mardi 11 octobre 2022

Hé les autorités sanitaires de France, surtout, ne vous pressez pas pour publier un avis de rappel. Nouvel épisode avec du tahini et Salmonella inside !

Dans un article récent, j’indiquais que pour les produits, Tahini et halva en Suède, c'est open bar pour Salmonella.

Dans un autre article, je montrais comment nos autorités sanitaires ont fait preuve d’une certaine lenteur, d’où un retard sensible entre la notification au RASFF de l’UE par la France et le rappel auprès des consommateurs, soit 12 jours d’écart, les consommateurs en France apprécieront.

Bis repetita, si je peux dire !

On ne compte plus les notifications au RASFF de l’UE et des rappels de pâte de sésame ou de tahini dans l’UE comme, mais aussi en France.

RappelConso nous informe le 11 octobre 2022 du rappel de pâte de sésame Tahin, 460 g, de la marque Sekeroglu de Turquie, pour cause de présence de Salmonella. On nous dit qu’il s’agit d’un produit concerné par un rappel à l’échelle européenne, c'est donc du sérieux, oui mais voilà, patatras, la France est très en retard avec ce rappel du 11 octobre.

En effet, l’Allemagne a notifié au RASFF de l’UE la présence de Salmonella dans ce produit le 27 sepembre 2022 et les autorités allemandes, le BVL, ont rappelé le produit le même jour !

Voici donc concernant un rappel à l’échelle européenne, la France qui met 14 jours avant de publier un avis de rappel, de mieux en mieux ... les consommateurs sont les dindons de cette inertie !

14 jours d’écart avec l’Allemagne, et dire qu’il y en a encore qui croient au couple Franco-Allemand ?

Naples, de la mandragore confondue avec des épinards = intoxication alimentaire !

«Naples, de la mandragore confondue avec des épinards: la marchandise venait des Abruzzes», source Italie News du 7 octobre 2022.

Ils ont acheté des légumes en croyant que c’était des épinards mais c’était probablement mandragore. Dix d’entre eux de la région napolitaine, Pozzuoli, se sont intoxiqués et se sont retrouvés à l’hôpital, l’un d’eux est également sur un pronostic réservé. La mandragore, semblable aux épinards et aux betteraves, dans la légende aurait des pouvoirs thaumaturgiques, est associée aux sorcières, ou potions magiques utiles pour l’amour et la fertilité, mais peut au contraire être toxique.

Mandragore, la marchandise venait des Abruzzes
Comme le rapporte Adnkronos, l’acheteur qui a acheté des palettes d’épinards à un producteur des Abruzzes, qui auraient été contaminés par la mandragore et qui auraient provoqué une intoxication, a été identifié. Ceci est le résultat des dernières mises à jour envoyées au conseiller à la santé de la municipalité de Naples, Vincenzo Santagada du Centro Agro Alimentare di Napoli (Caan). Grâce à la collaboration du même opérateur, selon la municipalité de Naples, il a été possible de tracer, avec les carabiniers et l’Azienda sanitaria locale (ASL) de Napoli 2 Nord compétents sur le territoire de Pozzuoli, la chaîne d’achats et, par conséquent, d’identifier les les marchandises potentiellement contaminées encore présentes au Caan, promptement placées sous saisie. Désormais, les autorités compétentes s’emploient à identifier les marchandises présentes dans les points de vente extérieurs au Centre.

Naples, dix personnes finissent à l’hôpital
Des personnes qui se sont retrouvées à l’hôpital font partie de familles distinctes qui, selon ce qui a été reconstitué hier matin par les carabiniers de la compagnie Pozzuoli qui sont intervenus à l’hôpital, auraient ingéré des légumes probablement vénéneux, achetés dans divers magasins des municipalités de Quarto et Mont de Procida. La symptomatologie serait imputable à la mandragore.

L’alarme à la mandragore s'est déclenchée
L’alarme s’est déclenchée immédiatement. La municipalité de Naples a invité les citoyens à «ne pas consommer d’épinards frais mais uniquement congelés jusqu’à ce que l’affaire soit réglée». Le Caan a activé les procédures de retrait du produit du marché. Les investigations des carabiniers sont immédiatement déclenchées en synergie avec la Nuclei Antisophistica e Sanita (NAS) des carabinieri et avec des personnels spécialisés de l’ASL. La chaîne de distribution a été parcourue pour tracer les lots de légumes susceptibles de présenter un risque de présence de mandragore.

Suite aux cas d'empoisonnement à la mandragore, confondus avec les banals épinards frais, la municipalité de Naples invite les citoyens à «ne pas consommer d'épinards frais mais uniquement congelés jusqu'à ce que l'affaire soit réglée».

