Le blog vous en avait déjà parlé dans «Épidémies majeures à E. coli et à Salmonella mises en évidence lors d'une conférence, des investigations sont toujours en cours».
Une affiche proposée par plusieurs scientifiques français a été présentée à l’ESCAIDE, European Scientific Conference on Applied Infectious Disease Epidemiology (ESCAIDE) a couvert l’épidémie à E. coli provenant de pizzas Nestlé en France, conférence organisée par l’ECDC ; elle a pour titre, An outbreak of Escherichia coli-associated haemolytic uremic syndrome linked to consumption of an unexpected food vehicle, France 2022 ou Une épidémie de syndrome hémolytique et urémique associé à Escherichia coli liée à la consommation d'un véhicule alimentaire inattendu, France 2022.
J’ai souhaité revenir sur cette affiche car je n’en comprends pas les conclusions, à vous de voir ...
Contexte
En février 2022, Santé publique France a identifié un excès de cas de syndrome hémolytique et urémique pédiatrique. Nous avons mené des investigations épidémiologiques, microbiologiques et de traçabilité pour identifier la source de l’épidémie et mettre en œuvre des mesures de maîtrise.
Méthodes
Nous avons défini les cas comme des infections à Escherichia coli producteurs de shigatoxines (STEC) O26:H11 ou O103:H2 avec des souches épidémiques identifiées par séquençage du génome entier (WGS) et l'apparition des symptômes depuis le 1er janvier 2022. Nous avons interrogé les soignants sur les expositions alimentaires avant les symptômes. début. Les informations sur les cartes de fidélité des supermarchés ont été demandées pour identifier les achats et guider les investigations de traçabilité. Les isolats de selles et d'aliments ont été caractérisés par MLVA* et WGS au centre national de référence. Nous avons mené une étude cas-témoins incluant des cas O26:H11 et des témoins de parents inscrits sur GrippeNet.fr (système de surveillance en ligne basé sur la population).
Résultats
Nous avons identifié 55 cas sur tout le territoire avec une apparition entre le 18 janvier et le 25 mars (âge moyen 7 ans ; sexe ratio H/F : 1,3). Deux enfants sont décédés. Quatre-vingt-huit pour cent (35/40) des cas pour lesquels des informations étaient disponibles ont déclaré avoir consommé de la pizza surgelée de la marque X. Quatre-vingt-quinze pour cent (35/37) des cas avec des achats de pizza sur cartes de fidélité ont acheté la marque X. L'étude cas-témoin a confirmé une forte association entre la consommation de pizza de la marque X et la maladie (Odd Ratio: 116 [IC 95% 27-503] ). Des prélèvements de pizza de marque X provenant des maisons de cas et du fabricant étaient positifs pour les deux souches d'épidémie.
Conclusion
Les investigations sur l’épidémie ont confirmé que les pizzas surgelées étaient à l'origine de la plus grande épidémie de SHU à STEC jamais documentée en France. Le 18 mars, la marque X a volontairement rappelé et retiré les pizzas incriminées. Cette épidémie est très inhabituelle, car les températures et les temps de cuisson typiques des pizzas surgelées devraient éliminer le risque d'infection. Les investigations se poursuivent pour comprendre l'origine de la contamination et la persistance des STEC dans les pizzas cuites.
*acronyme pour Multiple Loci VNTR Analysis ou analyse de plusieurs locus VNTR. VNTR est lui-même l'acronyme de Répétition en tandem à nombre variable.
La question que je me pose est comment des STEC ont-ils pu persister dans des pizzas cuites ? Bien entendu, les STEC comme les autres micro-organismes dangereux sont détruits par la chaleur, ils n’ont pas pu pas persister à une cuisson correcte des pizzas, mais vraisemblablement les STEC ont persisté après une cuisson insuffisante des pizzas, soit dans un four micro-ondes ou d’après des instructions de cuisson insuffisantes sur l’emballage. L’enquête devra déterminer cela précisément.
Quant à l’origine de la contamination, elle est largement connue, puisqu’il y a déjà eu aux États-Unis des épidémies liée à de la faine crue, et pour la France, Nestlé lui-même l’a reconnu, «les analyses effectuées sur des prélèvements de farine et certains échantillons de produits finis ont permis de déceler la présence de la bactérie E. coli STEC, que nous n’avions pas détectée.»
Le véhicule de contamiantion, la farine, est bien connu comme pouvant héberger des pathogènes depuis plusieurs dizaines d’années, voir à ce sujet la bande dessinée de Calvin et Hobbes datant du 26 janvier 1993 à propos des dangers de la farine crue et Salmonella lors de la fabrication de gâteaux !