jeudi 16 janvier 2020

Seismo, le couteau suisse de la sécurité sanitaire des aliments, édition de janvier 2020

Seismo, vous connaissez ? 

Le blog vous en a déjà entretenu ici, ce sont, d’après l’OSAV, Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires, « les sismographes de la détection précoce ; on les nomme « Seismo » dans le présent concept. Les Seismo réunis forment le comité Seismo. Celui-ci peut consulter un conseil composé d’experts externes pour évaluer les informations recueillies. »

Différents sujets ayant déjà été abordés par le blog, voici ma sélection du Seismo Info 01/2020 :

Nouvelles tendances alimentaires
Végétalisme : Dans les pays riches, la mode de l’alimentation végétalienne entraîne parfois de la malnutrition. Un régime végétalien dans lequel les nutriments essentiels issus des denrées alimentaires d’origine animale ne sont pas remplacés peut entraîner de graves carences en nutriments. Par conséquent, la demande en compléments alimentaires pourrait augmenter à l’avenir. The Conversation, 2 pages.

Toxi-infections alimentaires : foyers inhabituels
Norovirus dans des moules : En France, certaines zones de production d’huîtres et de moules en Bretagne et en Normandie (Atlas Sanitaire, 3 pages. 27.12.2019) ont été mises sous séquestre fin 2019 suite à la détection de norovirus. Les marchandises déjà livrées ont été rappelées en France et en Suisse. Rappels (huîtres, moules), 1 page chacun. (08.01.2019). Mise à jour : Food Safety News fait le point de la situation. Food Safety News, 2 pages. (09.01.2020).

La situation a évolué et ne concerne pas que la Bretagne et la Normandie. Le blog a publié de nombreux articles sur le sujet et signale qu’il y a eu, à ce jour, 15 notifications au RASFF de l’UE pour des coquillages de France.

Chine : Un nouveau virus pour l’être humain ? Les cas de pneumonie liés à un marché de fruits de mer à Wuhan inquiètent. Science , 2 pages. (03.01.2020).

On lira l’article de Santé publique de France du 14 janvier 2020, « Cas groupés de pneumopathies possiblement associés à un nouveau Coronavirus, Wuhan, Chine ».
Point de situation sur un épisode de cas groupés de pneumonies possiblement lié à un marché d’animaux vivants dans la ville de Wuhan, en Chine 

Légionellose : Trois cas de légionellose dans le canton de Zurich pourraient être liés à une visite dans une station de lavage auto. Les légionelles prolifèrent en particulier dans les milieux chauds et humides : la contamination peut se faire par l’inhalation de gouttelettes d’eau. BAG Bulletin (allemand), OFSP Bulletin (français), 3 pages. (12.12.2019).

Salmonella Javiana : Aux États-Unis, 11 personnes ont été atteintes de salmonellose causée par le sérotype S. Javiana. La source d’infection est un mélange de morceaux de melon, d’ananas et de raisin. Food Poison Journal, 1 page. (12.12.2019). Mise à jour : en moins d’un mois, le nombre de patients est passé de 11 à 96. CDC, 2 pages. (06.01.2020).

OEufs durs : La contamination par Listeria dans une entreprise produisant des œufs durs aux États-Unis entraîne un rappel généralisé des produits. À ce jour, sept cas de maladie ont été signalés, dont un ayant entraîné un décès. Newsweek 1 page ; CDC, 2 pages. (06.01.2020).

Pays-Bas : Le rapport sur l’état des zoonoses 2018 (State of Zoonoses 2018), publié par National Institute for Public Health and the Environment (RIVM) et Netherlands Food and Consumer Product Safety Authority (NVWA), indique une augmentation des infections à E. coli productrices de shigatoxines (STEC) et des infections à Campylobacter, tandis que les infections à Listeria et à Salmonella ont diminué. Food Safety News, 2 pages. Publication originale, 90 pages. (16.12.2019).

Espagne : analyse d’un foyer dû à un norovirus GI et GII dans de l’eau minérale. Publication originale, 4 pages. (06.01.2020).

Sécurité alimentaire
Shewanella haliotis : premier cas signalé en Amérique. S. haliotis est un nouvel agent pathogène pour l’être humain : isolé pour la première fois de la microflore intestinale de l’abalone (ormeau) en 2007, il a pour l’instant causé des infections en Asie uniquement. Les infections faisant suite à la consommation de fruits de mer sont rarement signalées, pourtant la consommation de fruits de mer crus pourrait être un important vecteur de maladies et de foyers d’origine alimentaire. Article original, 2 pages. (20.12.2019).