En fait, la marchandise, qui venait des Abruzzes, était originaire des Pays-Bas. L’Italie a notifiée au RASFF de l’UE le 10 octobre 2022 la suspicion de mandragore dans des épinards des Pays-Bas. La notification rapporte intoxication de deux personnes par des parasympatholytiques (anticholinergiques et antimuscariniques) et spasmolytiques.

Il me semble que les deux personnes en question sont celles encore hospitalisées. La notification ne tient pas compte des personnes sorties de l’hôpital.

NB : Merci à Joe Whitworth de m’avoir signalé cette information.
La photo représente de la mandragore.

De nombreux médecins généralistes français se sentent obligés de prescrire des antibiotiques. One Health ?

«Des enquêtes téléphoniques indiquent que de nombreux médecins généralistes français se sentent obligés de prescrire des antibiotiques», source CIDRAP News.

Des enquêtes téléphoniques auprès du grand public et des médecins généralistes (MGs) ont révélé que, malgré une baisse globale de l'utilisation des antibiotiques en France au cours de la dernière décennie, plus d'un tiers des cliniciens signalent une pression pour prescrire des antibiotiques, ont rapporté des chercheurs la semaine dernière dans Antimicrobial Resistance & Infection Control«Perceptions et attitudes face à la résistance aux antibiotiques dans le grand public et les médecins généralistes en France».

Pour aider à éclairer les futures campagnes nationales de sensibilisation sur la résistance aux antimicrobiens, des chercheurs de Santé publique France ont mené deux enquêtes téléphoniques en 2019 et 2020. La première a exploré la consommation d'antibiotiques et les connaissances et croyances sur la résistance aux antibiotiques auprès d'un échantillon représentatif du grand public âgé de 15 ans et plus. La seconde a exploré l'évolution des pratiques de prescription et des attitudes envers les demandes d'antibiotiques des patients parmi un échantillon représentatif de 388 médecins généralistes.

Dans l'enquête grand public, 27% des personnes interrogées ont déclaré avoir reçu des antibiotiques au cours des 12 derniers mois et 54% des personnes ayant un enfant de 6 ans et moins ont déclaré que leur enfant avait reçu un antibiotique au cours de la même période.

Dans l'enquête chez des médecins généralistes, 65% déclarent avoir réduit leur prescription d'antibiotiques au cours des 5 dernières années, et 64% déclarent ne pas prescrire automatiquement d'antibiotiques mais conseillent aux patients de les contacter dans les 2 ou 3 jours si les symptômes persistent. Parmi les médecins généralistes, 33% ont déclaré avoir souvent des patients qui insistent pour avoir des antibiotiques, et que les patients âgés présentant des comorbidités étaient parmi les plus exigeants. Seuls 3% du grand public déclarent faire pression sur leur médecin généraliste pour qu'il prescrive un antibiotique.

La grande majorité des répondants à l'enquête grand public ont exprimé leur confiance dans leur médecin généraliste, qu'il leur ait prescrit des antibiotiques (89%) ou non (91%). Seulement la moitié des personnes interrogées ont déclaré savoir que les antibiotiques n'agissent que sur les bactéries, et 38% ont déclaré comprendre exactement ce qu'est la résistance aux antibiotiques.

Une étude de 2020 de Santé publique France a révélé que, de 2009 à 2019, le nombre de prescriptions d'antibiotiques a diminué de 18% dans toutes les tranches d'âge, à l'exception des personnes âgées.

Les auteurs disent qu'une prochaine campagne de sensibilisation du public tiendra compte des résultats de l'enquête.

Dans la conclusion, les auteurs notent,
Bien que l'utilisation des antibiotiques diminue en France, la pression des patients sur les médecins généralistes pour qu'ils prescrivent des antibiotiques est très élevée. La population française n'a encore qu'une connaissance partielle de la résistance aux antibiotiques et doit être mieux informée, notamment les personnes âgées. Les médecins généralistes sont des ambassadeurs clés dans la réduction de l'utilisation des antibiotiques. Une nouvelle campagne d'information publique tiendra compte des résultats de notre enquête en 2022-2023. Elle sera précédée d'un accompagnement et d'une information des professionnels de santé.

Retour à la normale aux Pays-Bas, plus de 800 foyers de cas d'intoxication alimentaire en 2021

Eh oui, cela ressemble à un grand retour à la normale après la parenthèse COVID-19, on pourrait aussi citer la Finlande, le Danemark, ...
«Les Pays-Bas enregistrent plus de 800 foyers de cas en 2021», source article de Joe Whitworth paru le 11 octobre 2022 dans Food Safety News.

Le nombre de foyers de cas d'intoxication alimentaire aux Pays-Bas a dépassé les 800 en 2021, selon l'Institut national de la Santé publique et de l'environnement (RIVM).

