L’été est souvent propice à voir ce que l’on n’a pu tout lire au cours
de l’année …
Ainsi en est-il de cet événement annoncé sur le site de l’INSERM le 23
mai 2019, « Les
pouvoirs extraordinaires des bactéries visualisés en direct ».
La dissémination globale de résistances aux antibiotiques
est un problème majeur de santé publique et une priorité de la recherche
internationale en microbiologie. Dans ses travaux à paraître dans Science, Christian
Lesterlin, chercheur Inserm au sein du laboratoire « Microbiologie
moléculaire et biochimie structurale » (CNRS/Université Claude Bernard
Lyon 1) à Lyon, a pu filmer avec son équipe le processus d’acquisition de
l’antibiorésistance en temps réel, et a découvert un acteur essentiel mais
inattendu dans son maintien et dans sa dissémination au sein des populations
bactériennes.
Cette dissémination de l’antibiorésistance est en grande
partie due à la capacité qu’ont les bactéries d’échanger du matériel génétique
par un processus appelé conjugaison bactérienne. Le séquençage systématique de
souches pathogènes ou environnementales a permis d’identifier une grande
variété d’éléments génétiques transmissibles par conjugaison et porteurs des
résistances à la plupart, sinon à toutes les classes d’antibiotiques
actuellement utilisés dans les traitements cliniques. En revanche, le processus
de transfert in vivo du matériel génétique d’une bactérie à
l’autre, le temps nécessaire à l’acquisition de cette résistance une fois le
nouveau matériel génétique reçu et l’effet des molécules antibiotiques sur
cette résistance étaient encore inconnus.
Une visualisation en
temps réel
Les chercheurs ont choisi d’étudier l’acquisition de la
résistance de la bactérie Escherichia coli à un antibiotique couramment
utilisé, la tétracycline en mettant une bactérie sensible à l’antibiotique en
présence d’une bactérie résistante. Des études précédentes ont montré que cette
résistance repose sur sa capacité à évacuer l’antibiotique avant qu’il n’ait pu
jouer son rôle destructeur grâce à des « pompes à efflux » situées
sur sa membrane. Ces pompes à efflux spécifiques, sont capables d’éjecter les
molécules antimicrobiennes en dehors de bactéries, leur conférant ainsi un
certain niveau de résistance.
Dans cette expérience, la transmission de l’ADN d’une « pompe
à efflux » spécifique – la pompe TetA – a été observée entre une bactérie
résistante et une bactérie sensible par marquage fluorescent. Grâce à
l’apport de la microscopie en cellule vivante, il suffisait alors de suivre la
progression de la fluorescence pour voir, la manière dont l’ADN de la « pompe »
migrait d’une bactérie à l’autre et comment il s’exprimait chez la bactérie
receveuse.
Les chercheurs ont ainsi mis en évidence qu’en 1 à 2 heures
seulement, le fragment d’ADN simple brin de la pompe à efflux était transformé
en ADN double brin puis traduit en protéine fonctionnelle, conférant ainsi la
résistance à la tétracycline à la bactérie receveuse.
Le transfert d’ADN des
bactéries donneuses (vertes) aux bactéries receveuses (rouges) est révélé par
l’apparition de foyers de localisation rouges. L’expression rapide des gènes
nouvellement acquis est quant à elle révélée par la production de fluorescence verte
dans les bactéries receveuses. Crédit vidéo : Christian Lesterlin/Inserm.
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