Australie : la viande d’agneau comme source potentielle d’infections à Toxoplasma gondii. Une interprétation prudente des tests PCR réalisés dans le cadre d’une étude australienne indique que de la viande d’agneau a été contaminée par T. gondii avec une probabilité de 43 %. Publication originale, 4 pages. (19.12.2019).

Métaux lourds dans la charcuterie crue rubéfiée : L’AGES (Österreichische Agentur für Gesundheit und Ernährungssicherheit GmbH) informe du rappel d’un salami de chevreuil. Raison : teneur élevée en plomb. Le produit est impropre à la consommation. AGES, 1 page. (19.12.2019).

La France interdit le dioxyde de titane dans les aliments pendant une année, mais comme c'est étrange, rien ne change en Suisse ...


Comme sur d'autres sujets, tiens le glyphosate, par exemple, ou bien les couches pour bébés, voici que l'on apprend que la France interdit le dioxyde de titane dans les aliments pendant une année, mais rien ne change en Suisse ...

Comme c'est étrange ? Effectivement, il ne sont pas peut-être pas faits comme nous, ... ces Suisses ?
Depuis le 1er janvier 2020, les denrées alimentaires contenant du dioxyde de titane ne peuvent plus être mises sur le marché en France. L’interdiction de cet additif, présent notamment dans les chewing-gums, durera dans un premier temps une année. La France fonde sa décision sur un avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses).
L’OSAV et l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) ont conclu pour leur part que les résultats des études sur lesquelles s’appuie cette décision ne sont pas encore suffisamment étayées. Bien que la France parvienne à la même conclusion, elle interdit le dioxyde de titane pendant une année par mesure de précaution.
En 2016, l’EFSA a indiqué que les données disponibles concernant l’absorption de dioxyde de titane par voie orale ne révélaient aucun risque pour la santé des consommateurs. D’autres études devraient être disponibles d’ici mi-2020. Vu l’état actuel des connaissances et les résultats attendus, le Conseil fédéral estime qu’une interdiction de cette substance en Suisse n’est pas justifiée.
Autorisé en tant qu’additif (colorant E171), le dioxyde de titane est utilisé comme colorant blanc notamment dans des confiseries et des enrobages. Il est apprécié pour sa brillance et son opacité.
Un brin moqueur nos amis suisses, mais c'est de bon aloi ... surtout quand on soulève les contradictions de la décision française ...

Cela étant, en France, il vous faut savoir que quand on interdit pendant un an, on interdit définitivement, ah oui, au nom du principe de précaution ... mais c'est bien sûr ...

Epidémies de maladies d'origine alimentaire et lutte pour la sécurité des aliments


Coup de projecteur dans la revue du CDC, Emerging Infectious Diseases, à propos d’un livre de Timothy D. Lytton, « Outbreak: Foodborne Illness and the Struggle for Food Safety » (Épidémie : Maladies d'origine alimentaire et lutte pour la sécurité des aliments). Source Doug Powell du barfblog.

La santé publique progresse pas à pas, à mesure que les dangers sont reconnus et que de meilleures stratégies de maîtrise et de prévention sont élaborées. Comment cela se produit, comment de nouvelles mesures de sécurité sanitaire naissent et comment elles s’améliorent et font partie de notre mode de vie sont au centre de ce nouveau livre, « Épidémie: les maladies d'origine alimentaire et la lutte pour la sécurité alimentaire ».

Le professeur Timothy D. Lytton, spécialiste de l'évolution de la réglementation, fournit un guide vivant et bien documenté sur 150 ans de progrès majeurs dans la réglementation et la prévention de la sécurité sanitaire des aliments aux États-Unis. Il commence par les premiers efforts de nettoyage et de la régulation de l'approvisionnement en lait au 19e siècle qui ont finalement conduit à une pasteurisation quasi universelle. Des efforts visant à rendre les aliments en conserve exempts de botulisme dans les années 1920 ont conduit à un nouvel accent sur les étapes de maîtrise critiques de la transformation, en utilisant un temps et une température suffisantes pour éliminer le risque, et ainsi une nouvelle approche générale basée sur la maîtrise des processus. La modernisation de l'inspection de la viande avec une logique de maîtrise des processus dans les années 1990 et les efforts récents pour rendre les produits frais plus sûrs dans les années 2000 amènent le lecteur aux controverses d'aujourd'hui.