Au total, 838 foyers de cas, affectant 3 517 personnes, ont été signalées en 2021. Il s'agit d'une augmentation de 14% par rapport aux 559 foyers de cas en 2020 affectant 1 907 personnes et est également en hausse par rapport aux 735 foyers de cas en 2018 et 756 en 2019.

Salmonella et Campylobacter étaient encore responsables de la plupart des foyers de cas et des maladies au cours de la dernière année. Norovirus a été signalé beaucoup moins que les années précédentes pour la deuxième année consécutive.

Les données proviennent de l'Autorité néerlandaise de sécuritédes aliments et des produits de consommation (NVWA) et du Service de santé municipal (GGD).

Pathogène inconnu pour la plupart des foyers de cas
D'après les statistiques de la NVWA, la plupart des foyers de cas concernaient deux à quatre et cinq à neuf patients. Vingt personnes malades ou plus ont été enregistrées dans 13 foyers de cas, avec 71 et 79 patients dans deux incidents à norovirus. Plus de 400 personnes ont été affectées lors d'une épidémie causée par un pathogène inconnu. D'après les données du GGD, dans 28 foyers de cas, quatre personnes sont décédées de la listériose.

Un pathogène a été retrouvé chez des patients, des aliments ou des échantillons environnementaux pour seulement 28 des 838 foyers de cas. Les experts ont dit que le pourcentage de foyers de cas où un pathogène a été identifié continue de diminuer, mais la raison en est incertaine.

Salmonella a provoqué au moins 11 foyers de cas en 2021 avec 205 cas et cinq foyers de cas de Campylobacter ont été signalées avec 11 personnes malades.

Il y a eu deux foyers de cas à Listeria monocytogenes et le virus de l’hépatite A qui ont touché respectivement neuf et 24 personnes. Les STEC et Yersinia enterocolitica étaient tous deux liés à un foyers de cas avec 12 et six infections connexes.

Les consommateurs cuisinent à la maison plus souvent qu'avant la pandémie de coronavirus et plus de foyers de cas ont été signalées en milieu domestique que les années précédentes. En 2020 et 2021, le milieu privé a été le site de préparation dans en moyenne 10 à 15% des foyers de cas. En comparaison, de 2006 à 2019, ce paramètre était lié à une moyenne de 6,6% des foyers de cas.

Incidents résolus
Un pathogène a été détecté dans des aliments dans trois cas et dans des prélèvements environnementaux dans sept foyers de cas .

Listeria monocytogenes a été retrouvé dans des prélèvements de surveillance provenant de sites de production liés, via WGS, à un groupe de patients. Il a été retrouvé sur du saumon fumé dans un foyer de cas et sur du poisson fumé dans un autre.

Les Pays-Bas ont également été affectés par une épidémie internationale à Salmonella Braenderup causée par des melons Galia du Honduras. Le pays a enregistré 34 cas.

Dans deux des 18 foyers de cas où le pathogène n'a été retrouvé que chez le patient, il y avait un lien étroit avec une source de nourriture. L'épidémie à E. coli O157 dans le nord des Pays-Bas était liée à du carpaccio, un apéritif avec de la viande ou du poisson cru. Le filet américain, un type de tartinade de viande bovine crue, était à l'origine d'une épidémie à Campylobacter avec trois cas.

Lors de la plus grande épidémie touchant 402 personnes en octobre, un groupe de 900 employés a reçu un panier-repas d'une entreprise de restauration dans le cadre d'une session de formation dans 31 sites. La source probable était un sandwich au poulet végétalien. Les prélèvements fécaux étaient négatifs pour rotavirus, adénovirus, norovirus, sapovirus, STEC, Campylobacter, Salmonella et Shigella, mais aucun test de toxine n'a été effectué.

Une inspection de l'entreprise de restauration, au cours de laquelle des prélèvements alimentaires et environnementaux ont été prélevés, n'a révélé aucune lacune. Les prélèvements d'aliments restants étaient également négatifs pour les pathogènes, mais les tests pour Bacillus cereus et Clostridium perfringens n'ont pas été inclus car les méthodes d'analyse n'étaient pas disponibles au laboratoire de recherche sur la sécurité de aliments de Wageningen qui effectue des analyses de prélèvements pour la NVWA.

Un foyer de cas à Salmonella Enteritidis a rendu 26 personnes malades depuis 2018 et l'Allemagne a également signalé deux cas d’infection. Les isolats des patients correspondaient à un échantillon environnemental d'une ferme en 2019. Des mesures avaient été imposées au producteur afin qu'il ne puisse vendre que des œufs pour une transformation ultérieure et non aux détaillants en raison de la détection de Salmonella dans les poulaillers, mais celles-ci avaient été levées quelques mois avant le lien, en raison de résultats négatifs. Les mesures ont été rétablies jusqu'à ce que l'entreprise démontre que le problème est géré.

