

Dans l’Union européenne, la production de lait de chèvre ne représentait que 1,4% de la production totale de lait. Dans une enquête nutritionnelle française 0,4% des personnes ont déclaré avoir bu du lait de chèvre. Quinze pour cent des personnes ont déclaré manger tout type de fromage au lait de chèvre et 3% ont déclaré avoir mangé du fromage au lait cru de chèvre. Cela se compare aux 27% des personnes qui ont déclaré avoir mangé du fromage de lait de vache cru. Les fromages au lait de chèvre cru représentent environ 9% des fromages au lait cru français produits. Alors que les flambées associées au lait cru de chèvre en France sont moins fréquentes que pour le lait de vache, ce chiffre semble disproportionné compte tenu des différences de consommation.

Sur les 18 foyers à Salmonella liés aux fromages au lait cru en France entre 2004 et 2018, six ont été liés à un fromage au lait de chèvre. En outre, les fromages au lait cru de chèvre ont représenté 26% des 101 alertes de sécurité des aliments (pour la plupart des non-conformités dans les contrôles de qualité par le producteur) concernant les fromages au lait cru notifiés à la DGAL. La disproportionnalité des agents pathogènes et des maladies associées aux fromages au lait de chèvre peut s'expliquer par le fait que les fromages au lait cru de chèvre sont plus susceptibles d'être des fromages à pâte molle, dans lesquels la forte teneur en eau et le pH permettent la survie et améliorent les conditions de croissance des agents pathogènes.

En 2018, la DGAL a entrepris une étude qui impliquait un échantillonnage aléatoire sur les sites de production de fromages au lait cru de toutes les espèces pour déterminer la prévalence ou Listeria, Salmonella et STEC dans les produits. Les résultats de cette étude fourniront une image plus claire du risque posé par les fromages crus de différentes espèces. La France produit la moitié de la production totale de fromage de l'UE à partir de lait pur de chèvre. Vingt-deux pour cent du lait de chèvre produit en France est transformé à la ferme, principalement sans pasteurisation, avec 18-20 000 tonnes de fromages artisanaux produits chaque année. Cette flambée souligne comment même un producteur à relativement petite échelle peut contribuer à une flambée internationale de grande ampleur. Un tiers du fromage de chèvre français est exporté. Le marché artisanal du fromage de chèvre au lait cru serait en croissance dans d’autres régions comme le Royaume-Uni et l’Australie.

Bien que de nouvelles techniques non thermiques pour améliorer la qualité microbiologique puissent être une option pour les producteurs industriels de fromages au lait cru, il est peu probable qu'elles soient réalisables par des producteurs artisanaux. Beaucoup de ces producteurs ne pouvaient pas se permettre d'investir dans ces technologies. Plus important encore, il est peu probable qu'elles soient acceptées par le producteur ou les consommateurs, qui souhaitent souvent conserver les méthodes de production traditionnelles. Les réglementations concernant les produits AOP/IGP exigent également le respect des méthodes de production traditionnelles.

Dans les pays européens, la production et la vente de fromages crus sont soumises aux réglementations de l'UE en matière de sécurité alimentaire. Alors que des lignes directrices supplémentaires sur les bonnes pratiques ont été élaborées en collaboration avec l'industrie dans certaines régions, les producteurs artisanaux et leurs fournisseurs, en France et ailleurs, peuvent avoir besoin d'un soutien particulier pour entreprendre les évaluations des risques requises et mettre en œuvre des procédures de maîtrise critique pour maximiser la sécurité microbiologique de leur produit.

Cependant, alors que l'amélioration des pratiques d'élevage et de production en combinaison avec des protocoles de tests microbiologiques peuvent réduire les produits contaminés, le risque ne peut pas être éliminé et les consommateurs de tous les produits laitiers crus doivent être conscients des risques potentiels, en particulier ceux à risque accru de maladie grave.

En juin 2019, la DGAL a recommandé aux jeunes enfants, notamment de moins de 5 ans, aux femmes enceintes et aux personnes immunodéprimées de ne pas consommer de fromages au lait cru. L'autre aspect intéressant de cette épidémie est le décalage horaire, de plus de deux semaines, entre sa détection dans le système de surveillance syndromique des TIA et le système de surveillance de laboratoire, mettant en évidence certaines des forces et des faiblesses des deux.