Ce livre comble une lacune critique, tissant l'histoire de la santé publique, des agences réglementaires et de l'industrie alimentaire ainsi que des questions d'intérêt immédiat aujourd'hui. Il s'agit d'une perspective innovante qui saisit la complexité du système au-delà du rapport scientifique ou de la réglementation publiée. Le livre devrait intéresser les étudiants et les praticiens de la santé publique et de la sciences de aliments et toute personne intéressée à rendre les aliments fiables et sûrs.

Avec de exemples neufs et des entretiens détaillés, Lytton illustre l'interaction dynamique des investigations sur les épidémies, les meilleures stratégies de prévention développées par l'industrie, la défense des consommateurs et les réglementations. Il explique pourquoi l'équilibre résultant est un équilibre ponctué, avec des états stationnaires plus longs se terminant par des changements rapides importants. Les épidémies importantes et catastrophiques sont le déclencheur final, comme des « événements marquants » qui, avec la couverture médiatique, augmentent l'attention du public et créent une pression pour le changement. Lytton raconte l'histoire frappante et moins connue de ce qui se passe dans les coulisses alors que des champions de la sécurité des aliments au sein de l'industrie font avancer de nouvelles solutions et des normes volontaires, montrent comment ils pourraient réduire la contamination et gagner des adhérents de haut en bas de la chaîne d'approvisionnement alimentaire, ouvrant ainsi la voie à d'autres dans l'industrie et les services réglementaires suivent. Il décrit également habilement les rôles complexes des auditeurs tierce partie, qui fournissent des informations à une entreprise sur les pratiques de sécurité sanitaire de ses fournisseurs, et offre une nouvelle perspective sur le rôle croissant que les assureurs en responsabilité civile pourraient jouer à l'avenir.

C'est une histoire qui élève, montrant comment nous honorons ceux qui ont souffert et sont décédés d'une maladie d'origine alimentaire qui peut maintenant être évitée par de meilleures pratiques et d'une alimentation plus sûre aujourd'hui. Dans le creuset de l'action publique, il nous rappelle à tous comment ces avancées commencent et, avec des retours d'expérience et des apprentissages, comment elles peuvent réussir.

Problèmes récurrents de la présence de Salmonella dans les volailles de la République tchèque, étonnant, malgré la législation de l'UE ?


Le 12 décembre 2019, l’EFSA indiquait que « Salmonella est la cause la plus fréquente des foyers épidémiques d'origine alimentaire dans l'UE ».
Près d'un foyer épidémique d'origine alimentaire sur trois dans l'Union européenne en 2018 a été causé par la bactérie Salmonella. C'est l'une des principales conclusions du rapport annuel sur les tendances et les sources des zoonoses publié aujourd'hui par l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) et le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC).

Quand on lit ce résumé d’un audit en République tchèque, on se dit que Salmonella a de beaux jours devant lui en dépit de la législation de l’UE ...

Voici donc le résumé du rapport final d'un audit réalisé en République tchèque du 11 au 21 juin 2019 afin d'évaluer la mise en œuvre des actions réalisées en réponse aux audits précédents sur les contrôles officiels de la production de viande de volailles et de produits dérivés de celle-ci et les programmes nationaux de contrôle de Salmonella dans les populations particulières de volailles.

Ce rapport décrit les résultats d'un audit en République tchèque, du 11 au 21 juin 2019, dans le cadre du programme de travail publié de la DG Santé et Sécurité alimentaire.

L'objectif principal de l'audit était d'évaluer la mise en œuvre et l'efficacité des mesures prises par l'autorité compétente en réponse aux recommandations formulées lors des audits précédents effectués sur la production de viande de volailles et de produits dérivés et de Salmonella chez les volailles. Les résultats liés à Salmonella dans la volaille et, en particulier, aux programmes nationaux de lutte contre Salmonella sont décrits dans un rapport séparé.

Le rapport conclut que le système tchèque de contrôle officiel de la viande de volailles et des produits à base de viande de volaille s'est amélioré depuis le dernier audit, en particulier en termes de performance et d'efficacité, et que les mesures correctives prises par l'autorité compétente ont effectivement permis de traiter 4 des 6 recommandations de l'audit de 2010. Néanmoins, les lacunes détectées lors de l'audit montrent que certaines non-conformités ne sont pas détectées/enregistrées lors des contrôles officiels et, par conséquent, aucune mesure d'application n'est prise pour les corriger.