Complément
Le titre de l'information de la NVWA est «Plus de personnes malades à cause de la nourriture de leur propre cuisine». C'est bien de de se défausser sur les consommateurs quand on ne fait pas assez de contrôles ...

Efficacité des applications répétées de bactériophages sur des graines germées contaminées par Salmonella enterica

Un article en accès libre publié dans la revue Pathogens a pour titre «Efficacy of Repeated Applications of Bacteriophages on Salmonella enterica-Infected Alfalfa Sprouts during Germination» (Efficacité des applications répétées de bactériophages sur les germes de luzerne infectés par Salmonella enterica pendant la germination).

Résumé
Salmonella enterica non typhique est l'un des principaux pathogènes responsables des épidémies d'origine alimentaire dans une multitude de produits alimentaires, y compris les germes de luzerne, qui sont couramment consommés crus. L'industrie alimentaire a couramment utilisé des lavages chlorés, mais ces méthodes peuvent ne pas être perçues comme naturelles; cela peut être préjudiciable car une grande partie des germes sont destinés au marché biologique. Une méthode antimicrobienne naturelle et abordable qui a gagné en popularité est l'utilisation de bactériophages. Cette étude a comparé l'efficacité d'applications quotidiennes répétées et d'une seule application de deux cocktails de bactériophages distincts (SE14, SE20, SF6 et SE14, SF5, SF6) contre quatre Salmonella enterica (S. enterica) sur des graines germées de luzerne en germination des jours 0 à 7. Les résultats montrent que S. Enteritidis est le plus sensible aux deux cocktails avec une diminution d'environ 2,5 log UFC/mL au jour 0 avec le cocktail SE14, SF5 et SF6. Les populations de S. enterica sur toutes les souches ont continué à croître même avec des applications quotidiennes répétées de bactériophages, mais à un taux significativement réduit (p< 0,05) par rapport à une seule application de bactériophage. L'ampleur de la réduction dépendait de la souche de S. enterica, mais les résultats montrent les avantages de l'utilisation d'applications répétées de bactériophages pendant la germination des germes pour réduire les populations de S. enterica par rapport à une seule application de bactériophage.

Conclusion
Les résultats ont indiqué que, sur la germination des graines de luzerne, deux cocktails de phages distincts ont réduit les populations de S. enterica d'environ 0,4 à 3 log UFC/mL. Les cocktails de phages étaient incapable d'éliminer complètement les populations de S. enterica, mais des applications répétées de phages ont pu réduire davantage les populations de S. enterica par rapport à une seule application de J0 à J7. La réduction liées à des applications répétées de phages dépendait de la souche, mais les résultats montrent des avantages à utiliser plus d'une application avec un seul phage.

A notre connaissance, aucune étude n'a été menée à ce jour sur plus d'une application de phages, et cette étude a donné un aperçu de l'efficacité de applications répétées des phages contre S. enterica pendant la germination des graines de luzerne.

Des recherches plus approfondies sur l'alternance entre différents cocktails de phages chaque jour pendant la germination des germes peut être bénéfique pour réduire davantage les populations de S. enterica.

Commentaire
Aux Etats-Unis, dans une étude parue en 2016, les auteurs rapportent,
Depuis 1996, la FDA a été impliquée dans 48 épidémies associées à des graines germées, entraînant 2 499 cas, 179 hospitalisations et 3 décès. La majorité des éclosions ont été attribuées aux germes de luzerne (n = 30), suivis du trèfle (n = 7), du haricot mungo (n = 6) et de la poudre de chia germée (n = 1). Salmonella était le pathogène le plus couramment identifié (n = 34), suivi de E. coli (n = 12) et de Listeria (n = 2).

A cela, il me faut ajouter l’épidémie de gastro-entérite et de syndrome hémolytique et urémique de 2011 en Allemagne et en France. L’épidémie à E. coli O104:H4 est responsable de 48 décès en Allemagne et d'un en Suède. Le nombre total de cas signalés dans l'UE, la Norvège et la Suisse est de 4 178.

lundi 10 octobre 2022

Les pénuries alimentaires sont programmées avec maestria dans l'Union Européenne : le cas des Pays-Bas par André Heitz

Je reproduits de larges extraits de cet excellent article d’André Heitz car ce qui est train d’arriver ou arrivera peut-être aux Pays-Bas, mais, Dieu nous en garde, cela peut aussi arriver en France ...

«Les pénuries alimentaires sont programmées avec maestria dans l'Union Européenne : le cas des Pays-Bas», source article d’André Heitz* paru sur son blog Agriculture, alimentation,santé publique … soyons rationnels.

Avec une assiduité et une constance remarquables, faisant fi des avertissements climatiques, géopolitiques et sociétaux, l'Union européenne et certains de ses États membres planifient des pénuries alimentaires pour «sauver» la planète. Voici le cas des Pays-Bas.

