Cette céréale OGM pourrait mieux capter l’azote de l’air et ainsi éviter des engrais azotés. Devinez qui va s’y opposer?.:) https://t.co/MC1T2kqTFj
— François Momboisse (@fmomboisse) July 27, 2022
Philip Pool (Oxford) et ses collègues ont eu l’idée de combiner deux organismes génétiquement modifiés, un orge et une bactérie, pour faire naître une symbiose vertueuse. Le génome de l’orge a été manipulé pour lui faire produire une molécule, la rhizopine, qui sert de signal pour enclencher une cascade de réactions chez la bactérie Azorhizobium caulinodans, présente dans les racines de la plante, afin de lui faire capter l’azote de l’air. La bactérie avait, de son côté, été préalablement modifiée pour réagir de façon conditionnelle à la rhizopine.
L’un des objectifs poursuivis était que cette association ne soit bénéfique qu’à la plante d’intérêt, en l’occurrence l’orge, et que l’azote atmosphérique (N2) capté, transformé en ammoniac (NH3) par la bactérie, ne serve pas à fertiliser les « mauvaises herbes ». C’est bien ce qui a été observé. Mais il reste du chemin à parcourir avant que cette preuve de concept ne vienne changer les pratiques culturales. Les chercheurs notent par exemple que l’activité nitrogénase, assurée par une enzyme qui concourt à la production d’ammoniac, est encore «sous-optimale» dans le micro-organisme génétiquement modifié par rapport aux bactéries dites «sauvages».
L’écologue microbien Yves Dessaux, ancien directeur de recherche au CNRS, dont les travaux sont cités dans l’article des PNAS, ne dira pas le contraire. «Ce sont des idées sur lesquelles nous travaillions déjà il y a vingt-cinq ans», rappelle-t-il. Il n’avait pu les poursuivre « faute de financements», et dans un contexte où les OGM n’étaient pas en vogue. Il salue l’approche «très rusée» de ses collègues anglo-saxons. Mais note que plusieurs obstacles devront encore être franchis.
«Il faudra vérifier que cela apporte vraiment un plus à la plante dans des conditions où l’apport d’azote par le sol est limitant», note-t-il par exemple. En effet, les céréales disposent d’autres circuits d’approvisionnement de ce fertilisant, qui peuvent être moins «coûteux» en énergie pour elles, et pour les bactéries qui participent à cette capture. Il faudra voir aussi si Azorhizobium caulinodans, mise «contre son gré» au service de l’orge, n’inactivera pas cette fonction pour rétablir son métabolisme naturel moins énergivore pour elle. En outre, cette nouvelle symbiose génétiquement modifiée supposera très probablement des inoculations bactériennes régulières dans le sol, le microcosme souterrain étant impitoyable avec les nouveaux venus. Quant aux obstacles réglementaires, on peut aussi gager qu’ils ne manqueront pas. Source Le Monde.
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