En outre, et comme cela a été constaté lors de l'audit précédent, la pratique du lavage des carcasses de volailles après éviscération et avant l'inspection post mortem continue d'être une non-conformité qui n'est pas identifiée ou en tout cas non corrigée par aucun niveau de l'autorité compétente, lors de leurs contrôles.

La contamination étant éliminée avant que les oiseaux ne soient présentés pour une inspection post mortem, cette pratique empêche les agents de prendre la décision appropriée concernant la viande et, en outre, empêche les agents de contrôle de demander aux opérateurs d'adapter leur production afin de minimiser la contamination de la chaîne de production et la viande, conformément à la législation de l'UE.

Par conséquent, la recommandation sur ce point contenue dans le précédent rapport d'audit (recommandation n°5) n'a pas été effectivement prise en compte ni par l'autorité compétente ni par les opérateurs. Ce point est particulièrement important étant donné que l'équipe d'audit a constaté une augmentation de la production sans augmenter les capacités des abattoirs, ce qui a un impact négatif sur l'hygiène de la production et également sur le maintien de la chaîne du froid dans la viande fraîche.

L'hygiène de la production et la contamination des carcasses étaient déjà des problèmes identifiés lors de l'audit de 2010, qui sont encore exacerbés par la volonté actuelle d'augmenter la production dans les établissements.

Le rapport contient des recommandations à l'autorité compétente tchèque pour remédier aux lacunes identifiées.

mercredi 15 janvier 2020

Améliorer l'organisation du contrôle de la sécurité sanitaire des aliments ? Beaucoup de bruit pour rien ...


« Ce que dit le rapport des corps d’inspection sur l’avenir de la DGCCRF et de la police sanitaire », selon Acteurs Publics du 15 janvier 2020.

Pour mémoire, le 26 avril 2019, lancement par quatre ministres d'une mission inter-inspections pour améliorer l'organisation du contrôle de la sécurité sanitaire des aliments.

Le 23 décembre 2020, directeur général de l’alimentation s’était fendu de quelques ligne dans une interview sur « Un projet de réorganisation des contrôles sanitaires est en cours. Où en est-on ? »
La mission inter-inspections sur l’organisation des contrôles relatifs à la sécurité sanitaire des aliments a rendu son rapport récemment. La mission était mandatée pour faire une analyse critique du dispositif existant afin de le rendre plus efficace et plus lisible pour les citoyens et les entreprises. Les conclusions de la mission doivent désormais être analysées avant que les arbitrages ne soient rendus.

On n’en saura pas plus, le rapport étant classé secret défense ...

Que nous dit Acteurs Publics, pas grand-chose en réalité ...mais c'est à vous de vous en faire une opinion, après la lecture de cet article ...
Dans son rapport, la mission interinspections sur l’organisation du contrôle de la sécurité sanitaire des aliments privilégie le rattachement à la direction générale de l’alimentation du « principal des compétences en matière de sécurité sanitaire des aliments, sans pour autant renoncer au rôle de la DGCCRF en matière de protection du consommateur et de loyauté ». 
La délégation au privé de tâches à faible valeur ajoutée est également préconisée par les corps d’inspection.
Pas de big bang en vue pour la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) ? C’est la question qui se pose à la lecture du rapport top secret de la mission interinspections sur l’organisation du contrôle de la sécurité sanitaire des aliments, que Solidaires CCRF & SCL s’est procuré et qu’Acteurs publics a pu consulter.
Composée de l’inspection générale des Finances (IGF), de l’inspection générale des Affaires sociales (Igas), de l’inspection générale de l’Administration (IGA) et du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER), cette mission avait été chargée par le gouvernement Philippe, en avril dernier, de plancher sur les voies d’amélioration de cette organisation.
Le lancement de cette mission était alors directement lié aux rumeurs d’un rattachement de la DGCCRF sous forme d’une nouvelle agence au ministère de l’Agriculture en vue de la création d’une police sanitaire unique. Une rumeur née des annonces du ministre de l’Agriculture, Didier Guillaume, aux organisations syndicales de son ministère début mars et à laquelle Bercy – l’actuelle autorité de tutelle de la DGCCRF – est défavorable.