Des manifestations paysannes à bas bruit dans certains pays
Il y a ce que l'on peut appeler les manifestations conjoncturelles, essentiellement liées à l'augmentation des coûts de production et l'insuffisance des mesures compensatoires gouvernementales.

Ce fut le cas en Espagne, où les agriculteurs ont manifesté à Albacete, Bajadoz, Murcie, etc. Il y a eu des «tractorades», mais le mois d'août n'a, semble-t-il, pas été aussi «chaud» qu'annoncé.

En Italie, la sécheresse et les pertes de production sont un facteur aggravant. C'est Milan qui a été bloqué en juillet, et les agriculteurs ont menacé de rouler sur Rome.

Des manifestations ont également eu lieu en Allemagne, en particulier le 31 août 2022 à l'appel de l'organisation Landwirtschaft verbindet Deutschland (l'agriculture crée des liens en Allemagne).

Tout cela se déroule à bas bruit. Les grands médias ne prêtent guère attention à ces événements, contrairement aux réseaux alternatifs et protestataires qui tentent visiblement de monter un mécontentement plus généralisé.

L'État stratège a frappé aux Pays-Bas
Ce sont les Pays-Bas qui présentent la situation la plus préoccupante. La presse française ne s'y est guère intéressée, alors même que le pays a connu des manifestations massives et parfois violentes. Signalons tout de même un article du Monde, de bonne facture, du 13 juillet 2022.

Répondant à des objectifs européens de rétablissement de la virginité écologique, le gouvernement de M. Mark Rutte a annoncé le 10 juin 2022 un plan de réduction des émissions d'azote de 50% à l'horizon 2030. À sa décharge – partielle – un tribunal avait décidé en 2019 que le pays devait faire beaucoup plus dans ce domaine.

S'illustre ici une dérive inquiétante de nos systèmes démocratiques : des gouvernements et parlements incapables de gérer le présent adoptent des lois fixant des objectifs ambitieux, que l'on sait irréalistes. C'est pour camoufler leur inaction et leur incompétence, ou encore complaire à des franges influentes de l'électorat et de l'opinion dite «publique». Rien de sérieux ne se produisant, les activistes saisissent des tribunaux forcément liés par les textes des lois, et aussi sous l'emprise du discours apocalyptique ambiant. Et les gouvernements – souvent nouveaux – sont sommés de prendre des mesures dévastatrices (ou trouver une autre échappatoire).

Nous avons du reste connu le même phénomène en France avec l'Affaire du Siècle… les activistes trouvent intérêt à saisir la justice dans les pays démocratiques, pas dans les États autoritaires ou à gouvernement illibéral...

Tous les secteurs économiques devront contribuer à l'effort, mais c'est l'agriculture, à l’origine de 46% des émissions – de protoxyde d’azote, d’ammoniac ou de nitrates issus des engrais azotés et des effluents d’élevage – qui a été plus particulièrement visée.

Des objectifs de réduction des émissions d'azote délirants
Le plan de la ministre de l'Environnement et de l'Azote (ça ne s'invente pas !), Christianne van der Wal, et du ministre de l'Agriculture, Henk Staghouwer, prévoit des réductions pouvant aller jusqu'à 97% dans les zones Natura 2000 et 70% dans 131 zones adjacentes, avec un minimum de 12%. Les provinces sont chargées de mettre au point les plans détaillés d'ici au 1er juillet 2023.

Un premier effet de ce plan a été la démission du ministre Henk Staghouwer, qui aura été en poste pendant à peine huit mois. «Je me suis demandé si j'étais la bonne personne pour superviser les tâches qui m'incombent», a-t-il déclaré. «Je suis arrivé à la conclusion que je ne suis pas cette personne.»

L'effet majeur porte évidemment sur l'agriculture, mais aussi sur les industries d'amont et d'aval et, par voie de conséquence, sur la production agricole et alimentaire du deuxième exportateur mondial, mais aussi sur l'ensemble du tissu social en zones rurales.

* André Heitz est ingénieur agronome et fonctionnaire international du système des Nations Unies à la retraite. Il a servi l’Union internationale pour la protection des obtentions végétales (UPOV) et l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI). Dans son dernier poste, il a été le directeur du Bureau de coordination de l’OMPI à Bruxelles.

Complément du 18 octobre 2022

De la présence d'ecstazy dans des vins français victimes d'une organisation criminelle

Apparemment les grands vins français sont la cible de personnes criminelles ...
Je relaie bien volontiers ce tweet de Joe Whitworth qui relate que «Plus tôt cette année, de la MDMA ou ecstasy cachée dans des bouteilles de champagne a été en quelque sorte vendue comme du champagne en Europe, empoisonnant 11 personnes et tuant 1 personne…

Pour en savoir plus,
- Voir le fil de la notification au RASFF,
Food Safety News a proposé deux articles.

