Voici que Santé publique de France communique le 12 décembre 2020 sur l'«Épidémie d'infections à Escherichia coli producteur de Shiga-toxines O26:H11 liée à la consommation de fromages au lait cru. France, mars-mai 2019».
Résumé
Entre le 10 et le 18 avril 2019, Santé publique France a reçu 7 signalements de syndrome hémolytique et urémique (SHU) pédiatrique notifiés par des services hospitaliers participant à la surveillance, comparé à moins de 10 cas par mois signalés en avril les années précédentes.
Des investigations épidémiologiques ont débuté le 18 avril à l’aide du questionnaire standardisé STEC pour explorer les expositions communes aux cas. Les prélèvements de selles ont été adressés au laboratoire associé du Centre national de référence (LA-RD) pour confirmation d’une infection à Escherichia coli producteur de Shiga-toxines (STEC) et le séquençage des souches isolées a été réalisé par le Centre national de référence de E. coli, Shigella et Salmonella (CNR-ESS). À partir du 26 avril, une enquête de traçabilité amont et aval des aliments suspectés a été réalisée par la Direction départementale de la protection des populations (DDPP) et la Direction générale de l’alimentation (DGAl), en collaboration avec les sièges nationaux des enseignes concernées par la vente de ces produits. Les analyses microbiologiques alimentaires et environnementales chez le producteur ont été réalisées par le Laboratoire national de référence des E. coli (LNR).
Un cas a été défini comme une personne ayant présenté entre le 1 mars et le 12 mai 2019 une diarrhée ou un SHU avec mise en évidence de la souche STEC épidémique (cas confirmé) ou, avec un lien épidémiologique et absence de mise en évidence de souche de STEC (cas probable).
Au total, 19 cas ont été identifiés en lien avec cette épidémie (18 cas confirmés et 1 cas probable) dont 17 SHU et deux cas de diarrhée sans complication (un enfant et un adulte).
L’âge médian des cas étaient 22 mois (min-max : 6 mois - 63 ans). Cinquante-trois pour cent des cas étaient de sexe féminin. Parmi les 17 enfants ayant présenté un SHU, 8 (47%) ont eu une atteinte neurologique. Les cas résidaient dans 8 régions de France métropolitaine et ont débuté leurs signes entre le 31 mars et le 12 mai 2019. Pour 18 cas, une souche de STEC O26 possédant les gènes stx2 et eae a été isolée (analyse STEC négative pour un cas). L’analyse phylogénique réalisée par le CNR-ESS a montré que les 18 souches appartenaient à un même cluster génomique (cgMLST HC5|75047 et analyse SNP).
La consommation de fromages Saint-Félicien et/ou Saint-Marcellin a été rapportée pour 15 des 18 cas confirmés soit par le cas (11 cas) soit par l’entourage familial (4 cas). La traçabilité des achats a identifié un lien possible avec un producteur commun de ces fromages dans la Drôme (département 26). L’achat de fromages issus de ce producteur a pu être documenté sur les cartes de fidélité de 7 cas. Pour les autres cas, les lieux d’achat cités par les familles étaient approvisionnés par le producteur incriminé sur la période d’achat d’intérêt. Des prélèvements alimentaires (issus de fromages en amont et en aval de la période épidémique) et environnementaux chez le producteur étaient négatifs. Les fromages étaient distribués à l’étranger, mais aucun autre cas hors la France n’a été identifié en lien avec cette épidémie.
Des mesures de retrait-rappel ont été mises en place dès le 27 avril, sans attendre les résultats de séquençage des souches humaines et les investigations microbiologiques chez le producteur. En effet, cette décision a été basée sur les éléments disponibles à la date du 27 avril : le nombre élevé de SHU pédiatriques (19 cas suspects en cours d’investigation), la prédominance du sérogroupe O26, la fréquence élevée de consommation de fromages Saint-Félicien et/ou Saint-Marcellin rapportée pour les cas et l’identification via les cartes de fidélité d’un même producteur des fromages achetés par plusieurs familles des cas. Cette épidémie souligne encore une fois le risque que représente la consommation de fromages au lait cru pour les populations sensibles, notamment les jeunes enfants. Suite à cette épidémie, la DGAl, la DGS et Santé publique France ont renforcé les messages de prévention auprès des consommateurs.
