samedi 9 mai 2020

COVID-19: Le confinement a peut-être sauvé des vies en Europe, mais au fait, combien ?


Avant d’en venir aux études qui ont estimé un certain nombre de vies sauvées, voici quelques données.

Je me fie depuis le début de la pandémie de COVID-19 à ces trois sites Internet,

Université John Hopkins (Etats-Unis)

Voici, selon ces trois sites, la situation en France au 9 mai 2020 à 07h30
Site Internet
Nombre de cas
Nombre de décès
South China Morning Post
174 918
25 990
CEBM de l’Université d’Oxford
176 079
26 230
Université John Hopkins
176 202
26 233

Par ailleurs, selon le CEBM de l’Université d’Oxford, données mises à jour au 7 mai 2020, la France avec 14,82% est le troisième pays au monde pour le taux de létalité, derrière le Royaume-Uni, en deuxième position avec 14,96%, et en premier, la Belgique avec 16,37.

Le taux de létalité est le nombre de décès rapportés par nombre de cas rapportés.

Intéressons maintenant à ce qui a été rapporté dans la presse pour la France, à savoir « le confinement a permis de sauver 60 000 vies » en France. 

Trois études sont proposées l'une en France, la seconde en Belgique et la troisième s'est intéressée à 11 pays d'Europe dont la France.

Un article de BFMTV détaille bien cela pour la France dans « Combien le confinement a-t-il sauvé de vies? Découvrez les estimations des chercheurs, région par région ».
Le confinement aurait sauvé un peu plus de 60 000 vies dans l'Hexagone. C'est ce qu'affirment des chercheurs de l'École des Hautes Études en Santé Publique (EHESP).
Selon leur étude, 73 909 personnes seraient mortes du coronavirus au 19 avril sans la mise en place du confinement, six fois plus que le bilan réel au même moment - un peu plus de 12 000 décès à l'hôpital, sans compter les Ehpad.

Dans le résumé de l’étude, les auteurs indiquent,
Nous avons développé un modèle de transmission spatialisé, déterministe, structuré par âge et compartimenté du SRAS-CoV-2 capable de reproduire la dynamique de pré-confinement de l'épidémie dans chacune des 13 régions métropolitaines françaises.
Grâce à ce modèle, nous estimons, aux niveaux régional et national, le nombre total d'hospitalisations, d'admissions en unités de soins intensifs (USI), les besoins en lits d'hôpitaux (hospitalisation et USI), et les décès hospitaliers qui auraient pu être évités par cette intervention massive et sans précédent en France.
Si aucune mesure de contrôle n'avait été mise en place, entre le 19 mars et le 19 avril 2020, notre analyse montre que près de 23% de la population française aurait été affectée par le COVID-19 (14,8 millions d'individus).
Ainsi, le confinement français a empêché 587 730 hospitalisations et 140 320 admissions en unité de soins intensifs au niveau national. Le nombre total de lits de soins intensifs requis pour traiter les patients dans des conditions critiques aurait été de 104 550, ce qui est bien supérieur à la capacité maximale des soins intensifs français.
Ce premier mois de confinement a également permis d'éviter 61 739 décès à l'hôpital, ce qui correspond à une réduction de 83,5% du nombre total de décès prévus.
Notre analyse montre qu'en l'absence de mesures de contrôle, l'épidémie de COVID-19 aurait eu un fardeau de morbidité et de mortalité critique en France, accablant en quelques semaines les capacités hospitalières françaises.

Ce que les auteurs disent bien, si aucune mesure de contrôle n’avait été mise en œuvre pendant une période d’un mois, mais en dehors du confinement, il y a eu les gestes barrière, complément indispensable au confinement.

Cette étude ne prend pas en compte ni les EHPAD, dont on sait, hélas, que la mortalité a été très élevée, ni l’excès de mortalité pendant cette période.

Pour dire les choses comme je le pense, cette étude, ce n’était pas son objectif, servira de caution au gouvernement en cas de mis en difficulté … afin de justifier la mise en œuvre du confinement.

D’autres études présentées par le blog avait indiqué que le port du masque fait maison aurait permis d’éviter beaucoup plus de décès que le seul confinement. Le port du masque, confinement individuel, non prôné par nos autorités de santé voir du gouvernement.