L'affaire a rebondi avec ce communiqué de l'Australian Federal Police du 9 octobre qui signale «Deux arrestations, 300 kg de MDMA liquide cachés dans des bouteilles de Champagne saisies».

Il était une fois les pérégrinations de pancakes au chocolat entre la France, le RASFF et l’Italie, Listeria inside !

Ou comment l’UE ne fonctionne pas en matière de rappels de produits alimentaires ?
Le sous-titre aurait pu être, De la pseudo coopération entre les États membres de l’UE.

Je ne prendrai qu’un seul exemple pour illustrer le titre de court article.

- Le 22 septembre sont rappelés en France des pancakes chocolat suite à la mis en évidence de la présence de Listeria monocytogenes.
- Le 4 octobre 2022, la France notifie au RASFF de l’UE la présence de Listeria monocytogenes dans des pancakes au chocolat de France. La notification indique que le produit a été distribué en Italie.
- Le 10 octobre, le ministère de la Santé d’Italie informe du rappel de pancakes au chocolat pour cause de risque microbiologique. Listeria monocytogenes doit être un gros mot en Italie, donc on ne l’utilise pas avec les consommateurs. Ce n’est qu’en allant sur la fiche de rappel de l’importateur que l’on trouve la mention, «Non-conformité microbiologique : possible présence de Listeria monocytogenes».

Bilan de ce constat, pour la France, 12 jours entre le rappel en France et la notification au RASFF de l’UE, et six jours entre la notification au RASFF de l’UE par la France et la publication du rappel en Italie.

Et dire qu’il y en a qui croient encore aux intitulés au sein de l’UE, ainsi RASFF est sensé vouloir dire réseau d’alerte rapide, pouvez-vous répéter ? 

Question subsidiaire, et le consommateur, on s'en fout ?

Complément
Une version italienne revue par Roberto La Pira d'ill fatto alimentare est aussi disponible, Allerta in Francia per pancake con Listeria venduti anche in Italia. L’avviso arriva dopo 19 giorni.

Encore une Opération Alimentation Vacances dans le Val d'Oise : Deux restaurants fermés !

On se dit si tout le monde faisait comme le préfet du Val d’Oise, l’hygiène des restaurants se porterait mieux en France, c’est un avis personnel, mais jugez plutôt

Et voici donc le troisième article, issu du site Actu.fr du 6 octobre 2022, «Deux restaurants fermés à la suite de contrôles sanitaires à Cergy et L'Isle-Adam». Le préfet du Val-d'Oise a prononcé la fermeture administrative de deux restaurants de Cergy Port et de L'Isle-Adam pour des manquements aux règles d'hygiène.

Après la fermeture d’une boucherie à Gonesse à la suite de la découverte de 150 kg de viande avariée, ce sont deux restaurants du Val-d’Oise qui ont dû baisser leurs rideaux pour des raisons sanitaires, a annoncé la préfecture du Val-d’Oise ce jeudi 6 octobre 2022.

En début de semaine, des inspecteurs de la Direction départementale de la protection des populations du Val-d’Oise (Ddpp95) ont ainsi investi La Marina Café, située à Cergy-Port, et l’établissement Le Delhi, à L’Isle-Adam.

Propreté des lieux, conservation des aliments, date de péremption, traçabilité des produits… Les inspecteurs de la Ddpp n’ont rien laissé passer.

Saleté et tromperies sur les produits
Pour La Marina, ces derniers ont pointé du doigt des problèmes importants de saleté des locaux, de l’huile de la friteuse retrouvée noircie et cristallisée et des denrées alimentaires moisies. Ils ont également dénoncé des tromperies sur les produits et souligné que les tartares étaient fabriqués à partir de produits achetés congelés.

Pour Le Dehli, les inspecteurs ont fait état de locaux mal entretenus et sales, de l’entreposage de denrées dans des conditions favorisant les contaminations, et noté l’absence de justificatif de formation à l’hygiène des aliments des employés présents le jour du contrôle.

« Les mesures de fermeture seront levées dès que l’établissement sera de nouveau aux normes », précise la préfecture du Val-d’Oise.

«Préserver la santé publique et protéger les consommateurs»
Ces derniers cinq mois, les contrôles de la Direction départementale de la protection des populations du Val-d’Oise (Ddpp95) se multiplient sur les marchés et dans les restaurants. Si plusieurs établissements ont dû fermer, notamment à la suite d’intoxications alimentaires de clients, plus de 650 kg de viande ont dû être jetés par des commerçants après des opérations de contrôle menées sur les marchés de Sarcelles et de Garges-lès-Gonesse.

Puis intervient le bla bla bla habituel, 
«Ces contrôles visent à préserver la santé publique et protéger les consommateurs, notamment des intoxications alimentaires. Les services de l’État demeurent pleinement mobilisés sur le terrain, en multipliant ce type d’opérations, indique la préfecture du Val-d’Oise», souligne la préfecture du Val-d’Oise.