Trois scénarios étudiés
« Les travaux de la mission confirment que la répartition actuelle des contrôles de la sécurité sanitaire de l’alimentation entre la direction générale de l’alimentation [DGAL, rattachée au ministère de l’Agriculture] et la DGCCRF est inutilement complexe, indique le rapport. Une meilleure répartition des responsabilités est donc nécessaire pour améliorer l’efficience et la lisibilité du dispositif. »
Comme le gouvernement l’avait demandé, la mission devait expertiser 3 options possibles :
  • la création d’une nouvelle entité ou le rattachement à des entités existantes ;
  • la modification du périmètre des compétences opérationnelles respectives des différentes administrations ;
  • et, enfin, la délégation de certains contrôles.
Ce sont finalement ces deux dernières options qui ont le plus largement retenu l’attention de la mission inter-inspections.

Exit l’agence 
Exit donc la création d’un opérateur unique ou d’une agence : « Si une agence permettait d’unifier la politique publique de sécurité sanitaire des aliments, elle mettrait en péril les deux directions générales ainsi que les directions départementales interministérielles », explique ainsi le rapport.
Dans le cadre de leurs auditions, les directions départementales de la cohésion sociale et de la protection des populations (DDCSPP) ont ainsi signifié leur opposition à cette réforme, « qui aurait pour conséquence de défaire ce qui a été réalisé depuis la Réate [la réforme de l’administration territoriale de l’État, entrée en vigueur en 2010] alors même que les efforts commencent à porter leurs fruits selon eux en termes d’intégration des équipes ».

Rattachement à la DGAL du « principal des compétences »
La mission a donc « privilégié » le rattachement à la DGAL du « principal des compétences » en matière de sécurité sanitaire des aliments.
« Cette hypothèse consisterait en la création d’un bloc de compétences dédié au risque sanitaire des aliments à la DGAL et d’un bloc de compétences dédié à la loyauté et la protection des consommateurs à la DGCCRF, sans revenir sur les capacités des DDCSPP à organiser et mutualiser le travail de leurs équipes », indique le rapport.
« Une telle hypothèse reviendrait à transférer de la DGCCRF à la DGAL le contrôle sanitaire » portant sur plusieurs aliments et composants. Et de citer les cas des contrôles sur les denrées végétales et d’origine végétale, des denrées alimentaires destinées aux nourrissons et aux enfants en bas âge, des transports de denrées alimentaires…

Service minimum pour un peu de cohérence des actions de contrôles ... 
Quant aux cas particuliers actuellement de la compétence de la DGCCRF (allergènes, additifs, arômes, auxiliaires technologiques, matériaux au contact des denrées, ingrédients ionisés et OGM), ceux-ci « pourraient soit devenir une compétence partagée (au nom de l’unicité de l’approche par produit puisque la plupart d’entre eux concernent tant l’alimentaire que le non-alimentaire), soit être de la compétence exclusive de la DGAL lorsque le risque concerne les denrées alimentaires (au nom de l’unicité de l’approche de la sécurité de la chaîne alimentaire). »

Création d’un coordonnateur interministériel 
Pour la mission d’inspection, la clarification des champs de compétences respectifs « doit aussi s’accompagner d’une réelle coordination » entre la DGAL et la DGCCRF en particulier et « plus secondairement » avec la direction générale de la santé (DGS), « notamment dans la programmation des contrôles ».
« Du fait d’un long historique de relations difficiles entre ces deux administrations, qui n’ont pas su trouver d’elles-mêmes un modus operandi satisfaisant,  la mission propose la création d’un coordonnateur interministériel ad hoc chargé d’assurer cette cohérence d’action », estiment les corps d’inspection.
Très drôle cette «  réelle coordination », on croit rêver, quant à la création d’un coordonnateur, c’est l’arbre qui cache l’armée mexicaine … [le président de la commission sur l’affaire Lactalis avait dénoncé une « armée mexicaine » avec « trois ministères : la Santé, Bercy et Agriculture, c'est pas possible ». Voir ici.]

Délégation de tâches à faible valeur ajoutée 
S’agissant enfin des possibilités de délégation de certaines missions au secteur privé, la mission estime que « la délégation de tâches à faible valeur ajoutée (prélèvements dans le cadre des plans de surveillance et de contrôle (PSPC), contrôle des établissements dits de remise directe*) permettrait de recentrer les services de l’État sur les contrôles ayant le plus fort impact, et notamment la transformation ».
Le coût de cette délégation pour la remise directe « atteindrait 20 millions d’euros par an à pression de contrôle constante », poursuit la mission d’inspection, qui propose une augmentation de la contribution des professionnels au coût des contrôles « au moins à la hauteur du coût des délégations ».
* Par remise directe, on entend « toute cession, à titre gratuit ou onéreux, réalisée entre un détenteur d’une denrée alimentaire et un consommateur final destinant ce produit à sa consommation », indique le rapport.