Ainsi, une étude publiée par des scientifiques de l'Arizona State University a révélé que si 80% des personnes ne portaient que des masques moyennement efficaces, cela pourrait réduire le nombre de décès à New York de 17 à 45% sur une période de deux mois . Même le port de masques efficaces à seulement 20% pourrait réduire la mortalité de 24 à 65% à Washington et de 2 à 9% à New York, si suffisamment de personnes les portaient.

Malheureusement, malgré la recommandation de 50 chercheurs, le port du masque n’est toujours pas obligatoire dans les rues et pendant les courses en France, décidément ce gouvernement a du mal avec les masques même faits maison …

Des études sur le nombre vies sauvées, il y en a d’autres … en Belgique,
A l’initiative de l’Université de Namur, des chercheurs et professeurs de plusieurs universités francophones collaborent et partagent leurs savoirs pour modéliser des scénarios, notamment de déconfinement, et aider à la prise de décision.
Les chercheurs du consortium ont modélisé différents scénarios afin d’évaluer ce qui aurait pu se passer, ce qu’il s’est passé et ce qui pourrait se passer.

Ce qui aurait pu se passer
Si le gouvernement n’avait pas pris de mesures de confinement le 14 mars, on aurait assisté à une croissance exponentielle des contaminations avec une saturation de la capacité hospitalière dès la fin mars. A l’inverse si les mesures de confinement avaient été strictement respectées, on aurait assisté à une réduction importante du nombre d’hospitalisations (moins de 10 par jour et mois de 200 hospitalisation aujourd’hui). Les modèles montrent également que si le gouvernement avait pris les mesures quatre jours plus tard, l’effet aurait été très important sur le nombre d’hospitalisations et de décès. Par ailleurs, le déconfinement n’aurait pas été possible avant les mois de juin/juillet.

Ce qu’il s’est passé
Les chercheurs se sont également intéressés à l’évolution réelle de la situation. Tous les paramètres des modèles ont été adaptés pour être au plus proche de la réalité. Ces modèles permettent par exemple de mesurer et de prédire le nombre de patients hospitalisés en soins intensifs, le nombre de décès à l’hôpital, en maison de repos ou par classes d’âge.

Selon L’Echo,
En ce qui concerne l’expansion de la maladie, les experts assurent que si on n’avait pas pris la décision de confiner le pays le 14 mars, l’épidémie aurait échappé à tout contrôle. On aurait eu 10 000 hospitalisations par jour à partir de début avril et au moins 100 000 décès aujourd’hui.

Encore plus fort que l'étude française ! 

La Belgique a aujourd’hui le taux de létalité le plus élevé au monde avec 16,37%, le nombre de cas le plus élevé au monde par million d’habitant avec 4 488 cas et le nombre de décès le plus élevé au monde par million d’habitant avec 735 décès, selon le CEBM.

Une troisième étude, cette fois-ci, est celle de l’Imperial College London qui a estimé que « Les mesures contre le coronavirus ont peut-être déjà évité jusqu'à 120 000 décès en Europe ». Voilà déjà un titre plus modeste ... et le titre indique bien 'peut-être' ...

On estime que de fortes mesures de distanciation sociale pour ralentir et supprimer la propagation du COVID-19 à travers l'Europe ont évité des milliers de décès.

Les résultats proviennent d'une nouvelle analyse par des chercheurs de l'Imperial College London, qui estime l'impact potentiel des interventions dans 11 pays européens pour lutter contre la pandémie de coronavirus - y compris les fermetures d'écoles et les confinements nationaux.

Selon l’étude, jusqu'à 120 000 décès ont pu être évités dans 11 pays, dont le Royaume-Uni, l'Italie et l'Espagne. Cependant, ils ajoutent que la proportion estimée de personnes ayant été infectées par le virus ne peut représenter qu'entre 2 et 12% de la population (2,7% au Royaume-Uni).

Dans le résumé de l’étude, il est indiqué « Les interventions actuelles restant en place jusqu'à au moins fin mars, nous estimons que les interventions dans les 11 pays auront évité 59 000 décès jusqu'au 31 mars. »


Réponse à l'échelle européenne
De nombreux pays européens ont désormais mis en œuvre des mesures sans précédent pour atténuer l'impact de COVID-19, notamment l'isolement des cas confirmés et suspects, la fermeture des écoles et des universités, l'interdiction des rassemblements de masse et, plus récemment, une distanciation sociale à grande échelle, y compris des confinement locaux et nationaux.