Commentaire
Comme indiqué précédemment, il s’agit d’opérations coup de poing, ce n’est pas beaucoup au regard de ce qui vendu ou proposé régulièrement aux consommateurs rfréquentant ces établissements. Oui à des contrôles réguliers, des sanctions plus importantes car les opérations coup de poing ne représentent qu’une partie de ce que devrait être des contrôles.

Je relate inlassablement l’état en France des inspections en sécurité des aliments,
2012 : 86 239
2013 : 82 729
2014 : 78 000
2015 : 76 000
2016 : 55 000
2017 : 54 000
2018 : 57 500
2019 : 58 200
2020 : 41 600
2021 : 48 775
Il faut toujours savoir revenir aux faits !

Dans un autre registre, un article très intéressant paru sur Food Safety News s’intéresse à la pénurie de main d’oeuvre et la sécurité des aliments dans les restaurants aux Etats-Unis, Understaffing restaurants and the risk of foodborne Illness (Les restaurants en sous-effectif et le risque de maladies d'origine alimentaire).
Fin septembre 2021, un sondage menée par la National Restaurant Association a montré que 78% des exploitants ont déclaré que leurs restaurants n'avaient pas suffisamment d'employés pour répondre à la demande des clients. 

Notez aussi par ailleurs que le personnel chargé des contrôles en sécurité des aliments en France est aussi en sous effectif ...

NB : Photo © Préfecture du Val-d’Oise.

Incidence préliminaire et tendances des infections causées par des pathogènes transmis couramment par les aliments en 2021 aux Etats-Unis

«Incidence préliminaire et tendances des infections causées par des pathogènes transmis couramment par les aliments. Données issues du Réseau de surveillance active des maladies d'origine alimentaire sur 10 sites aux Etats-Unis, 2016-2021», source MMWR du 7 octobre 2021.

Sommaire
Que sait-on déjà sur ce sujet ?
En 2020, le nombre d'infections signalées au Réseau de surveillance active des maladies d'origine alimentaire (FoodNet) a diminué par rapport à la moyenne signalée de 2016 à 2018. Les mesures liées à la pandémie ont probablement réduit l'occurrence de certaines infections et limité la détection d'autres.

Qu'apporte ce rapport ?
En 2021, le nombre d'infections signalées à FoodNet a diminué de 8% par rapport à la moyenne de 2016-2018, probablement en raison de la pandémie. La plupart des infections ont été causées par Campylobacter ou Salmonella ; les cinq sérotypes de Salmonella les plus courants sont restés prédominants. L'utilisation de tests de diagnostic indépendants de la culture a augmenté.

Quelles sont les implications pour la pratique de la santé publique?
Des efforts considérables sont nécessaires pour améliorer la sécurité des aliments. Des progrès substantiels sont nécessaires pour atteindre les objectifs nationaux, en particulier pour Salmonella et Campylobacter. Les cultures traditionnelles restent essentielles pour la surveillance des infections entériques.

Pour évaluer les progrès réalisés dans la prévention des infections entériques aux États-Unis, le Foodborne Diseases Active Surveillance Network (FoodNet) mène une surveillance active basée sur la population pour les infections diagnostiquées en laboratoire causées par Campylobacter, Cyclospora, Listeria, Salmonella, Escherichia coli producteurs de shigatoxines (STEC), Shigella, Vibrio et Yersinia sur 10 sites aux États-Unis. Ce rapport résume les données préliminaires de 2021 et décrit les changements dans l'incidence annuelle par rapport à l'incidence annuelle moyenne pour 2016-2018, la période de référence pour les objectifs du U.S. Department of Health and Human Services’ (HHS), Healthy People 2030. En 2021, l'incidence des infections causées par Salmonella a diminué, l'incidence des infections causées par Cyclospora, Yersinia et Vibrio a augmenté, et l'incidence des infections causées par d'autres pathogènes n'a pas changé. Comme en 2020, les modifications comportementales et les interventions de santé publique mises en œuvre pour contrôler la pandémie de la COVID-19 pourraient avoir réduit la transmission des infections entériques. D'autres facteurs (par exemple, l'utilisation accrue de la télémédecine et l'augmentation continue de l'utilisation des tests de diagnostic indépendants de la culture) pourraient avoir modifié leur détection ou leur notification. Il reste encore beaucoup à faire pour atteindre les objectifs du HHS (ministère de la Santé), Healthy People 2030, en particulier pour les infections à Salmonella, qui sont fréquemment attribuées aux produits de volaille, et les infections à Campylobacter, qui sont fréquemment attribuées aux produits de poulet.