Le système de surveillance des TIA offre une opportunité, car les cas groupés doivent être déclarées avant la confirmation microbiologique des cas.

En 2016, 31% des cas groupés ont été signalées le jour ou le lendemain de l'apparition des premiers symptômes du premier malade. Cette notification rapide peut faciliter l'investigation et la mise en œuvre rapide des mesures de maîtrise. De plus, en cas d'alerte provenant du système de laboratoire, une recherche des clusters du même sérotype au sein du système de surveillance des TIA est entreprise, et lorsqu'elle est présente peut aider à la génération d'hypothèses.

Une étude (couvrant la période 1995-2000) , ont estimé que 26% des cas groupésde salmonellose avec des cas confirmés microbiologiquement ont été capturées par le système syndromique des TIA. De plus, la lien avec des cas groupés signalées, en particulier lorsqu'ils s'étendent sur plusieurs régions géographiques, est limitée par des informations imprécises ou absentes sur l'agent pathogène ou la source suspectée.

Trois autres cas groupés familiaux à Salmonella au sein de cette éclosion, qui étaient liées rétrospectivement microbiologiquement, ont été notifiées dans différentes régions avant la deuxième alerte. Un repas contenant du fromage était le véhicule suspect pour chacun, mais le fromage impliqué n'était pas spécifiquement identifié. Par conséquent, ils n'étaient pas liés aux cas groupés du département 13, et une occasion de reconnaître plus tôt l'étendue réelle de l'épidémie a été manquée. De même, la liaison des cas groupés sur la base d'un pathogène causal commun peut être entravée par le fait que dans environ la moitié des cas groupés de salmonellose, le sérotype n'est pas confirmé au moment de la notification. En revanche, la surveillance en laboratoire offre une plus grande sensibilité, avec environ 66% des infections confirmées capturées. Il fournit également des informations détaillées sur les agents pathogènes, un avantage qui a été encore amélioré depuis l'introduction du WGS (séquençage du génome complet).

Cependant, cela se fait au détriment de l'actualité, avec un délai d'analyse moyen (réception au Centre national de référence des Escherichia coli, Shigella et Salmonella jusqu’à la validation du sérotype) de 26 jours contre 6 jours lorsque le sérotypage se faisait par agglutination. Bien que le premier rappel provenant du système de surveillance FBO était inadéquat car l'étendue de l'épidémie et la contamination n'étaient pas entièrement évidentes, il s'est toujours produit près de 2 semaines avant que l'épidémie ne soit même détectée par le biais d'une surveillance en laboratoire. La rapidité d'exécution peut être l'une des limites de l'utilisation du WGS pour la détection des épidémies. Les délais d'exécution dépendront de la demande et des ressources disponibles et la forte incidence de Salmonella peut être l'un des défis à la mise en œuvre systématique du WGS dans certains pays. Cependant, les retards diminueront probablement à l'avenir à mesure que les progrès méthodologiques et la réduction des coûts amélioreront la capacité. Cela dit, la disponibilité du WGS a permis une collaboration internationale opportune et la confirmation des cas internationaux lors de cette épidémie.

Cette épidémie met en évidence la valeur des deux systèmes de surveillance. Tout en poursuivant et en investissant dans la surveillance par WGS, les autorités de santé publique devraient continuer à soutenir ces systèmes traditionnels dans le cadre de programmes de surveillance multiformes afin d'optimiser la rapidité et la réactivité de la surveillance.

Ces résultats rappellent également les risques liés aux fromages au lait cru et que les mesures visant à prévenir l'entrée d'agents pathogènes dans la chaîne de production artisanale de fromages au lait cru et l'optimisation de la surveillance visant à prévenir les épidémies d'origine alimentaire comme en France devraient être étendu ou renforcé dans d'autres régions d'Europe avec une tradition dans la production de fromages à base de lait cru.

Complément. A propos des fromages au lait cru, on lira, "Investigation d’une épidémie nationale de Salmonella Dublin associée à une consommation de fromages au lait cru, France, 2015 à 2016", source Santé publique de France du 26 mai 2019.

Mise à jour du 15 mai 2020. On lira l'article de Food Safety News du 15 mai consacré à l'article précité ci-dessus, Large Salmonella outbreak from raw goats’ milk cheese revealed.