De telles interventions visent à gérer l'épidémie pour prévenir une augmentation des cas qui surchargerait la capacité de soins de santé. Désormais, la dernière modélisation montre que cela peut avoir un impact significatif, évitant potentiellement jusqu'à 120 000 décès en Europe.

Modélisation de l'impact
Dans le dernier rapport, les chercheurs ont cherché à modéliser l'impact probable des interventions en place sur la réduction des pertes de vie. L'équipe a utilisé les données quotidiennes en temps réel du Centre européen de contrôle des maladies (ECDC) sur le nombre de décès dans 11 pays européens: Autriche, Belgique, Danemark, France, Allemagne, Italie, Norvège, Espagne, Suède, Suisse et États-Unis Royaume.

Les modèles se sont concentrés sur le nombre reproductif - le nombre moyen de nouvelles infections générées par chaque personne infectée. On a supposé que les changements dans le nombre de reproducteurs étaient une réponse immédiate à ces interventions mises en œuvre, plutôt que des changements graduels plus larges de comportement. Dans l'ensemble, les modèles estiment que les pays ont réussi à réduire leur taux de reproduction de la maladie.

L’analyse de l’équipe montre que les interventions actuelles restant en place, ces mesures dans les 11 pays auront évité entre 21 000 et 120 000 décès jusqu’au 31 mars. Ils ajoutent que de nombreux décès supplémentaires seront évités en maintenant les interventions en place jusqu'à ce que la transmission tombe à de faibles niveaux.

En plus de réduire les décès, le dernier rapport estime qu'entre 7 et 43 millions de personnes ont été infectées par le coronavirus (SARS-CoV-2) dans les 11 pays jusqu'au 28 mars, ce qui représente entre 1,88% et 11,43% de la population.

Compte tenu du décalage de 2 à 3 semaines entre le moment où les changements de transmission se produisent et le moment où leur impact peut être observé sur les tendances des décès, il est peut-être encore trop tôt pour montrer pour la plupart des 11 pays que les interventions récentes ont été efficaces.

Les chercheurs soulignent que les résultats sont fortement influencés par les données des pays ayant des épidémies plus avancées et des interventions antérieures. Il est essentiel, expliquent-ils, que les mesures actuelles de distanciation sociale restent en place et que les tendances des cas et des décès soient étroitement surveillées dans les prochains jours et des semaines afin de rassurer que la transmission du virus ralentit.

Le rapport complet «Estimation du nombre d'infections et de l'impact des interventions non pharmaceutiques sur le COVID-19 dans 11 pays européens» est disponible ici.

Complément de fin de journée.
Je suis tombé sur une vidéo d'une interview de Jean-François Toussaint, directeur de l’institut d’épidémiologie Irmes (Institut de recherche biomédicale et d’épidémiologie du sport) et c'est assez détonnant ... il a comparé les résultats des pays selon le confinement ou pas de leur population ...

Il semble remettre en cause le confinement, mais pas des gestes barrière et encore moins du port du masque ...

« Les pays qui ont confiné et ceux qui n’ont pas confiné ont le même taux de mortalité à la fin de cette vague », explique-t-il. « Pour les pays qui n’ont pas confiné en Europe, comme la Suède et les Pays-Bas, ou qui font un confinement très ciblé comme l’Allemagne, on voit que l’ensemble des phases ascendantes puis descendantes sont les mêmes. »

« Au moment où tous les pays ont passé le pic, un peu en-dessous de la moitié de l’ensemble de la vague, ces trois pays [la Corée du Sud, la Suède et les Pays-Bas] ont le même résultat en moyenne que les autres pays européens qui ont confiné de façon stricte », assure-t-il.


Après l'avoir écouté, faites-vous votre propre opinion ...




Mise à jour du 5 juin 2020. Je relaie un peu tardivement un article de Jean-Pierre Nordmann paru dans Contrepoints du 12 mai 2020, Les modèles du Premier ministre se révèlent… faux !
Le confinement tel que pratiqué en France ne permettrait pas de réduire significativement la mortalité par rapport à d’autres approches plus ciblées.

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