FoodNet est une collaboration entre le CDC, 10 départements de santé des États, le Food Safety and Inspection Service du ministère américain de l’Agriculture (FSIS-USDA) et la Food and Drug Administration (FDA). La zone de FoodNet (Connecticut, Géorgie, Maryland, Minnesota, Nouveau-Mexique, Oregon, Tennessee et certains comtés de Californie, du Colorado et de New York) comprend environ 15% de la population américaine (environ 50 millions de personnes en 2020).

En 2021, FoodNet a identifié 22 019 cas d’infection, 5 359 hospitalisations et 153 décès. L'incidence a été la plus élevée pour Campylobacter (17,8 cas pour 100 000 habitants) et Salmonella (14,2). Dans l'ensemble, 8% d'infections en moins ont été signalées en 2021 par rapport à la moyenne de 2016 à 2018 ; l'incidence a diminué pour Salmonella, a augmenté pour Cyclospora, Vibrio et Yersinia et est restée inchangée pour Campylobacter, Listeria, Shigella et STEC. Le pourcentage d'infections entraînant une hospitalisation et le pourcentage d'infections associées à une épidémie sont restés stables. Dans l'ensemble, 7% des infections en 2021 ont étét étaient associées à des voyages internationaux, contre 13% en 2016-2018.

Les deux tiers (67%) des infections bactériennes ont été diagnostiquées à l'aide de tests indépendant de la culture (CIDT pour culture-independent diagnostic tests) en 2021, contre environ la moitié (49%) de 2016 à 2018. En 2021, 37% des infections bactériennes ont été diagnostiquées en utilisant uniquement la CIDT (c'est-à-dire que l'échantillon avait un résultat de culture négatif ou n'était pas cultivé) contre 26% en 2016-2018. Une culture a été réalisée pour 70% des infections diagnostiquées par CIDT en 2021, comme en 2016-2018. Les tentatives de mise en culture ont diminué pour Campylobacter, Listeria, STEC, Vibrio et Yersinia. Le pourcentage de mise en culture ayant donné un pathogène variait de 24% pour Yersinia à 89% pour Listeria.

Parmi 6 110 isolats de Salmonella, 5 442 (89%) ont été sérotypés en 2021. Les sept sérotypes les plus courants étaient Enteritidis (908 ; 17%), Newport (596 ; 11%), Typhimurium (510 ; 9%), Javiana (406 ; 7%), I 4,[5],12:i:- (304 ; 6%), Oranienburg (247 ; 5 %) et Infantis (232 ; 4 %). Par rapport à 2016-2018, l'incidence était plus élevée pour Oranienburg (augmentation de 38,6% ; intervalle de crédibilité [Icr] à 95% = 14,2% à 72,1%) et Infantis (23,7% ; [Icr] 95% = 2,9% à 48,7%), plus faible pour I 4,[5],12:i:- (−33,4% ; [Icr] 95% = −45,4% à −17,9%), Typhimurium (−29,2% ; [Icr] 95% = −35,7% à −22,4%), et Enteritidis (−24,7 % ; [Icr] 95% = −33,6% à −15,6%), et inchangé pour Javiana (−23,0% ; [Icr] 95% = −44,0% à 12,4%) et Newport (−8,7% ; [Icr] 95% = −28,5% à 19,2%). Enteritidis, Newport, Typhimurium, Javiana et I 4,[5],12:i:- font partie des cinq sérotypes les plus courants depuis 2010. Infantis fait partie des 10 plus courants depuis 2013. En 2021, Oranienburg a provoqué une épidémie liée à des oignons ; avant cela, Oranienburg figurait pour la dernière fois parmi les 10 sérotypes les plus courants en 2009.

Parmi les 1 203 isolats de STEC en 2021, le sérogroupe O157 était le plus courant (314 ; 26 %), suivi de O26 (179 ; 15%), O103 (140 ; 12%) et O111 (116 ; 10%). En 2020, FoodNet a identifié 49 cas de SHU post-diarrhéique chez des enfants et adolescents âgés de moins de 18 ans (0,4 cas pour 100 000), dont 21 (43%) chez des enfants âgés de moins de 5 ans (0,7 pour 100 000). L'incidence globale du SHU était similaire à celle de 2016-2018 (variation de -7,6 % ; [Icr] 95% = -21,1% à 8,4%). L'incidence des infections à STEC O157 en 2020 a diminué de 16,8% ([Icr] 95% = -25,0% à -9,3%) par rapport à la moyenne de 2016 à 2018. Dans l'ensemble, 37 (76%) cas de SHU présentaient des signes d'infection à STEC ; 18 des 23 (78 %) cas de SHU avec infection à STEC confirmée par culture appartenaient au sérogroupe O157.

NB : Merci à Joe Whitworth de m’avoir signalé cette information.
L'image provient du CDC et représente les zones de surveillance de FoodNet.