Il ne me parait pas pertinent de confier au secteur privé les « prélèvements dans le cadre des plans de surveillance et de contrôle (PSPC) ».

Dans de nombreux cas, les résultats des prélèvements réalisés par le secteur privé et le secteur publics des plans de surveillance ne donnent pas les mêmes résultats et peut engendrer des dérives et par conséquent une perte de confiance ...

Quand au contrôle des établissements dits de remise directe, on va faire appel au privé faute de moyens publics, nouvelle ère en perspective ...

Bref, tout ça pour ça !

Complément du 17 janvier 2020. On lira cet article du 17 janvier 2020 paru dans Food Safety NewsLa décision de l'USDA d'externaliser les inspections est la recette d'un désastre (USDA move to outsource inspections is recipe for disaster).

On lira aussi dans Miroir Social du 17 janvier 2020 :
Fuites organisées du rapport sur l’organisation des contrôles de sécurité sanitaire des aliments
Alors que, depuis des mois, les organisations syndicales se voient opposer un refus de communication sur le dossier sensible de la mission inter-inspections sur l’organisation des contrôles de sécurité sanitaire des aliments, nous apprenons ces jours-ci que le contenu du rapport était largement évoqué, tant par l'un des syndicats de la CCRF (Direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) et la revue Acteurs Publics qui vient d'en publier de larges extraits. Curieuse conception de la transparence et du dialogue social dont on nous rebat régulièrement les oreilles. Drôle de nouveau monde. (...) 
... d'après ces fuites plus ou moins organisées, si l'idée d'un opérateur ou d'une agence unique rattachée au Ministère de l'Agriculture semble écartée, il n'en reste pas moins que plusieurs scénarios sont évoqués parmi lesquels :
  • un regroupement à la Direction générale de l'alimentation (DGAL) du principal (ou de l'intégralité ?) des compétences en matière de sécurité sanitaire des aliments « sans pour autant renoncer au rôle de la DGCCRF en matière de protection du consommateur et de loyauté » ;
  • la création d'un coordonnateur interministériel ;
  • la possibilité de déléguer certaines missions ou tâches « à faible valeur ajoutée » au secteur privé, la mission considérant que les services de l'État devraient se recentrer sur les contrôles ayant les conséquences les plus fortes. Avec quels moyens ?

Le système de sécurité sanitaire des aliments de l’Australie est tombé bien bas

« Le système de sécurité sanitaire des aliments de l’Australie est tombé bien bas », source Doug Powell du barfblog.

Adele Ferguson de The Age a écrit que la sécurité des aliments fait de nouveau la Une des journaux suite à une investigation sur la chaîne d’hamburgers Grill’d.

La longue liste de transgressions en matière de sécurité des aliments dans la chaîne d’hamburgers Grill’d décrite dans une série de fuites du rapport d'audit interne, de documents internes, un rapport du conseil municipal local et des dizaines de photos du personnel sur les aliments et la sécurité sanitaire, a déclenché une réaction des réseaux sociaux.

Afin de diluer le dégoût du public, Grill'd a annoncé qu'il embaucherait un auditeur alimentaire mondial pour revoir ses pratiques de sécurité des aliments et de travail.

Mais dans le processus d'exposer le scandale de l'exploitation de travailleurs et du scandale de la saleté, il est devenu clair qu'il y avait un autre scandale en attente : un manque général d'application par les autorités compétentes à propos des règles d'hygiène alimentaire et des amendes si faibles qu'elles ne jouent pas leur rôle de dissuasion.

Prenez par exemple, Grill'd à Windsor, Victoria, le conseil municipal de Stonnington a émis un avis d'inspection pour « non-conformités majeures » en octobre 2018. Il a déclaré qu'il n'avait pas de systèmes de nettoyage efficaces en place, ce qui est une exigence de base de tout restaurant.

Ce qui est encore plus inquiétant, c'est que le conseil a admis que les mêmes non-conformités se produisaient chaque année et que « des procès-verbaux d'infraction pourraient être émis si cela continuait ».

En d’autres termes, l’avis d’inspection du Conseil et les menaces molles étaient inefficaces.