Mots-clés
Escherichia coli producteurs de shigatoxines, STEC, syndrome hémolytique et urémique, fromage au lait cru.
Référence
Jones G, Mariani-Kurkdjian P, Donguy MP, Lefèvre S, Sergentet D, Vaissière E, et al. Épidémie d’infections à Escherichia coli producteur de Shiga-toxines O26:H11 liée à la consommation de fromages au lait cru. France, mars-mai 2019. Saint-Maurice : Santé publique France, 2020, 27 p.
On nous dit « Des mesures de retrait-rappel ont été mises en place dès le 27 avril, sans attendre les résultats de séquençage des souches humaines et les investigations microbiologiques chez le producteur. »
On ne peut pas dire que les mesures de retrait-rappel ont été rapides, plus de 10 jours entre l'apparition des cas et les mesures de retrait-rappel … les communiqués de presse datent du 27 avril et du 2 mai 2019, voir les communiqués dans l'étude complète précitée et les articles du blog dans les liens en relation avec les dates. Certains cas ont même débuté leur signes dès le 31 mars 2019 ...
Dans la discussion, les auteurs rappellent,
Cette épidémie souligne encore une fois le risque que représente la consommation de fromages au lait cru pour les populations sensibles, notamment les jeunes enfants. Suite à cette épidémie, le ministère de l’agriculture et de l’alimentation, le ministère des solidarités et de la Santé et Santé publique France ont renforcé les messages de prévention auprès des consommateurs et des mesures de prévention au niveau du consommateur devraient continuer à être priorisées pour mieux sensibiliser le grand public à ce risque. Une communication ciblée auprès des professionnels de santé de la petite enfance (médecins généralistes, pédiatres, assistantes maternelles…) pourrait également permettre d’améliorer l’information sur ces risques.
Quand sera faite cette communication ciblée ou bien a-t-elle déjà été faite ? Voir ici.
A propos « du risque que représente la consommation de fromages au lait cru pour les populations sensibles », il n'y a pas que le lait cru, il y a aussi le steak haché ou hamburger pas assez cuit à cœur …
Selon Santé publique de France, l'incidence du syndrome hémolytique et urémique pédiatrique en 2019 est élevée. Voir l'article du blog à ce sujet.
En 2019, 168 cas de syndrome hémolytique et urémique pédiatrique ont été notifiés à Santé publique France. L’incidence annuelle du SHU pédiatrique était de 1,46 cas/100 000 personnes-années (PA) chez les enfants de moins de 15 ans, incidence la plus élevée observée depuis le début de la surveillance. L’incidence est maximale chez les enfants de moins de 3 ans, et diminue avec l’âge. Cette incidence en 2019 est la plus élevée observée depuis le début de la surveillance (5,78 cas/100 000 PA).
Selon Wikipédia,
En épidémiologie, la personne-année est une unité de mesure des personnes-temps. Cela correspond à la durée de suivi d'une personne non-malade pendant un an aussi bien qu'à la durée de suivi de deux personnes non malades pendant 6 mois. Cette unité de mesure est utilisée pour calculer le taux d'incidence d'une maladie.
L'incidence élevée en 2019 s'explique en partie par l'épidémie de STEC O26 liée à la consommation de fromage au lait cru.
L'incidence régionale montre une disparité significative chaque année. Cette année, les taux les plus élevés ont été enregistrés en Corse, Auvergne-Rhône-Alpes et en Occitanie. Les deux dernières régions ont été particulièrement touchées par l'épidémie à E. coli O26.
Comme en 2018, le sérogroupe le plus fréquent était O26, avec un total de 62 cas en 2019, suivi par O80 dans 21 cas et O157 10 fois.
Enfin, on lira sur le blog, SHU pédiatrique lié à Escherichia coli producteurs de shigatoxines, une revue de 10 ans de la surveillance en France, 2007 à 2016.
Il faudra aussi penser à ces enfants et en cette période de vœux, le meilleur pour leur santé, et en particulier, cet article du blog, Il faut toujours se rappeler les histoires des personnes derrière des intoxications alimentaires, une édition avec E. coli O157.
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