Cela n'a pas été mieux démontré au début du mois de décembre lorsqu'une photo a été prise et publiée sur les sites Internet de The Age et du Sydney Morning Herald d'une souris à l'intérieur d'un plateau de pains pour burger (buns) au sol du Grill’d de Windsor.

La réaction du conseil a été de ne pas informer le public. Il a refusé de dire combien d'années de non-conformités il avait enregistrées au restaurant Grill'd Windsor et sa seule réaction aux pains pour burger (buns) stockés au sol, qui attirait une souris dans le restaurant infesté de nuisibles, a été de dire qu'il agirait si quelqu'un déposait une plainte.

À un niveau plus large, cela illustre les lacunes du système de sécurité sanitaire des aliments en Australie. Il semble que le public ne sache ce qui se passe que lorsqu'il est trop tard.

Le registre victorien de la santé des condamnations pour salubrité des aliments est une révélation. En 2019, seuls quelques cas ont été portés devant les tribunaux et ont été condamnés, ce qui a entraîné une amende minuscule.

Les lois peuvent être strictes, mais si elles ne sont pas correctement contrôlées et appliquées, les choses s'effondrent.

mardi 14 janvier 2020

Mise à jour de la fiche de danger biologique transmissible par les aliments : Clostridium botulinum


L’Anses a publié le 20 décembre 2019 un avis relatif à la mises à jour des fiches de description de danger biologique transmissible par les aliments.
L’Anses s’est autosaisie pour la réalisation de la mise à jour des fiches suivantes de description de danger biologique transmissible par les aliments :
  • le 30 mars 2016 concernant la fiche relative à Clostridium botulinum (saisine n°2016-SA-0074) ;
  • le 1er décembre 2016 concernant la fiche relative aux Vibrions entéropathogènes (saisine n°2016- SA-0272).

Concernant la fiche Clostridium botulinum, Clostridium neurotoxinogènes, j’ai noté :

Principaux aliments à considérer
Les aliments les plus souvent impliqués dans les foyers de botulisme sont des conserves et des produits de fabrication familiale ou artisanale tels que :
  • mortadelle, jambon cru salé et séché, charcuteries (saucisse, pâté) [toxine de type B] ;
  • conserves de végétaux (asperges, haricots verts, carottes et jus de carotte, poivrons, olives à la grecque, potiron, tapenade, etc.), salaisons à base de viande de boeuf [toxine de type A] ;
  • poisson salé et séché, marinades de poisson, emballé sous vide [toxine de type E].
Le miel contaminé par des spores de C. botulinum est le seul aliment connu pour la transmission du botulisme infantile.
Exceptionnellement, des produits industriels peuvent être impliqués (2 foyers en 2008, 4 foyers en 2011-2012, 3 foyers en 2013-2015). L’origine alimentaire d’un des foyers à C. baratii en 2015 était une sauce bolognaise préparée à partir de viande hachée industrielle et servie dans un restaurant.

Recommandations aux consommateurs
  • Hygiène de la préparation des aliments à conserver (nettoyage soigneux des végétaux, hygiène de l'abattage des animaux à la ferme et de la préparation des viandes, propreté des récipients et des emballages).
  • Respect des consignes de stérilisation des fabricants (températures/temps, nombre d'unités de conserves par stérilisateur). Une cuisson par ébullition est insuffisante pour stériliser les denrées alimentaires.
  • Les boîtes de conserve déformées/bombées ou celles dégageant une odeur suspecte à l'ouverture ne doivent pas être consommées. Lors de l’ouverture des bocaux de verre, le bruit provoqué par l’entrée d’air doit être entendu.
  • Pour les jambons de préparation familiale, il est impératif de respecter les concentrations en sel de la saumure et le temps de saumurage de façon à ce que les concentrations en NaCl et en nitrites inhibitrices de la croissance de C. botulinum atteignent le coeur du jambon.
  • Le respect de la chaîne du froid est indispensable pour les préparations n'ayant pas subi de traitement thermique ou l'ayant subi à un niveau insuffisant.
  • Pour les denrées du commerce, il est nécessaire de respecter les consignes de conservation au froid et les dates limites de consommation.
  • Ne pas faire consommer du miel aux enfants de moins de 12 mois.
A noter que pour les opérateurs, il est recommandé les bonnes pratiques d’hygiène en apiculture pour limiter la contamination du miel par C. botulinum.

Pourtant en 2012, un avis de l’Anses indiquait
La consommation de miel contaminé par des spores de C.botulinum est le seul facteur de risque alimentaire de botulisme infantile documenté à ce jour. Compte tenu de l’absence de mesures de maîtrise spécifique de la contamination du miel par C. botulinum chez le producteur, la gestion du risque de botulisme infantile lié au miel ne peut être assurée que par l’information des parents. Ainsi, le futur guide pourrait utilement recommander un étiquetage préventif concernant la consommation du miel pour les nourrissons de moins de 12 mois comme préconisé dans les avis et documents de l’Agence et appliqué aux Etats-Unis et au Royaume-Uni.

En novembre 2015, le blog faisait état de la Parution d’une fiche pratique de la DGCCRF sur l’étiquetage du miel, et toujours pas de mention, « Pas de miel pour les enfants de moins d’un an », c’est toujours le cas aujourd’hui malgré la mise à jour de cette fiche de danger microbiologique.

Choses lues sur les norovirus infectieux et non-infectieux


Selon une nouvelle parue le 13 janvier 2020 dans la revue PROCESS Alimentaire, s’agissant de la « Détection des norovirus, il y aurait des pistes qui pourraient réduire l’ampleur des rappels » (article réservé aux abonnés).
De nombreuses zones de production conchylicoles ont été fermées suite à la présence de norovirus. Une catastrophe économique inédite pour cette filière. L’UMT Actia VIROcontrol poursuit les investigations pour développer une méthode permettant de discriminer les norovirus infectieux des non infectieux. De quoi réduire le nombre de références rappelées.

J’avoue ma méconnaissance de la discrimination des norovirus infectieux des non-infectieux …, je pensais, mais je ne dois pas être le seul à croire que les norovirus étaient tous infectieux ….
Gros coup dur pour la filière conchylicole. Depuis début décembre 2019, 179 suspicions de toxi-infections alimentaires collectives (Tiacs), liées à la consommation d'huîtres ont été signalées aux Agences régionales de santé et aux Directions départementales de la protection des populations de plusieurs régions. 23 zones conchylicoles ont été fermées (2 zones en Charente Maritime ; 2 zones en Ille et Vilaine ; 8 zones dans le Morbihan ; 2 zones dans la Manche ; 3 zones en Loire Atlantique ; 4 zones dans l’Hérault et 2 zones dans le Calvados) et plus de 400 entreprises sont concernées par les mesures de restrictions et par une succession de rappels produits. Et cela en pleine saison des huîtres !
« Cela n’est jamais arrivé dans la filière. Plusieurs facteurs critiques ont conduit à cette crise d’une ampleur inédite : l’épidémie hivernale de gastro-entérite, qui a beaucoup touché les régions du littoral, une pluviométrie importante et un assainissement parfois insuffisant des eaux usées, qui ont contribué au rejet de norovirus dans les cours d’eau puis en mer », commente Nicolas Boudaud, responsable des projets virologie pour Actalia.
Selon les études publiées, un individu malade développant des symptômes de gastro-entérite rejette entre 105 et 1010 particules de norovirus par gramme de selles, autant susceptibles d’être concentrées par les organismes filtreurs si les eaux usées ne sont pas traitées. L’inconnue de cette équation est le caractère infectieux de ces norovirus, ces derniers n’étant pas cultivables en routine en laboratoire.

L’Anses évoque jusqu’à 1011 particules/g de selles ...
L’enjeu est donc de déterminer si le génome du norovirus l’est ou non. « Le principal point faible de la norme ISO 15216 pour la détection du génome concerne l’absence d’information sur leur caractère infectieux lorsque leur génome est détecté. Ce qui entraîne le retrait potentiellement injustifié de lots du marché par application du principe de précaution dès lors que du génome est détecté, alors même que le risque sanitaire pour le consommateur n’est pas prouvé », rappelle le responsable des projets virologie.

L’Action de l’UMT Virocontrol concerne la mise au point d’une méthode directe ou indirecte pour discriminer les virus infectieux des virus non infectieux dans les aliments à risque (coquillages vivants, végétaux frais), qui soit précise, sensible et économiquement compétitive.

C’est une piste intéressante, mais une étude britannique de 2012 n’avait pas été concluante, « A Critical Review of Methods for Distinguishing Infectious and Non-Infectious Norovirus », à suivre ...

Un dernier point, quand il y a rappel, cela n’est pas fait en application du principe de précaution, mais par mesure de précaution, nuanace de taille … voir cet article à ce sujet ...